Le contrôle se fait plus serré sur le système bancaire algérien. Il faut dire que si l'Algérie a pu se prémunir des effets de contagion de la crise des subprimes, rien n'indique que tout risque est écarté. Dans ce sens, les autorités monétaires multiplient les mesures afin de garantir la solidité des établissements financiers activant sur le marché algérien. C'est dans cette optique que le gouverneur de la Banque d'Algérie, M. Mohamed Laksaci, a annoncé, hier la prochaine mise en place d'un nouveau système de surveillance de la solvabilité des banques opérant en Algérie. M. Laksaci a fait savoir, dans un entretien qu'il a accordé l'APS, qu'un nouveau système de "rating" des établissements bancaires sera mis en place au second semestre 2009. Et de préciser qu'il ne s'agira pas d'attribuer des notes aux banques mais d'évaluer leur solvabilité : "le renforcement de la régulation du système financier émergeant comme une priorité au niveau mondial". Ce système de rating s'ajoutera à l'affinement des "stress test" au cours du premier semestre 2009, ajoute-t-il. Les "stress test" sont des opérations de simulation qui permettent de mesurer les capacités des banques à résister à d'éventuels chocs, explique-t-on. Aussi, la Banque d'Algérie "suivra de près l'évolution des risques, notamment la concentration des crédits, pour s'assurer du développement de crédits sains à l'économie", prévient Laksaci. Il est donc clair que cette mesure devrait beaucoup plus concerner les banques étrangères installées en Algérie, dans la mesure où il est établi que les banques publiques disposent de surliquidités bancaires dépassant les 20 milliards d'euros. De leur côté, plusieurs banques internationales ont été lourdement touchées par la crise et ont enregistré des pertes considérables via l'acquisition d'actifs toxiques. Il s'agit donc pour la Banque centrale d'assurer la solidité des filiales de ces mêmes banques installées en Algérie, à l'image de BNP Paribas, Société Générale, Natixis, Citibank ou encore HSBC. Ainsi, la décision de contrôler la solvabilité des banques s'inscrit dans le même sillage que celle prise par la Banque d'Algérie au mois de décembre dernier afin de quadrupler le capital minimum à l'agrément des banques et des établissements financiers. Ainsi, le capital minimum des banques et des succursales de banques passe de 2,5 milliards à 10 milliards DA (100 millions d'euros), tandis que le capital minimum des établissements financiers et des succursales d'établissements financiers passe de 500 millions de dinars à 3,5 milliards de dinars. Cette mesure a pour objectif de protéger les épargnants, tout en permettant aux banques étrangères, notamment, de participer au financement de l'économie. Il faut dire que les pouvoirs publics ont souvent reproché à ces dernières de ne pas assez s'investir dans le développement de l'investissement et de se contenter le plus souvent d'opérations de commerce extérieur et de crédits à la consommation. D'autant plus que plusieurs opérateurs se sont plaints de la difficulté d'accéder aux crédits, alors que les liquidités existent. A ce propos, M. Laksaci a estimé que le niveau des liquidités des banques à fin mars 2009 permet de soutenir la "poursuite de l'expansion des crédits à l'économie, notamment pour le financement des investissements productifs". Pour le gouverneur de la Banque d'Algérie, il s'agit "de continuer à gérer au mieux cette période de crise économique et financière internationale, tout en continuant à mettre en place les conditions nécessaires pour davantage de diversification de l'économie nationale, capitalisant sur les acquis de la stabilité macroéconomique". De bonnes performances macro-économiques Dans ce sens, il rappelle qu'au cours des deux dernières années, caractérisées par la crise financière internationale, "l'Algérie a poursuivi ses bonnes performances économiques". Il a indiqué, dans ce sens, que la balance des paiements globale de l'Algérie "pourrait être en équilibre" cette année en dépit de la chute des prix des hydrocarbures. "Concernant la conjoncture, l'économie algérienne subit le choc externe inhérent à la chute des prix des hydrocarbures. Ce canal de transmission des effets de la récession mondial est apparu à partir du 4e trimestre 2008. Cela affecte négativement la balance des paiements courants, mais la balance des paiements globale pourrait être en équilibre cette année", affirme le gouverneur de la Banque centrale. Avançant que l'équilibre de la balance des capitaux atteint en 2007-2008 sera préservé en 2009, M. Laksaci soutient que cela constituera une performance très appréciable dans le contexte actuel de grave crise financière où un nombre croissant de pays émergents et en développement ont d'importants besoins de financements extérieurs, créés et alimentés par la situation de "sudden stop", c'est-à-dire le choc soudain provenant de la nette détérioration de la situation des banques internationales et des marchés financiers. "Il importe de souligner que l'Algérie est citée par le FMI parmi un nombre limité de pays émergents et en développement à faible vulnérabilité", rappelle le gouverneur de la Banque centrale, qui a également indiqué que la croissance hors-hydrocarbures, tirée par le programme d'investissements publics, s'est située au dessus de 6%, l'inflation est restée sous contrôle (en moyenne 3,5% en 2007 et 4,4% en 2008) en contexte d'excès structurel de liquidités, alors que l'excédent du compte courant extérieur a dépassé 21% par rapport au PIB, et le Trésor a accumulé davantage de ressources au niveau du FRR. Aussi, "sachant l'importance des ressources du Fonds de régulation des recettes qui contribue à la poursuite du programme d'investissements publics, c'est-à-dire l'effort soutenu d'investissement de l'Etat, la bonne performance des secteurs hors hydrocarbures est appelée à se poursuivre. C'est l'ancrage pour la nécessaire diversification de l'économie nationale". Gestion prudente des réserves de change Aussi, et en dépit de l'envolée des importations des biens et services, M. Laksaci fait savoir qu'il a été enregistré, à la fin 2008, une accumulation et un niveau record des réserves officielles de change, ainsi qu'un niveau très bas de la dette extérieure (2,5% du PIB) et de faible ratio de service de la dette extérieure (1% des exportations de biens et services). Pour le gouverneur de la Banque centrale, ''cela témoigne clairement de la viabilité à moyen terme de la position financière extérieure nette de l'Algérie". En tout état de cause, crise ou pas, la Banque d'Algérie poursuivra la gestion prudente des réserves de change. M. Laksaci avouera, néanmoins, que le rendement de ces réserves "subira l'effet du niveau historiquement bas des taux d'intérêt lié à la persistance de la grave crise financière internationale". Isma B.