Le 12 février de l'année 1995, l'écrivain algérien d'expression française, Rachid Mimouni trépassait d'une foudroyante hépatite à l'hôpital Cochin de Paris. Pour célébrer le 15ème anniversaire de décès, la direction de la culture de la wilya de Boumerdès, la ville natale du défunt ? organise du 15 au 16 février un colloque national "Rachid Mimouni". Ce rendez-vous littéraire aura lieu sous le thème générique de "Emploi du patrimoine populaire dans l'écriture romanesque algérienne". Autrement dit, des professeurs ainsi que des écrivains comme Z'hour Ounissi, Djilali Khellass et Abdelhamid Bourayou, auront à décrypter son œuvre du point de vue du patrimoine national. Outre ce thème générique, il y aura également des conférences-débats autour des sujet comme, "Anthropologie de conte populaire algérien et son avenir dans les études romanesques", "Patrimoine romanesque algérien à travers un spécimen d'étude" et "Présence du patrimoine populaire de la Kabylie dans le roman algérien" etc…Rachid Mimouni mourra d'une longue maladie qu'il a longtemps tenue secrète. Comme tous les hommes qui laissent des traces, le fils de Boudouaou, s'est fait tout seul. Lui qui est issu d'une famille de paysans pauvres, se devait de se faire en travaillant dur. Destiné, auparavant, à une carrière de scientifique, Rachid Mimouni s'adonnait à la littérature et inaugure ainsi sa carrière d'écrivain avec " Le printemps n'en sera que plus beau " un roman écrit en 1971 et publié sept années plus tard. Après une licence en chimie obtenue en 1968 à l'ENS de Kouba, il poursuit des études de management à Montréal. De retour au pays, il enseigne l'économie à l'Inped, à l'Ecole supérieure de commerce et à l'Université d'Alger. Auteur d'une dizaine de livres, Rachid Mimouni a commencé par publier des poèmes et surtout des nouvelles (une vingtaine), notamment dans la revue Promesses. Pour la commémoration du décès de ce monument de la littérature algérienne qui croyait " à l'intellectuel comme éveilleur de conscience, comme dépositaire des impératifs humains, comme guetteur vigilant prêt à dénoncer les dangers qui menacent la société "le colloque de Boumerdès parait minime vu les invités qui ne sont pas forcément des spécialistes de Mimouni. Son roman très réputé, " Le fleuve détourné, " a été adapté il y a trois ans au théâtre par Hamida Ait El Hadj, une amie du défunt. " Le fleuve détourné ", est d'ailleurs qualifié par le défunt écrivain " roman de la prise de conscience " … Le journal Le Monde parlera même du " nouveau KAFKA". Au delà du fait que toute l'œuvre mimouniènne fait état de l'évolution des êtres dans un monde de fous en parfaite déliquescence, elle interroge, également, sans cesse les rapports étroits entre, " la tradition et la modernité ". C'est le fil conducteur d'ailleurs de la plupart des écrits littéraires maghrébins, où les anciens sont révélés comme des " gardiens des temples et de l'honneur", alors que les autres regardent vers d'autres cieux. Il s'agit de ces questionnements dans son notamment, " L'honneur de la tribu ", un livre qui met en scène l'interaction entre une génération de patriarches, gardiens des traditions et de valeurs ancestrales, et les événements de l'histoire… Dans ce puzzle désordonné, Mimouni tente, savamment, de remettre en question le mythe séculaire de la tradition, garante et gardienne de valeurs authentiques ancestrales de bravoure et d'honneur de la société. Pour Mimouni, l'acte d'écrire s'apparente à une fonction hautement symbolique, "c'est un engagement moral " dira-t-il affirmant que l'écrivain est, avant tout, "témoin et conscience de son époque, de sa société, tant il est vrai que l'intellectuel va se définir par sa production … Il va dénoncer les maux d'une société, fustiger les injustices sociales " en les poussant volontairement au noir". Auteur prolifique, (il a signé une dizaine d'œuvres) et récompensé par de nombreux prix littéraires, Mimouni reçoit, à titre posthume, le prix Albert Camus pour l'ensemble de son œuvre.