Les marchés financiers européens poursuivent leur rebond hier, après des clôtures euphoriques la veille imitées par Wall Street et Tokyo, tandis que les autorités américaines et japonaises s'apprêtent à injecter plusieurs centaines de milliards d'euros supplémentaires dans des banques en mal de capitaux. Après un peu plus d'une heure d'échanges, l'indice paneuropéen FTSEurofirst 300 gagnait 5,4%; la Bourse de Paris prenait 5,2%, celle de Londres 4,8% et celle de Francfort 5%. Certaines valeurs phares affichaient encore des gains de plus de 10%, comme Deutsche Bank, Barclays ou Alcatel-Lucent. Le Trésor américain doit présenter à 12h30 GMT, une heure avant l'ouverture à Wall Street, les modalités d'un plan de 250 milliards de dollars (183 milliards d'euros) d'aide aux banques, dont la moitié irait aux neuf principaux acteurs du secteur aux Etats-Unis selon des sources proches du projet.Dans une tribune publiée sur le site internet du Wall Street Journal, Ben Bernanke, le président de la Réserve fédérale, estime que ce nouveau plan doit permettre de mettre un terme à la crise. "Ces mesures nous permettront de revenir à un fonctionnement plus normal du marché et d'encourager les capitaux privés à contribuer davantage à revigorer les marchés financiers", écrit-il. Le Trésor américain devrait prendre des participations dans Bank of America, Wells Fargo & Co, Citigroup, JPMorgan Chase & Co, Goldman Sachs, Morgan Stanley et Bank of New York Mellon, ont expliqué deux sources qui ont requis l'anonymat.Selon la presse, State Street et Merrill Lynch pourraient aussi recevoir des capitaux publics.Le Japon est entré à son tour dans le ballet des plans de soutien en expliquant qu'il pourrait injecter des fonds publics dans des banques régionales, présentées comme un maillon clé de la chaîne de financement des petites et moyennes entreprises. Tokyo imite les plans européens, eux-mêmes calqués sur le schéma ébauché la semaine dernière par la Grande-Bretagne, qui ont spectaculairement redonné confiance aux investisseurs lundi. Aux 250 milliards de livres (320 milliards d'euros) de garanties et de recapitalisations promis par Londres se sont ainsi ajoutés jusqu'à 500 milliards d'euros côté allemand et 360 milliards côté français. Même les pays du Golfe emboîtent le pas à Gordon Brown: les Emirats arabes unis s'apprêtent à injecter 70 milliards de dirhams (14 milliards d'euros) de fonds d'urgence dans leur secteur bancaire.De son côté, la petite Islande, victime collatérale mais emblématique de la crise, reste dans l'incertitude: alors que Reykjavik a amorcé lundi un mouvement vers le Fonds monétaire international et l'Union européenne, une délégation est à Moscou pour discuter un éventuel prêt d'urgence de l'Etat russe de plusieurs milliards d'euros. En Asie, la Bourse de Tokyo a terminé sur un bond de 14,15%, la plus forte hausse en une seule séance depuis la création de l'indice Nikkei il y a 58 ans. A New York, le Dow Jones .DJI a clôturé lundi sur un bond de 11,1%. "Les investisseurs sortent la tête des abris", résume Sean Callow, stratège devises de Westpac. Les grandes places boursières avaient chuté de plus de 15% la semaine dernière, la panique suscitée par la paralysie du marché interbancaire provoquant des mouvements de ventes massifs. Mais si l'implosion des Bourses semble avoir été évitée, le ralentissement brutal de l'économie mondiale, lui, reste d'actualité. Dans un entretien à Reuters, le tout nouveau prix Nobel d'économie, l'Américain Paul Krugman, estime ainsi que le monde se dirige sans doute vers "une violente récession". Selon un économiste officiel chinois, la croissance de la Chine pourrait être revenue à 9,8% sur les neuf premiers mois de l'année, ce qui sous-entend une expansion de 9% "seulement" au troisième trimestre, sa plus mauvaise performance depuis 2001.Autre motif de préoccupation: si les marchés actions effacent rapidement une bonne partie de leurs pertes des derniers jours, les marchés interbancaires, eux, sont encore loin d'être revenus à un fonctionnement normal. Certes, le taux Libor au jour le jour poursuivait son reflux en début de séance, revenant entre 1,5% et 3%, contre 2-4% la veille, mais le trois mois restait tendu, entre 4,5% et 5,4%, au même niveau que lundi. Les analystes soulignent qu'il faudra du temps pour que les plans gouvernementaux redonnent suffisamment confiance aux banques et qu'elles acceptent de se prêter les unes aux autres sans exiger des primes de risque importantes.