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Face à la cacophonie institutionnelle, comment et où sont placées les réserves de change de l'Algérie à l'étranger ?
Publié dans Le Maghreb le 17 - 03 - 2010


Docteur Abderrahmane MEBTOUl Expert International
Suite à la déclaration du ministre de la promotion de l'investissement concernant un éventuel rapatriement de nos réserves de change placées à l'étranger, pour un débat transparent, il est utile d'éclaircir la population algérienne qui a une faible culture économique mais qui est propriétaire ipso facto de ces réserves, autant que les réserves
d'hydrocarbures et qu'elle est en droit de savoir comment elles sont utilisées.
1.- L'institution, la seule habilitée à gérer, rapatrier, placer les devises, est selon la Constitution et la loi sur la monnaie et le crédit, la banque d'Algérie, institution placée sous l'autorité directe du président de la république et ne dépend en aucune manière du gouvernement.
Toute autre déclaration ne venant pas de cette institution est nulle et non avenue et n'engage pas l'Etat algérien. Alors se pose cette question : pourquoi cette cacophonie institutionnelle surtout sur un sujet sensible, engageant la sécurité du pays, et donc cette déclaration d'un membre du gouvernement nullement habilité, pouvant peut être passer encore si c'était le ministre des finances ?

2. La deuxième question qui se pose d'abord quel est le montant placé à l'étranger ? Le ministre des Finances interrogé par les députés à l'APN en novembre 2008 avait affirmé que 80% des réserves de change de l'Algérie alors estimées à environ 140 milliards de dollars, sans les réserves d'or dont la valeur fluctue selon la valeur de l'once d'or, étaient placées à l'étranger, sans donner aucune précision.

3- Troisième question, quelle est la structure du placement, la part en bons de trésor, dans ce cas garantis par les Etats, la part dans des banques internationales privées dites bien cotées AAA, la garantie étant moindre, encore que pour ces dernières avec la crise économique d'octobre 2008, bon nombre de ces banques ont été déclassées. Comment ne pas rappeler l'information d'une extrême gravité , publiée par la presse algérienne en février 2010 affirmant que la Sonatrach aurait a placé avec l'accord de la banque d'Algérie plus de 2 milliards de dollars dans une banque émiratie , information non démentie ni par la banque d'Algérie, ni par le ministère des finances , ni par le ministère de l'Energie et des Mines. Qu'en est-il avec la semi- faillite financière d'Abu Dhabi ? . Rumeur ou vérité ?

4.- Quatrième question, existe -il une gestion active de nos réserves de change et dans quelles monnaies elles sont libellées : dollars, euros, yen, livres sterling. L'information selon laquelle la structure serait de 45% en dollars, 45% en euros, 5% en livres sterling et 5% en yen est-elle vérifiée ? Ce d'autant plus qu'il y a eu depuis janvier 2000 (cotation 0,90 dollar un euro ) à janvier 2010 une dépréciation du dollar de plus de 40% ?

5- Cinquième question, le placement se-t-il fait à long terme, à moyen terme ou à court terme et quelles sont les parts respectives ?

6- Sixième question- A quel moment et à quel taux d'intérêt se sont faits ces placements? avant la crise, pendant la crise d'octobre 2008, sachant que les principaux taux directeurs des banques centrales ont été ramenés vers zéro et avec le taux d'inflation mondial même très faible , le rendement des placements peut être négatif ?

7- Septième question- Le rapatriement des réserves de change peut-il se faire sans l'accord des partenaires ( quels ont été les clauses du contrat)? sans compter qu'un rapatriement prématuré fait perdre une fraction des intérêts prévus.

8- Huitième question - S'il ya rapatriement n'est ce pas la conséquence des dernières mesures gouvernementales où le financement se fait en priorité sur fonds propres dans la mesure où le secteur privé national opérant dans la sphère réelle est dans sa majorité fortement endetté, puisant lui même une grande fraction de son financement au niveau des banques locales, ayant une épargne faible , et se pose cette question : en économie ouverte, la politique socio-économique actuelle se fondant sur un retour au volontarisme étatique est -elle fiable ?

9- Neuvième question liée à la précédente, les dernières mesures gouvernementales des 49/51% donnant la priorité dans le capital à l'Etat, encadrant donc l'investissement étranger, et ces mesures techniques seront-elles suffisantes pour enclencher un véritable développement hors hydrocarbures ?

10- Enfin dixième question, , le blocage actuel ne réside-t-il pas dans le manque de visibilité, de cohérence dans la démarche gouvernementale, liés à la panne dans la réforme globale , une gouvernance mitigée freinant la dynamique économique fondée sur la valorisation du savoir actuellement dévalorisée au profit des emplois-rentes, et donc ne permettant pas un transfert du savoir-faire organisationnel et technologique, des entreprises concurrentielles s'adaptant aux mutations mondiales freinées par une bureaucratie paralysante, la société reposant sur la rente des hydrocarbures ( brut et semi-brut) qui a engendré malheureusement une corruption socialisée.
Devant cette situation instable , en évitant d'imputer toujours la faute à l'extérieur, alors que le mal profond est en nous, ce discours populiste démagogique ne portant plus, même en rapatriant les réserves de change , la majorité des hommes d'affaires étrangers ou nationaux ne préfèreront-ils pas les actions de court terme, sans risques sachant qu'ils seront payés avec l'importance des réserves de change qui, avec la mauvaise gestion peuvent aller vers l'épuisement avec un impact socio-économique mitigé?
Car l'important n'est pas de dépenser, tout le monde sait dépenser, mais de bien gérer.


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