Le Chili a adhéré lundi à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), devenant ainsi, sauf improbable vote défavorable du Congrès, le deuxième membre latino-américain de cette organisation qui réunit désormais les 31 pays les plus riches du monde. Ce pays moteur de la croissance sud-américaine lors de la décennie écoulée était engagé dans des négociations d'adhésion depuis 2007 aux côtés de l'Estonie, de la Fédération de Russie, d'Israël et de la Slovénie. Il a reçu une invitation officielle à rejoindre l'OCDE le 15 décembre, 24 heures après que l'organisation l'eut retiré de la liste "grise" des paradis fiscaux. Son adhésion doit encore être ratifiée par le Congrès chilien, mais il s'agit d'une formalité, la majorité des partis politiques y étant favorables. "Avec le Chili, l'organisation devient plus inclusive et plurielle", a affirmé José Angel Gurria, secrétaire général de l'OCDE, lors de la signature de l'accord d'adhésion à Santiago. "En tant que pays sud-américain à revenu intermédiaire, nous apporterons une nouvelle perspective dans les débats que l'OCDE consacre au développement économique et social mondial", a déclaré Andres Velasco, ministre chilien des finances. "Nous souhaitons vivement faire partager notre expérience dans des domaines comme la réforme des retraites, la réglementation du secteur bancaire, la politique budgétaire contracyclique et l'égalité sociale", a-t-il ajouté. Au cours des deux années qu'ont duré les négociations en vue de l'adhésion, le Chili a dû se débarrasser de sa réputation de paradis fiscal. L'invitation à rejoindre le club des pays riches témoigne de la reconnaissance des efforts déployés par le gouvernement de centre gauche pour développer son économie de marché. L'entrée à l'OCDE est intervenue à la veille du second tour de l'élection présidentielle, dimanche 17 janvier, où le candidat de droite, Sebastian Piñera, est donné favori face à l'ancien président démocrate-chrétien Eduardo Frei (1994-2000), de la coalition de centre gauche qui gouverne depuis la fin de la dictature militaire du général Pinochet (1973-1990). Une victoire de M. Piñera marquerait le premier retour au pouvoir par les urnes de la droite depuis cinquante-deux ans. Le prochain président bénéficiera d'un scénario favorable avec un retour de la croissance depuis novembre 2009, après un an de récession. La croissance devrait atteindre 4,5 % en 2010, selon la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes (Cepal). Ce regain repose en partie sur l'activité minière, le cuivre notamment, dont le Chili est le premier exportateur mondial. Le cuivre représente plus de 50 % des exportations. Le géant public du cuivre, Codelco, avait affronté, début janvier, sa première grève depuis treize ans sur son site de Chuquicamata (1 650 km au nord de Santiago), la plus grande mine de métal rouge à ciel ouvert au monde. Les 56 000 salariés de la mine ont repris le travail, le 5 janvier, acceptant une hausse de salaire de 4 % et une prime de 24 000 dollars (16 500 euros) comme participation aux gains obtenus sur le marché mondial des métaux fin 2009, avec l'envolée des cours du cuivre. Pour la première fois depuis soixante-quatorze ans, le coût de la vie a baissé de 1,4 % en 2009. Le Chili avait enregistré une inflation de 7,1 % en 2008. L'économie n'a pas été un enjeu pendant la campagne électorale, les deux candidats garantissant le modèle économique libéral, à l'origine du "miracle chilien". Les politiques contracycliques adoptées par Mme Bachelet, avec une épargne et la constitution de réserves quand le cuivre était au plus haut, pour pouvoir déployer un filet de sécurité sociale en temps de crise, n'ont pas été remises en cause par la droite. M. Piñera a assuré que, s'il était élu, "il poursuivrait de nombreuses politiques de la présidente". Mme Bachelet termine sa présidence avec 75 % de popularité, mais la Constitution lui interdisait de briguer un second mandat. Les principaux défis du futur gouvernement sont le chômage (près de 10 %), qui touche particulièrement les jeunes (25 % des 15-24 ans), et les inégalités sociales, qui subsistent malgré des programmes sociaux qui ont permis d'abaisser le taux de pauvreté à 13,7 %. D'après le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), 10 % de la population concentre près de 50 % des revenus.