Sept officiers de haut rang ont été inculpés et écroués par un tribunal d'Istanbul, dans la nuit du mardi 23 au mercredi 24 février, pour avoir monté en 2003 un complot afin de renverser le gouvernement turc. Une vingtaine d'autres suspects étaient toujours interrogés. La cour a en outre décidé de libérer six militaires. Tous ont été arrêtés lundi dans le cadre d'un impressionnant coup de filet visant 49 officiers sur leur implication présumée dans ce complot. Les gradés interpellés sont accusés d'avoir cherché à fomenter le chaos en faisant sauter des mosquées pour déclencher une prise de contrôle militaire dans le cadre d'une opération baptisée Balyoz ("masse de forgeron"), dont le projet remonte à 2003, selon la presse. Ils sont également soupçonnés d'avoir voulu abattre un avion de chasse turc pour provoquer un conflit armé avec la Grèce et déstabiliser le gouvernement. L'instigateur supposé du plan, l'ex-général Cetin Dogan, a été arrêté. Il a nié toute implication, indiquant qu'il s'agissait d'un "jeu de stratégie" militaire conçu à l'époque où il portait l'uniforme. L'état-major, qui a rejeté les accusations et dénoncé une campagne de dénigrement, a néanmoins reconnu une existence à ce plan, évoquant lui aussi un "scénario" de "wargame" préparé en 2003. Les deux grands partis d'opposition, victimes de putschs militaires dans le passé, ont pointé du doigt le gouvernement. Le chef de l'opposition laïque, Deniz Baykal, s'est interrogé sur le moment choisi de la rafle menée contre d'ex-généraux . La plupart des cadres de l'AKP étaient membres d'un parti pro-islamiste interdit par la justice en 2008 après avoir été chassé du pouvoir par l'armée l'année précédente. L'armée, qui a déposé quatre gouvernements depuis 1960, avait récemment déclaré par la voix de son chef, le général Basbug, que le temps des coups d'Etat était révolu. Plusieurs complots présumés contre le gouvernement ont été mis au jour, provoquant une succession de procédures judiciaires qui ont attisé les tensions entre les partisans du gouvernement, accusé d'avoir un plan caché d'islamisation du pays, et ses opposants. Près de deux cents personnes de tous bords (mafieux, avocats, journalistes, universitaires, militaires) sont jugées depuis 2008 dans le cadre de l'affaire Ergenekon. Aucune condamnation n'a encore été prononcée.