Dans son discours du Caire, délivré jeudi dans l'amphithéâtre de la plus grande université égyptienne, Barack Obama, a plaidé pour un nouveau départ dans les relations entre les Etats-Unis et le milliard de musulmans à travers le monde. Voulant tourner la page des années Bush, marquées par les guerres en Afghanistan, en Irak et les tensions avec l'Iran, le président américain a affirmé que les relations entre Washington et les pays musulmans devaient être fondées sur le respect et l'intérêt mutuels, non sur la confrontation. L'islam, a-t-il ajouté, a son rôle à jouer dans le monde pour combattre l'extrémisme et favoriser les efforts en faveur de la paix. “Les extrémistes ont exploité les tensions” entre l'Ouest et l'islam, et ont trouvé un écho chez une “petite mais puissante minorité de musulmans”, a-t-il déploré. “Nous nous rencontrons à un moment de tension entre les Etats-Unis et les musulmans à travers le monde - une tension qui a des racines historiques qui remontent plus loin que le débat politique actuel”, a-t-il dit. “Je suis venu ici pour rechercher un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans du monde entier, fondé sur l'intérêt commun et le respect mutuel”, a ajouté Barack Obama. “L'Amérique et l'islam ne doivent pas s'exclure, ne doivent pas être en compétition (...) Le cycle du soupçon et de la discorde doit prendre fin.” Evoquant la situation en Cisjordanie, il a redit son opposition aux colonies juives et son engagement en faveur de la création d'un Etat palestinien aux côtés d'Israël. La solution à deux Etats, a-t-il dit, “est dans l'intérêt d'Israël, dans l'intérêt de la Palestine, dans l'intérêt de l'Amérique, dans l'intérêt du monde entier”. “C'est pourquoi j'ai l'intention de poursuivre personnellement cet objectif, avec toute la patience que cette tâche exige.” Pour ce qui est de l'Irak et de l'Afghanistan, a-t-il souligné, le but n'est pas d'y maintenir indéfiniment des troupes américaines. Il s'est notamment fixé pour objectif de “laisser l'Irak aux Irakiens”. Le président américain a estimé qu'une course aux armements nucléaires au Proche-Orient entraînerait la région dans “une voie extrêmement dangereuse”, tout en reconnaissant le droit de l'Iran à se doter du nucléaire civil “s'il assume ses responsabilités dans le cadre du traité de non-prolifération nucléaire”. Sur la question des droits de l'homme et de la démocratie dans le monde arabe, que de nombreux militants souhaitaient voir abordée dans ce discours, Barack Obama ne s'est guère étendu. Son discours d'environ une heure a été plusieurs fois interrompu par des applaudissements nourris et les cris de “nous vous aimons !”. Le monde salue le discours d'Obama Des dirigeants arabes et occidentaux ont salué le discours du président américain prononcé jeudi au Caire, y voyant une nouvelle ère qui va s'ouvrir dans les relations entre l'Occident et le Monde musulman. A New York, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon a “espéré que le message du président Obama permettra l'ouverture d'un nouveau chapitre dans les relations entre les Etats-Unis et le monde musulman”. L'Organisation de la Conférence islamique (OCI) a estimé de son côté que l'intervention du président américain aura des “implications positives” dans le Monde musulman qui suivra comment Washington va donner suite à cette déclaration de bonne volonté. L'Autorité palestinienne, la principale concernée par le discours du locataire de la Maison Blanche, a qualifié l'intervention de Obama de “claire et franche”. Elle a estimé que Obama avait rompu dans son discours avec la précédente politique américaine partiale en faveur d'Israël, expliquant que ses propos sur la situation palestinienne intolérable sont un message qu'Israël doit bien comprendre. Le mouvement de résistance palestinien Hamas a abondé dans le même sens lorsque son porte-parole, Fawzi Barhoum, a déclaré que le discours de Obama reflète un changement tangible. Pour sa part, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a qualifié le discours du 44e président des Etats-Unis d'équilibré, de respectable et de fondateur d'une relation positive avec le monde arabo-musulman. Le secrétaire général adjoint de la Ligue arabe chargé des affaires palestiniennes, Mohamed Sebih, a, lui, jugé le discours du président Obama de “positif” et “réconciliateur” car évoquant clairement la question palestinienne, notamment la solution de deux Etats. A Amman, le porte-parole du gouvernement jordanien, Nabil Ech-charrif, a estimé que ce discours “ouvre la voie à une nouvelle phase dans les relations des Etats-Unis avec le monde arabo-musulman”. L'Europe a aussi salué le discours du locataire de la Maison Blanche, dont la portée symbolique mais aussi politique est majeure. Pour le Haut représentant de l'Union européenne (UE) chargé de la politique commune des Affaires étrangères et de la Sécurité, Javier Solana, l'intervention d'Obama va “sans doute” ouvrir “une nouvelle page” dans les relations entre l'Occident et le monde arabo-musulman. Le président du Parlement européen, Hans-Gert Pottering, a, lui, salué le courage dont a fait preuve le président américain lorsqu'il a clairement appelé à la fin de la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens occupés. L'Allemagne, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a vu dans ce discours “une offre substantielle pour un dialogue entre l'Occident et le Monde musulman”, alors que la France y a décelé une déclaration “majeure” tant du point de vue “symbolique” que “politique”. Quant au chef de l'Etat turc Abdullah Gül, il a estimé que le président américain a montré une nouvelle fois par le discours “sincère, honnête et réaliste” qu'il a prononcé, qu'il est un dirigeant “constructif” avec qui les peuples musulmans peuvent s'engager dans un partenariat pour la paix. L'Espagne, par le biais de son chef du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero et son chef de la diplomatie Miguel Angel Moratinos, a également salué l'intervention de Obama. Le premier a remercié le président américain pour avoir évoqué en termes élogieux le projet de l'Alliance des civilisations, tandis que le second a salué un discours d'”une énorme importance” qui marque une “rupture”. La société civile n'est pas en reste, puisque l'Organisation islamique pour l'éducation, les sciences et la culture (Isesco) qui fédère 57 Etats musulmans, a estimé qu'Obama a ouvert les portes “de l'espoir” d'une nouvelle vision des relations entre l'Occident et le monde musulman. A Al-Qods occupée, le mouvement israélien anti-colonisation “La Paix maintenant” a exhorté Israël à stopper la construction de colonies et faire progresser la vision de deux Etats palestinien et israélien vivant côte à côte dans la paix. Adnane Cherih