Barack Obama effectue la semaine prochaine à Londres ses débuts sur la scène internationale à l'occasion du sommet du G20 consacré à la relance de la croissance mondiale et à une réforme du système financier. La popularité du président américain, qui a succédé à George Bush le 20 janvier, devrait lui garantir un accueil chaleureux de ses pairs européens; il est tout sauf certain qu'il en ira de même pour ses remèdes à la crise mondiale. Les Européens, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy en tête, ont clairement indiqué qu'ils ne laisseraient pas filer leurs déficits et ne céderaient pas aux appels de Washington en faveur de plans de relance additionnel. Ils devraient insister en revanche pour un renforcement des règles encadrant la finance mondiale. La Chine a évoqué pour sa part une possible alternative au statut de monnaie de réserve mondiale dont bénéficie le dollar, signe d'un recul de la confiance dans le leadership économique des Etats-Unis. "Les Etats-Unis ont été le champion d'une économie libérale mondialisée, et ce système est aujourd'hui menacé sur plusieurs fronts", note Reginald Dale, du Center for Strategic and International Studies. "Il appartient donc vraiment au président Obama d'intervenir et de confirmer que les Etats-Unis sont toujours le gardien du système mondial", ajoute-t-il. L'administration Obama présente son plan de relance de 787 milliards de dollars - 5,5% du PIB américain - comme un modèle dont les autres pays devraient s'inspirer pour contrer la plus grave récession économique qu'ait subie la planète depuis la Deuxième Guerre mondiale. "Personne ne peut nier qu'une action urgente doit être entreprise", écrit Obama dans une tribune publiée cette semaine par une trentaine de journaux à travers la planète. Le président américain ajoute qu'il est de la responsabilité des leaders du G20 qui se réuniront le 2 avril à Londres de prendre "des mesures audacieuses, ambitieuses et coordonnées" à même de redresser l'économie mondiale et de procéder à une "réforme en profondeur de nos dispositifs de régulation et de supervision" pour éviter qu'une telle crise ne se reproduise. La Grande-Bretagne, parmi les nations les plus durement éprouvées par la crise, est sur la même ligne que Washington. Le président français, Nicolas Sarkozy, et la chancelière allemande, Angela Merkel, soutiennent pour leur part que de nouvelles dépenses ne sauveraient pas l'économie mondiale et risqueraient en revanche de produire des déficits insoutenables. Pour eux, l'accent doit être mis sur le renforcement des règles encadrant la finance, estimant que c'est l'insuffisance ou l'absence de contrôle qui a précipité la crise actuelle. Le renforcement des ressources du Fonds monétaire international pourrait en revanche faire l'unanimité. Pour certains analystes, l'administration Obama redoute une aggravation des déséquilibres de l'économie mondiale si le plan de relance permet à l'économie américaine de se redresser tandis que les autres pays continueraient de s'enfoncer dans la récession. Un tel scénario aboutirait à une reprise déséquilibrée de la consommation des ménages américains. Les observateurs s'attendent cependant à que les dirigeants du G20 minimisent leurs divergences sur la question des plans de relance additionnels. Obama, après huit années de présidence Bush, jouit d'une popularité très élevée en Europe, il serait sans doute politiquement peu judicieux pour les chefs d'Etat et de gouvernement du Vieux Continent de laisser transparaître des tensions. "Tout est si soigneusement chorégraphié à l'avance que s'il devait y avoir un accord sur la question des plans de relance, on l'aurait déjà vu venir", estime Simon Johnson, ancien économiste en chef du FMI. Le sommet de Londres pourrait en revanche aboutir sur la question de l'encadrement et du contrôle sur les établissements financiers. "Du moins au niveau rhétorique", précise-t-il. "Les Américains sont devenus plus favorables à la régulation, même si c'est très récent." Jeudi, le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner a exposé une vaste réforme des règles encadrant Wall Street afin d'en finir avec les pratiques qui ont conduit à la plus grave crise du crédit depuis les années 1930. Autorité unique de régulation chargée d'identifier les risques qui pourraient menacer l'ensemble du système financier; contrôle sur les fonds spéculatifs (hedge funds) et les fonds de capital-investissement: l'architecture générale de cette réforme est conforme à ce que l'Union européenne devrait proposer à Londres.