La situation du marché pétrolier est des plus paradoxales. Alors que la demande pétrolière enregistre une baisse historique, les cours du baril se consolident et touchent un nouveau plus haut depuis de nombreux mois. Selon le rapport annuel sur l'énergie du groupe pétrolier britannique BP, la consommation mondiale de pétrole a baissé de 0,6% en 2008, le premier déclin depuis 1993 et le plus fort depuis 1982, et la production a augmenté de 0,4% à 81,8 millions de barils par jour (mbj). BP a souligné dans ce rapport le net glissement dans la demande entre pays développés et pays émergents de plus en plus gourmands. Les réserves ont diminué de 3 milliards de barils à 1.258 milliards de barils, hors sables canadiens, ce qui les rend suffisantes pour une consommation au niveau actuel pendant 42 ans. Des baisses en Russie, Norvège, Chine notamment n'ont pas été entièrement compensées par des hausses au Vietnam, en Inde et en Egypte. La consommation, lors de cette année de début de récession mondiale, a baissé de 420.000 barils par jour dans le monde. C'est dû principalement à une chute de 1,5 million de barils par jour dans les pays de l'OCDE, à cause en particulier d'une baisse de près de 1,3 million de barils par jour aux Etats-Unis. La Chine, en revanche, a de nouveau enregistré la plus forte hausse, 260.000 barils par jour. La croissance de la consommation a par ailleurs été supérieure à la moyenne des dix dernières années dans les régions exportatrices du Moyen-Orient, d'Amérique centrale et du Sud et d'Afrique notamment. La production a augmenté de 380.000 barils par jour. La production de l'Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) a augmenté de 990 000 barils par jour malgré les baisses de production instituées en fin d'année. La plus forte hausse est venue de l'Arabie saoudite, avec une production en hausse de 400.000 barils par jour. La production russe en revanche a baissé de 90.000 barils par jour, la première baisse depuis 1998. La production OCDE a baissé de 750.000 barils par jour, la plus forte baisse venant du Mexique (chute de 310.000 barils par jour). Tous combustibles réunis (avec le gaz et le charbon), la consommation d'énergie a augmenté de 1,4% dans le monde en 2008, ce qui est la plus faible hausse depuis 2001. La Chine seule a compté pour les trois quarts de la hausse, le reste venant de la région Asie-Pacifique en général. Dans le monde développé, au contraire, la consommation a baissé de 1,3%, la demande américaine baissant notamment de 2,8%. Dans ce contexte, Tony Hayward, le directeur général de BP, a estimé qu'il était "raisonnable" de penser que le prix du baril de pétrole se situerait entre 60 et 90 dollars dans les années à venir.En particulier, M. Hayward a noté que les pays de l'Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) avaient besoin d'un baril à 60-70 dollars pour continuer à investir dans le secteur tout en ayant les moyens de financer leurs programmes sociaux. Sur les marchés, les cours du pétrole ont touché de nouveaux plus hauts au-dessus de 71 dollars le baril hier en début d'échanges européens, leur meilleur niveau en 8 mois, poussés par le recul du dollar sur le marché des changes et des craintes sur la production au Nigeria. Vers 10H00 GMT (12H00 à Paris), le Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet gagnait 1,01 dollar par rapport à la clôture de la veille, à 70,63 dollars le baril. A New York, le baril de "light sweet crude" pour la même échéance prenait 1,13 dollar, à 71,14 dollars. Il a atteint 71,65 dollars, niveau plus atteint depuis octobre, quand le dollar avait plongé après avoir atteint 147 dollars le baril en juillet. Le Brent a pour sa part touché un plus haut depuis la même date, à 71 dollars exactement le baril. Samira G.