Les gorilles d'Afrique centrale sont menacés d'extinction du fait de l'abattage illégal des forêts, de l'exploitation minière et du braconnage, ont alerté les Nations unies et Interpol dans un rapport conjoint publié cette semaine . La situation est encore plus grave qu'on ne le pensait jusque-là. Dans leur précédent rapport en 2002, ils avaient estimé que seuls 10% des gorilles survivraient d'ici à 2030, mais ces estimations paraissent désormais très optimistes, selon l'auteur de ces deux rapports. "Nous craignons aujourd'hui que la majeure partie des gorilles disparaissent dans peut-être quinze ans", a déclaré Christian Nellemann, du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). "Ce qui nous inquiète est que ces gorilles disparaissent plus vite que nous ne pouvons mobiliser des ressources pour les sauver", a-t-il déploré, appelant à ce que davantage de moyens soient donnés au PNUE et à Interpol pour les protéger. L'un des plus grands dangers pour les gorilles est l'augmentation de l'abattage du bois, principalement destiné à l'Asie, et à la Chine en particulier, a précisé M. Nelleman, l'auteur du rapport intitulé "L'ultime révérence du gorille". Les camps d'abattage de bois, ainsi que les exploitations minières engagent des braconniers pour fournir aux réfugiés et aux marchés de la viande d'animal sauvage, notamment de gorilles, a commenté Achim Steiner, directeur exécutif du PNUE.Le rapport onusien appelle ainsi à une meilleure supervision des sociétés européennes et asiatiques ayant recours à des filiales pour abattre le bois et extraire les minéraux d'Afrique centrale."C'est une tragédie pour les singes anthropoïdes, ainsi que pour un nombre incalculable d'autres espèces, qui sont affectés par le commerce illégal trop répandu et qui va en s'intensifiant", a estimé M. Steiner dans un communiqué. "En bref, c'est un crime environnemental et du vol commis par quelques très puissants aux dépens des pauvres et des faibles."Pour David Higgins, directeur du programme sur le crime environnemental à Interpol, les gorilles sont victimes du mépris dont font preuve les réseaux du crime organisé envers le droit national et international sur la protection de la vie sauvage. Les singes anthropoïdes sont également victimes de l'accroissement démographique et du virus Ebola. Par ailleurs, les factions armées ayant pris pied sur les terres des gorilles, la protection de ces derniers est devenue extrêmement difficile, a ajouté M. Nelleman. Le rapport contient toutefois quelques bonnes nouvelles. Une étude, qui n'a pas été publiée, mentionne la découverte dans une région de l'est du Congo, en plein coeur de la zone de conflit, de 750 gorilles d'une espèce gravement menacée qui n'avaient pas été identifiés auparavant. Sur les quatre espèces de gorilles connues, trois sont considérées comme gravement menacées et une autre comme menacée. Les prévisions précédentes du PNUE faites en 2002 suggéraient que seulement 10 % des zones d'habitat des grands singes subsisteraient en 2030. Ces estimations semblent désormais trop optimistes vu l'intensification des pressions qui vont de l'exploitation illégale du bois à l'exploitation minière et la production de charbon, en passant par une demande croissante de viande de brousse, notamment celle du singe. Les épidémies de fièvre hémorragique Ebola compliquent la situation en décimant les populations de grands singes, dont les gorilles, et selon les estimations, 90 pour cent des animaux infectés vont mourir. Ce rapport d'évaluation d'une réaction rapide indique que les milices dans la partie orientale de la RDC sont derrière les trafics dans cette région qui peuvent rapporter plusieurs centaines de millions de dollars en un an. D'après le rapport, les produits miniers exploités illégalement comme le diamant, l'or et le coltan ainsi que le bois, finissent par passer les frontières du continent avant d'être transportés par bateaux vers l'Asie, l'Union européenne et les pays du Golfe. L'exportation de bois et de produits miniers est estimée être deux à dix fois supérieure aux niveaux enregistrés. Elle est le fait de sociétés fictives au Kenya, en Ouganda, au Rwanda et au Burundi. Ce commerce illégal est en partie contrôlé par les milices qui surveillent les passages frontaliers. Il génère entre 14 et 50 millions de dollars par an, grâce auxquels ils financent leurs activités. Par ailleurs, l'insécurité dans la région a poussé des centaines de milliers de personnes dans les camps de réfugiés. Les camps d'exploitation forestière et minière, peut-être liés aux milices, engagent des braconniers pour approvisionner en viande de brousse les réfugiés et les marchés des villes de la région", conclut le rapport onusien .