La présidente Cristina Fernandez a subi un cuisant revers aux élections législatives de mi-mandat dimanche en Argentine, où elle a perdu le contrôle de la Chambre des députés. Cet échec du centre gauche accroît l'incertitude sur l'avenir politique du pays, la troisième économie d'Amérique latine, et devrait ouvrir la voie à une lutte pour le pouvoir au sein du Parti péroniste. Selon les résultats provisoires, les alliés de la présidente ont perdu trop de sièges - une douzaine - à la Chambre des députés pour y conserver la majorité. La présidente risque aussi de perdre sa majorité au Sénat, où la lutte est très serrée, selon les résultats préliminaires. L'ancien chef de l'Etat Nestor Kirchner, mari de Cristina Fernandez, est notamment devancé dans la province clé de Buenos Aires, qui était pourtant la base électorale du couple. Dans cette province, les candidats conduits par le richissime homme d'affaires Francisco de Narvaez l'emportent sur ceux de Kirchner. En raison du mode de scrutin de liste à la proportionnelle, ce dernier s'assure toutefois un siège au Congrès. "C'est un résultat stupéfiant", a dit Federico Thomsen, expert de la vie politique et économique argentine. "Kirchner s'est donné à fond dans cette élection, il s'est mis en première ligne et pourtant cela n'a pas suffi." Après dépouillement des voix dans 87% des bureaux de vote dans cette province de Buenos Aires, Kirchner a admis sa défaite face à Narvaez, un parlementaire de centre droit âgé de 55 ans. Tous deux appartiennent à des courants rivaux du Parti péroniste. Autre déception pour Kirchner, les candidats soutenus par le gouvernement n'arrivent qu'en deuxième position dans sa province d'origine, celle de Santa Cruz. Echec également dans les régions rurales comme celles de Cordoba et de Santa Fe - l'an dernier, la présidente a dû affronter le puissant secteur agricole qui protestait contre sa volonté d'augmenter les taxes sur le soja. "A la fin de cette nuit, le triomphe nous attend", a lancé Narvaez à ses partisans dimanche soir à son quartier général de campagne. Narvaez, qui possède notamment une chaîne de télévision, a dépensé des millions de dollars dans cette campagne, bien décidé à "faire mordre la poussière aux Kirchner". "Ceux-ci ont toujours l'air en colère et sont trop autoritaires. Pour eux, si vous n'êtes pas avec eux, vous êtes contre eux", affirme Violeta Canosa, une ménagère de 48 ans qui a apporté sa voix à Narvaez. Moins de deux ans après avoir succédé à son mari à la tête du pays, Cristina Fernandez apparaît très affaiblie dans un contexte de forte détérioration économique. Ce scrutin était présenté comme un référendum sur la gestion du couple présidentiel, qui domine la vie politique argentine depuis six ans. Les Argentins devaient renouveler la moitié des 257 sièges de la Chambre des députés et le tiers des 72 sièges du Sénat. La province de Buenos Aires, où vivent 38% des Argentins, était décisive, avec 35 sièges de la Chambre des députés en jeu dans ce seul district. Nestor Kirchner s'y présentait avec l'objectif de renforcer le gouvernement de sa femme et, le cas échéant, se placer en vue de l'élection présidentielle de 2011. Les sondages ont montré que les principales préoccupations des Argentins étaient la criminalité et l'inflation. L'échec de Cristina Fernandez à contenir la hausse des prix apparaît comme l'une des principales raisons de la baisse de sa popularité. Les mesures de lutte contre le chômage n'ont pas non plus convaincu les Argentins, sur fond de ralentissement économique. De plus, au cours des six années passées au pouvoir, le style offensif des époux Kirchner, régulièrement en conflit avec des dirigeants économiques, a apparemment lassé les Argentins. Lors de la campagne électorale, Nestor Kirchner n'a pas hésité à brandir la menace d'un retour au marasme économique et à la crise politique de 2001-2002.