Les bons du Trésor américain seraient-ils devenus des actifs risqués ? Il semblerait que la réponse soit oui. En effet, le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, a annoncé, mardi dernier, que la Fed envisage d'accroître sa capacité d'échange de bons du Trésor contre des produits obligataires dépréciés et ce afin de trouver les fonds nécessaires pour continuer de nettoyer le bilan des établissements financiers des actifs "toxiques". Néanmoins, selon Philippe Béchade, membre de la fondation Agora et spécialiste des marchés, "plus la Fed engrange des positions de moindre qualité (même si elle s'en défend), plus l'avantage des T-Bonds - en termes de sécurité - se réduit par rapport aux emprunts émis par des entreprises disposant d'un bon matelas de cash et de revenus récurrents". Celui-ci va plus loin en prévoyant une nouvelle bulle qui risque de toucher les bons du Trésor US. Ainsi, estime-t-il, les investisseurs qui cherchent refuge dans les bons du Trésor US pour se prémunir des risques, ne font qu'accélérer le transfert du bilan des banques du secteur privé vers celui du prêteur en dernier ressort : la Fed. M. Béchade indique également que les Etats-Unis vont faire délibérément exploser leur déficit budgétaire en 2009. Ce qui se répercutera sur le dollar. Pour l'expert, la création monétaire ex-nihilo est galopante et la baisse de la qualité de la devise se traduit par une baisse simultanée de la rémunération. Pour lui, faire des placements dans les bons du Trésor US s'apparenterait à épargner plus pour gagner moins. En tout état de cause, de telles révélations sont susceptibles de réanimer le débat à propos de la gestion de nos réserves de change. N'oublions pas que l'Algérie a déposé plus de 43 milliards de dollars en bons de Trésor américain et une bonne partie de ses réserves de change est libellée en dollars. Il est vrai que de nombreux experts s'étaient interrogés du bénéfice que l'Algérie pourrait tirer des ces placements en temps de crise. Pour le docteur Abderrahmane Mebtoul il n'est donc pas exclu qu'une chute du dollar américain entraînera une vente massive des bons du Trésor US et le risque d'une forte dépréciation de la monnaie américaine qui représente actuellement plus de 60% des transactions mondiales avec un écroulement de leur rendement. Par ailleurs, M. Mebtoul se dit sceptique quant aux déclarations du gouverneur de la Banque d'Algérie, lequel affirme que le rendement de ces réserves est de l'ordre de plus de 4%, ramenant presque 5 milliards de dollars d'intérêts. En effet, M. Mebtoul estime la chose impossible dès lors que les taux intérêts ne peuvent être supérieurs au taux d'intérêt directeur des Banques centrales lesquels sont inférieurs à 2% pour les USA, 3% en Europe et presque nul au Japon (0,5% ramenés à 0,3% depuis fin novembre 2008). Un avis partagé par l'ex-ministre des finances, Abdelkrim Harchaoui, qui a estimé, hier, en marge d'un séminaire consacré à la crise financière et à son impact sur l'Algérie, que la faiblesse des taux d'intérêt directeurs imposés par les différentes Banques centrales en Europe et aux Etats-Unis devrait nous pousser à initier la réflexion sur la politique monétaire à adopter en ces temps de crise. Samira G.