La majorité des femmes entrepreneuses algériennes ont créé leurs entreprises plus pour réaliser leur émancipation propre que pour la performance de ces dernières, ont estimé, lundi à Alger, des intervenants au colloque international sur les femmes africaines à l'épreuve du développement. "Les femmes algériennes vont vers la création d'entreprises plus pour réaliser leur émancipation propre que la performance de leur entreprise", gérant de ce fait leur capital social entrepreneurial de manière singulière, a relevé El-Kaina Ouchalal, chercheuse au Centre d'étude et de recherche appliquée en développement (CREAD), à Alger. “Ainsi, ces femmes, ne prenant pas en compte la compétence et la qualification recrutent notamment parmi les proches membres de la famille et amis", a relevé Mme Ouchalal dans sa communication sur le thème "Motivation réelle et capital social des femmes chefs d'entreprises algériennes". L'intervenante a indiqué aussi que les femmes entrepreneurs algériennes sont considérées comme étant de nouveaux acteurs dans la sphère économique algérienne. Elle a rappelé, à cet effet, que le nombre de ces femmes entrepreneuses ne cesse d'augmenter depuis la libéralisation de l'économie algérienne dans les années 1990. Mme Ouchalal a relevé que l'élément féminin dans le monde arabe "jouit d'un statut inférieur et que les femmes sont, en règle générale marginalisées dans la sphère publique". Elle en outre jugé que "cet entrepreneuriat peut être considéré comme un entreprenariat de minorités vu le nombre restreint de femmes concernées". D'autres intervenants ont indiqué que les entreprises créées par les femmes prennent souvent ancrage sur les réseaux de la famille patriarcale. "Ce sont très souvent les très proches parents qui fournissent les capitaux, le réseau d'amis dans l'administration, pour obtenir les documents nécessaires ainsi que les marchés", a-t-on expliqué, ajoutant que la femme créatrice d'entreprise met à la disposition de la fratrie son nom (prête-nom) et sa compétence quant à une formation répondant aux besoins de l'entreprise. Pour ces intervenants, "les liens du sang sont donc mis à contribution pour contourner les divers blocages bureaucratiques". "Si le réseau associatif commence à prendre en charge cet espace, il faut reconnaître qu'aujourd'hui la seule ONG véritablement efficace c'est la famille", a-t-on soutenu, estimant que "l'organisation patriarcale de la famille a d'une certaine façon squatté le secteur économique moderne". Le colloque international sur "Les femmes africaines à l'épreuve du développement", organisé dans le cadre du 2e Festival culturel panafricain (Panaf 2009), a pour but de trouver les "meilleures alternatives à mettre en œuvre pour promouvoir un développement social harmonieux dont les femmes sont parties prenantes à part égale avec les hommes". Cette rencontre de deux jours, qui a débuté dimanche, a également pour objectif d'échanger les expériences relatant les progrès réalisés par les femmes africaines dans divers domaines. Différents thèmes ont été abordés lors de ce séminaire dont, "Approches du genre en Afrique : la théorie et les pratiques du terrain", "Femmes, institutions politiques et mouvements associatifs" et "Accès aux ressources économiques, à l'éducation, à la production du savoir et aux ressources humaines". R.R.