Attendre encore un peu. Mais pas trop, pour ne fâcher personne. Au lendemain de son inscription sur la "liste grise" des paradis fiscaux par l'OCDE, la Confédération helvétique fait le dos rond. Convaincue d'avoir échappé au pire, mais pas sûre que le sursis sera très long : l'examen de passage suivant aura lieu au prochain G20, à New York en septembre. Si aucun délai n'a été donné à la Suisse pour se conformer aux standards de l'OCDE en matière de coopération administrative dans le domaine fiscal, "elle ne va pas traîner les pieds", a dit jeudi Roland Meier, le porte-parole du ministère des Finances. Le président en exercice de la Confédération, Hans-Rudolf Merz, a toutefois précisé que "renégocier tous les accords de double imposition d'ici à l'automne n'est pas faisable. Il faut en outre préciser dans quel cas l'échange d'informations sera possible". En présentant le mois dernier l'assouplissement de son secret bancaire, la Suisse avait parlé d'un échange d'informations "en cas de soupçons concrets et fondés". Selon Merz, les premières négociations sur le renouvellement des accords de double imposition débuteront peut-être "dans les prochains jours". Et les Etats du G20 devront montrer de la compréhension "pour les lenteurs inhérentes à la démocratie directe suisse." "Nous aurons besoin de temps, notamment parce que l'UDC [parti de droite dure, nationaliste, ndlr] a déjà annoncé qu'il lancerait des référendums contre les nouveaux accords de double imposition." En abandonnant en mars la distinction spécieuse entre évasion et fraude fiscale, la Suisse a échappé à la liste noire des pays considérés comme non coopératifs. Mais la liste grise n'est qu'un moindre mal. Directeur de l'association suisse des banquiers privés, Michel Dérobert juge l'inscription de son pays sur cette liste comme "une démarche formaliste". Selon lui, les juridictions qui y ont échappé sont "celles qui ont signé assez d'accords d'échange d'informations". Or, "s'il est facile à un petit territoire de signer au bas d'un document préétabli, de grands Etats comme la Suisse ne peuvent pas se le permettre".