Cupidité des investisseurs, croyance aveugle dans le marché, la démission du politique qui n'a pas su réglementer… autant de maux qui sont à l'origine de la crise selon la Cnuced. Une réforme basée sur de nouvelles réglementations et un multilatéralisme au niveau mondial, telles sont les réponses adaptées selon l'Onu." L'économie mondiale n'a pas encore touché le fond de la crise ", dans un rapport rendu public en fin de semaine, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) s'est montrée très pessimiste. Avec, " La crise économique mondiale : défaillances systématiques et mesures correctives multilatérales ", l'Institution internationale a frappé du poing sur la table, alors qu'à Londres se tenait le sommet du G20 dont les conclusions ne répondent qu'en partie aux exigences posées par l'Onu.Supachai Panitchpakdi, le secrétaire général de la Cnuced, n'y est pas allé par quatre chemins, estimant que la crise n'aurait pu se produire "sans la coïncidence exceptionnelle de plusieurs défaillances des marchés et facteurs de déclenchement, dont certains traduisent des déséquilibres fondamentaux de l'économie mondiale et d'autres étaient beaucoup plus favorables qu'aujourd'hui", la Cnuced a souligné "la nécessité d'une cohérence systématique" a poursuivi son secrétaire général. Il a rappelé aussi avoir "mis en lumière les lacunes du système économique international et contesté la théorie économique ambiante qui justifiait une libéralisation financière sans la mise en place d'un cadre réglementaire mondial bien défini". Bref, c'est à bien plus qu'une simple "moralisation" du capitalisme qu'appelle la conférence. Ses principaux griefs résident tout d'abord dans le fait que "le dogme du laisser-faire qui a été appliqué au cours des vingt dernières années a échoué de manière spectaculaire". En conséquence, les experts du groupe d'économistes de la Cnuced mis en place pour "examiner les dimensions systématiques de la crise et de réglementation son objectif doit être d'éliminer systématiquement les pratiques financières complexes et dépourvues de rendement social". Autre dogme mis à mal, "la confiance aveugle dans l'efficacité des marchés financiers déréglementés et l'absence de système financier et monétaire fondé sur la coopération". La solution serait "une réforme et une re-réglementatrion globales dans le cadre desquelles les gouvernements joueraient un rôle énergique et œuvreraient de concert", car selon les économistes "contrairement aux idées reçues les gouvernements sont bien placés" pour agir. La Cnuced a également dénoncé "le rôle et le poids de puissants investisseurs financiers" accusés de la hausse des prix des produits de base et de la création de bulles spéculatives qui ont "éclaté après la crise des crédits hypothécaires à risque". Là encore, la conférence estime qu'il faut réglementer les marchés afin d'éviter toute "spéculation excessive". En cause aussi "l'absence de système international gérant de manière concertée les fluctuations de taux de change" ; elle a favorisé une spéculation endémique sur les monnaies et a accru les déséquilibres mondiaux.Les économistes auteurs du rapport estiment que "sans la cupidité de trop nombreux acteurs s'efforçant de tirer des rendements à deux chiffres d'un système économique dont le taux de croissance n'atteint qu'un chiffre, la crise n'aurait pas éclaté avec autant de brutalité. De bonnes politiques auraient dû anticiper le fait que les hommes peuvent être cupides et raisonner à courte vue".En conclusion, la Cnuced avance l'idée qu'il faut aller au-delà de la réglementation bancaire et financière en posant fondamentalement la question des moyens de relancer et de développer le multilatéralisme dans le cadre de la mondialisation, l'Onu étant appelée à jouer un rôle central en guidant ce processus de réforme. Pas sûr que les décisions de Londres, présentées comme l'avènement d'un nouvel ordre mondial, y suffisent. Ahmed Saber