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Les fonds souverains de retour vers les économies locales ?
Crise financière
Publié dans Le Maghreb le 28 - 12 - 2008


Les fonds souverains ont accusé des pertes sans précédent et n'ont pas été épargnés par la crise. C'est dans ce sens, que ces derniers pourraient bien liquider leurs actifs accumulés à l'étranger en période faste pour investir localement. Des recherches réalisées par le Monitor Group, révèlent que les fonds souverains modifient les stratégies d'investissement en période d'aggravation de la crise financière globale Au troisième trimestre de 2008, alors que la crise financière globale a continué à s'aggraver, les fonds souverains ont cherché à limiter leur exposition aux risques des marchés des pays de l'OCDE. Simultanément, ces fonds ont cherché à introduire davantage de capitaux dans leurs économies nationales, de plus en plus tendues. Ces développements sont soulignés par le Monitor Group, l'une des principales sociétés de conseil, dans son analyse trimestrielle de juillet à septembre 2008 des investissements globaux dans le domaine des fonds souverains. "Les données portant sur nos transactions montrent qu'au troisième trimestre, les fonds souverains ont continué à bouder les investissements dans le secteur global des services financiers et ont continué à résister aux investissements dans l'OCDE en général, en échange d'alternatives sur les marchés émergents," a déclaré William Miracky, partenaire sénior du Monitor Group. "Plus précisément, les fonds souverains ont montré, au cours du dernier trimestre, un intérêt renouvelé et marqué pour les investissements nationaux, dont le pourcentage s'est accru pour atteindre leur niveau le plus élevé depuis 2003." Le comportement récent des fonds souverains, montre un changement marqué vers les transactions sur les marchés intérieurs et des pays émergents. 46% des transactions réalisées au cours du troisième trimestre étaient des transactions intérieures, ce qui correspond au pourcentage le plus élevé depuis 2003. Par ailleurs, 54% des transactions réalisées au cours du deuxième et troisième trimestre, selon leur valeur (23 milliards d'USD sur 42 milliards d'USD), ont été réalisées sur des marchés émergents, soit la part la plus importante de la valeur totale des transactions depuis 2005. Les investissements dans les pays de l'OCDE ont considérablement diminué en 2008, passant de 37 milliards d'USD au premier trimestre à 9 milliards d'USD au second, pour atteindre 8 milliards d'USD au troisième trimestre. Au cours du troisième trimestre, 7 transactions de fonds souverains concernaient l'Amérique du Nord, pour un montant total de 2,4 milliards d'USD. En revanche, au premier trimestre 2008, 7 transactions nord-américaines atteignaient un total de 23 milliards d'USD. Les investissements dans le secteur financier ont considérablement chuté depuis le premier trimestre; les investissements immobiliers, qui ont énormément baissé au deuxième trimestre, ont également considérablement chuté au troisième trimestre. Les investissements financiers représentaient 43,4 milliards d'USD au premier trimestre, contre 4 milliards d'USD au second et un chiffre identique au troisième trimestre. Les transactions immobilières atteignaient 3,2 milliards d'USD au troisième trimestre (16% du total), contre 13,7 milliards d'USD (52% du total) au second trimestre 2008. Les fonds souverains de la région MENA se sont avérés être les plus actifs au troisième trimestre, avec environ 90% de la valeur totale des transactions. Les fonds souverains asiatiques étaient bien moins attractifs au troisième trimestre 2008 qu'au cours des trimestres précédents. Un tel retournement serait notamment le fait des fonds qui se sont très diversifiés, au-delà de la sécurité des emprunts d'Etat, pour accroître leurs rendements avant que la crise financière ne frappe. Deux années de crise amènent en effet les fortunes qui ont contribué à créer ce segment de 3.000 milliards de dollars du marché financier, à réfléchir à leur stratégie. Une bonne partie de ces fonds sont basés dans les pays pétroliers, mais ces derniers sont confrontés à un baril de brut qui a perdu plus de 100 dollars depuis juillet. Certains estiment qu'avec un baril de brut à moins de 50 dollars, les besoins budgétaires des économies du Golfe ne peuvent plus être couverts, et dans ces conditions, il est hors de question de transférer des excédents à ces fonds souverains. "Les fonds souverains subissent de grosses pertes et ils ont beaucoup moins dans leurs coffres. Leurs actifs étaient orientés vers la croissance mondiale et ils ont ignoré la fonction stabilisatrice des actifs liquides", commente Brad Setser, du Conseil des relations étrangères, un "think tank" américain. "Ils comptent énormément sur les actifs étrangers pour couvrir des besoins intérieurs et soutenir les marchés de valeurs locaux. Mais le modèle a changé: le Golfe, qui achetait auparavant le reste du monde, devient vendeur net.... Ces fonds vont vendre les actifs étrangers illiquides". Selon lui, le prix d'équilibre du baril de brut, permettant de couvrir des besoins budgétaires locaux grandissants, dépasse les 50 dollars alors qu'il était autour de 20 dollars durant la période 2000 à 2002. Ces fonds souverains, qui jouissaient de rendements de l'ordre de 10% avant la crise, subissent également des pertes à deux chiffres après la crise, en prenant pour base de répartition des actifs en portefeuille, 60% d'actions, 20% de fonds d'Etat et 20% de divers, explique Setser. Morgan Stanley estime que certains fonds souverains ont pu subir des pertes de 25% depuis le début de l'année. Le fonds qui s'est vraisemblablement le plus diversifié est l'Abu Dhabi Investment Authority (ADIA), considéré comme le plus important et aussi le plus actif d'entre eux. Setser évalue à 150 milliards de dollars au plus la perte potentielle de ce fonds, en regard d'un actif de 500 milliards de dollars. Dans le nouveau contexte économique du moment, les fonds pourraient donc être moins fascinés par les rendements et se muer en acteurs actifs de soutien aux économies locales. La chose en soi n'est pas nouvelle pour les fonds du Golfe ou d'Asie, à la différence du modèle suivi par des pays comme la Russie ou la Norvège où la priorité est donnée à des portefeuilles à dominante étrangère visant des rendements sur le long terme. La Russie pourrait changer de style et suivre la manière du Golfe, mais pas la Norvège qui dispose déjà d'un système bancaire et financier bien développé, de l'avis des analystes. Isma B.

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