L'embellie que connaît l'Algérie ces dernières années sur le plan financier peine à se répercuter sur le vécu quotidien des citoyens. C'est la thèse développée, hier, par Dr Abderrahmane Mebtoul, expert en management stratégique, à RFI. Interrogé sur ce sujet, M. Mebtoul estime que "depuis fin 2006, nous assistons au retour à l'inflation pour des raisons externes mais également internes (dépenses improductives, mauvaise gestion), dépassant les 5% entre 2007/2008 contre 2% pour les années 2002/2005. Le ménage moyen consacrant près de 80% de son revenu aux biens essentiels (2007/2008), sans compter l'endettement croissant par des prêts divers (voiture, logement, électro- ménagers. L'estimation du montant par le ministère des Finances est supérieure à 3 milliards de dollars US courant 2007) ce qui amenuisera son pouvoir d'achat à terme, sachant que le Smig algérien est actuellement de 120 euros. Parallèlement, nous assistons à l'accroissement du chômage réel, selon les données officielles de [l'Office national des statistiques, ONS, ndlr], 13,8% pour le chômage en 2007, contre 11,8% pour 2006 que l'on essaie de gonfler par des emplois rentes. Ce sont les données du gouvernement algérien. Pour les organismes internationaux le taux d'inflation serait de 12% et le taux de chômage de 20% en 2007, touchant une large frange de la jeunesse et paradoxalement de plus en plus les diplômés, expliquant, en partie, le phénomène des harraga et l'exode massif de cerveaux qui deviennent inquiétants et constituent une hémorragie pour le pays". Sur sa lancée, l'expert algérien a évoqué également les dernières mesures prises par le gouvernement pour réguler le secteur des investissements en insistant sur la nécessité de rendre la vision de l'Algérie compatible avec les mutations que traverse l'économie mondiale et d'éviter un retour aux pratiques du passé. "Les nouvelles mesures du gouvernement visent à mieux encadrer l'économie. Mais il serait dangereux, voire suicidaire, de vouloir revenir à une économie administrée et dirigée centralement, en bloquant les réformes microéconomiques et institutionnelles. Faire un pas en avant et deux pas en arrière accroît l'incertitude auprès des investisseurs qu'ils soient nationaux ou étrangers, les réserves d'hydrocarbures étant éphémères. C'est cette incertitude qui fait qu'il est normal que les investisseurs s'orientent vers des activités à court terme, délaissant les segments à moyen et long termes, créateurs de valeurs ajoutée et d'emplois à terme", dira-t-il. L'orateur a tenu également à brosser un tableau sur la situation macroéconomique du pays en faisant ressortir l'amélioration des indices de développement dans leur ensemble : "Face à un cours du (pétrole) les réserves de change en Algérie ont fortement progressé étant estimées à 133 milliards de dollars fin juin 2008 (…) Cette aisance a permis les remboursements par anticipation de la dette extérieure l'encours de la dette extérieure à moyen et long termes passe à 15,5 milliards de dollars en 2004, à 4,889 milliards de dollars à la fin 2007 [et à moins de 700 millions de dollars à la fin juin 2008, selon le ministre des Finances], ne représentant plus que 4,4% du total des réserves de change qui permettent 40 mois d'importation de biens et services. L'Algérie a une situation financière assainie mais qui peut être provisoire si l'on ne s'attaque pas aux causes fondamentales du blocage avec des exportations hors hydrocarbures de moins de 2%". En définitive, à travers son exposé, il y a lieu de relever que le Dr Mebtoul exhorte le gouvernement à définir les paramètres d'évaluation de la situation socioéconomique du pays en compatibilité avec la situation réelle du pays.