L'Europe a mis la pression sur les Etats-Unis vendredi avant le sommet mondial de Washington du 15 novembre sur la réforme du système financier international, en demandant des résultats dès début 2009, juste après l'entrée en fonction de Barack Obama. Les dirigeants de l'UE, réunis en sommet à Bruxelles, ont aussi convenu de "coordonner" leurs réponse à la récession qui les menace, mais cette profession de foi n'a pas réussi à occulter des frictions franco-allemandes sur le sujet. "Je puis dire qu'il y a une position commune assez détaillée de l'Europe" sur la réforme à réaliser du système financier, a déclaré devant la presse le chef de l'Etat français Nicolas Sarkozy, qui préside l'UE. "Nous demandons à être écoutés et entendus et vite", a ajouté le chef de l'Etat français, "je ne viens pas participer à un sommet de mondanités, les Européens ne se contenteront pas de quelques principes vagues", a-t-il dit.Une manière de mettre en garde le président américain George W. Bush, en bout de course et qui a cherché à minimiser les attentes du sommet des grands pays industrialisés et émergents du G20. Dans un texte que les dirigeants européens ont avalisé après bien des atermoiements, l'Europe dit vouloir des résultats concrets pour renforcer le contrôle des marchés financiers dans les "cent jours" suivant le sommet de Washington. Soit fin février. A partir de cette date, "nous proposerons qu'un nouveau sommet se réunisse", ajoute le document. Le président américain élu Barack Obama aura alors pris ses fonctions à la Maison Blanche. Les Européens comptent sur l'ouverture d'esprit du démocrate, qui s'est montré davantage favorable, pendant sa campagne électorale, à un renforcement de la régulation des marchés que son prédécesseur républicain. L'UE demande que plus aucun secteur de la finance n'échappe aux contrôles, y compris les paradis fiscaux et les fonds spéculatifs (hedge funds), et veut limiter les prises de risque des opérateurs. Les Européens souhaitent aussi donner au Fonds monétaire international (FMI) "un rôle central" dans la surveillance mondiale. Un point sur lequel les négociations s'annoncent ardues avec l'administration Bush, rétive à toute idée de gouvernance mondiale de la finance. Même au sein de l'Europe, des divisions demeurent en dépit des déclarations officielles sur une position commune, les pays libéraux s'inquiétant d'une risque de surrégulation. Le Premier ministre tchèque Mirek Topolanek, dont le pays succèdera à la France en janvier à la tête de l'UE, a affirmé que Nicolas Sarkozy se rendrait la semaine prochaine au sommet du G20 avec un "mandat vague" en raison de ces divergences entre les 27. Son collègue suédois Fredrik Reinfeldt a ouvertement critiqué le chef de l'Etat français, lui reprochant de ne pas avoir pris en compte ses "objections". Le sommet s'est aussi déroulé sur fond de tensions entre Paris et Berlin sur l'opportunité d'une action concertée en Europe face à la crise économique. La France a indiqué avoir obtenu un accord des 27 sur la nécessité d'une "réponse coordonnée", alors que Berlin s'était montré très réservé en début de semaine, craignant d'y voir l'amorce d'un "gouvernement économique européen" qu'il refuse. M. Sarkozy a néanmoins ménagé la chancelière conservatrice Angela Merkel, en mettant ce désaccord sur le compte du ministre allemand social-démocrate des Finances, Peer Steinbrück, "moins aimable qu'elle". Mais M. Steinbrück n'est pas isolé. Le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker a lui aussi lancé une pique à ce sujet Nicolas Sarkozy, estimant que la France devait d'abord "s'appliquer" à elle-même "ces règles" sur la coordination économique avec les partenaires.