Le problème de la qualification des ressources humaines et le développement de l'entreprise, en Algérie, ont été les points pivots évoqués par M. Abdelhak Lamiri, directeur de l'Institut de formation en gestion, INSIM, lors d'un entretien qu'a accordé au magazine "Jeune Afrique". Selon M. Lamiri, la gestion et le développement d'une économie moderne et solide doit se baser notamment sur l'encouragement de la ressource humaine, et la création des petites et moyennes entreprises. Il déplore, à cet effet, le fait que l'Algérie ait négligé ces deux aspects importants. Il dira, dans ce contexte, que les pays qui ont réussi leur transition économique sont ceux qui se sont dotés d'un " super-cerveau " pour concevoir une stratégie économique d'ensemble. C'est le cas de pays comme la Corée, la Chine, ou encore l'Inde. "En Algérie, nous avons des plans sectoriels et aucune institution capable de coordonner et de faire la synthèse de ces différents plans. On dit d'un côté que la PME est une priorité nationale, mais au niveau du ministère des Finances les arbitrages continuent de ne lui réserver que 5 à 10% des crédits" souligne-t-il, avant d'ajouter que "les centres de décision sont dispersés et nous ne sommes pas organisés pour être efficaces". Par ailleurs, les plans de relance conçus au cours des dernières années sont trop sommaires. Ils surdosent les investissements programmés dans les infrastructures. Simultanément, ils ont raté deux choses : la qualification des ressources humaines et le développement de l'entreprise. Concernant, les PME, M. Lamiri dira qu'il y a eu un retard considérable dans ce domaine, "on aurait pu créer un million de PME. En Algérie, nous créons chaque année 70 PME pour cent mille habitants, le Maroc ou la Tunisie en créent 350". L'Ansej (Agence nationale de soutien à l'emploi des jeunes) dont on parle beaucoup représente moins de 3% des crédits à l'économie. "Nous devons faire de cette question une véritable priorité nationale et mettre en place une nouvelle organisation, moderniser les instruments, créer partout des pépinières d'entreprises et mobiliser les acteurs financiers autours de la PME", a-t-il suggéré. L'orateur a souligné, en outre, que la faible qualification de nos ressources humaines est une contrainte majeure, elle est d'ailleurs dans certains cas à l'origine de la délocalisation de projets d'investissement. "Nos universités et nos centres de formation ne figurent nulle part dans les palmarès internationaux. Une étude récente classe les performances de notre système universitaire à la 38e place en Afrique". Selon lui, il faut commencer par mettre les moyens. Un professeur d'université algérien touche 7 à 800 euros contre 1200 euros en Mauritanie et 3000 euros au Maroc. Une stratégie de la qualité doit remplacer la stratégie de la quantité mise en œuvre depuis des années. Il vaut mieux 400 000 étudiants bien formés que 1,5 million mal formés qui vont devenir un problème social. "Nous devons encourager le développement du secteur privé. L'Algérie est un des derniers pays du monde où il n'existe pas d'université privée et les rares instituts existants sont taxés comme l'import-export. On doit financer des partenariats lourds avec de grandes universités étrangères pour qualifier nos formateurs et les doter d'une ingénierie pédagogique moderne" a-t-il souhaité. Interrogé, par ailleurs, sur les mesures de la LFC 2009, M. Lamiri estime que c'est le meilleur moyen de s'assurer que les investissements réalisés correspondent globalement aux intérêts de l'économie nationale. Concernant les banques publiques, qui ont été appelées récemment à créer des filiales spécialisées dans le capital investissement, il dira à ce sujet que c'est une bonne chose mais c'est insuffisant. D'après lui, il faut aller plus loin. " Nous avons besoin d'une réorientation vigoureuse de notre système financier. Dans tous les pays du monde les banques publiques doivent financer les activités stratégiques. Nos banques publiques doivent se transformer en banques d'investissement et laisser le financement du commerce extérieur aux banques privées" a-t-il préconisé. Samira H.