S'achemine-t-on va la concrétisation du projet de création d'une Opep du gaz. La création d'une troïka gazière entre la Russie, l'Iran et le Qatar semble avoir accéléré les choses. Moscou multiplie les actions. C'est dans ce sens que les statuts du Forum des pays exportateurs de gaz (Fpeg), seront au centre d'une réunion des ministres des Etats membres le 23 décembre dans la capitale russe. Selon le ministère russe de l'Energie, "le projet final des statuts du Fpeg doit être au préalable adopté par la commission de haut niveau du Forum lors d'une réunion prévue le 26 novembre". Le temps nécessaire à l'élaboration du projet de statuts est à l'origine du report au mois décembre de la réunion ministérielle qui était initialement prévue à la mi-novembre, explique le communiqué, précisant que la Russie sera représentée par le ministre de l'Energie Sergueï Chmatko. Il faut savoir qu'au lendemain de la création de la troïka gazière, de nombreux pays consommateurs, notamment européens, avaient exprimé leurs craintes de voir l'association des pays exportateurs de gaz au sein d'un forum prendre d'autres proportions. Ce à quoi, le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, avait répondu mardi qu'elles étaient infondées. L'association des pays exportateurs de gaz au sein d'un forum en vue de coordonner leurs positions ne signifiait pas que ces derniers allaient créer "un cartel", avait-il dit. "Nous soutenons en effet cette idée (de création d'un forum des pays exportateurs de gaz) et nous sommes au courant des craintes exprimées par les pays consommateurs. Je tiens cependant à signaler que ces craintes sont absolument infondées car nous ne créons aucun cartel ni ne signons aucun accord de cartel", avait-il souligné devant la presse. "Aucun d'entre nous ne veut céder une part de sa souveraineté, cependant, les pays producteurs de ressources énergétiques, tout comme les pays consommateurs, ont le droit de coordonner leurs politiques en vue de garantir un bon approvisionnement des marchés internationaux", avait-il ajouté. De son côté, le ministre russe des Affaires étrangères avait estimé récemment que "l'ensemble des pays liés à la production d'hydrocarbures ont intérêt à ce que le marché du gaz et du pétrole soit stable", ajoutant que "cela est également dans l'intérêt des consommateurs". Cela n'a pas pour autant rassuré l'UE. La commission européenne propose de protéger l'Union européenne de la prédominance de la Russie dans les livraisons de gaz à travers l'élaboration du plan Community Gas Ring lequel a pour objectif de réunir tous les réseaux énergétiques et gaziers de l'Europe d'abord en "toile énergétique", et après, en "anneau énergétique". Le gaz pourrait ensuite couler librement entre n'importe quels endroits de l'Europe. Le document n'indique pas la source de la menace, mais il est évident qu'il s'agit en premier lieu de la Russie, qui livre à l'Europe environ 40% du gaz consommé (plus de 150 milliards de m3) et 30% du pétrole (près de 290 millions de tonnes). Quant au gaz de l'Asie centrale et du Kazakhstan, il est transporté lui aussi par des gazoducs russes, car il n'en existe pas d'autres. C'est pourquoi l'allusion à "certains" possesseurs des matières premières, qui reçoivent en échange des richesses de l'Europe, constitue manifestement un geste en direction de Moscou. La Commission propose de résoudre ce problème avec la construction de deux nouveaux gazoducs: l'un venant du Caucase du Sud et de l'Iran (Nabucco) et l'autre de l'Afrique (Gazoduc transsaharien). L'UE souhaite les créer depuis quinze ans, mais elle n'est parvenue pour le moment à rien à cause du coût exorbitant de la construction et du caractère "explosif" de ces régions. Par exemple, l'itinéraire de Nabucco n'a pas encore été fixé depuis toutes ces années. "La demande de gaz en Europe ne cesse de s'accroître, c'est pourquoi qu'aucun projet n'exclut les autres", a estime à Izvestia une source proche de l'industrie gazière. "Personne n'investira de millions dans un tuyau qui restera vide. Il faut d'abord signer des contrats, parfois pour des dizaines d'années. Et pour Nabucco ce gaz n'existe pas encore" . D'autre part, la Commission européenne aurait pu préparer le plan d'"anneau gazier" spécialement pour la visite du 14 novembre du président russe Dmitri Medvedev à Nice, afin de définir tout simplement le champ des négociations, affirme Alexeï Serov, chef du département analytique de la société d'investissement Financial Bridge. "Il s'agit d'une sorte de réponse à la création d'une "OPEP gazière", estime-t-il. "La Commission européenne tente d'élargir au maximum le nombre de fournisseurs de gaz, se rendant compte qu'ils se réuniront et coordonneront leur politique. C'est cependant presque impossible dans les conditions de la crise financière". Pour rappel, l'Union européenne importe 61% de son gaz. Un total de 42% des importations de gaz provient de la Russie. Mais "l'Union européenne est de loin le plus grand client pour les exportations de gaz russe", a noté le président de la Commission.