Une soixantaine de pays d'Europe et d'Amérique latine se retrouvent depuis lundi soir à Madrid pour renforcer des liens économiques distendus. Un des enjeux de ce sommet: la relance ou pas des échanges commerciaux entre l'Union européenne et le Mercosur. "Nous avons décidé de reprendre les négociations en vue d'un accord ambitieux et équilibré", a déclaré le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, à l'issue d'un sommet UE-Mercosur à Madrid, en marge du VIe sommet UE-Amérique latine. Les négociations étaient rompues depuis 2004, les pays européens craignant une trop forte concurrence des produits agricoles et d'élevage du Mercosur dont les membres appréhendaient en retour d'être envahis par les produits industriels européens. Un accord commercial entre l'UE et les pays du Mercosur représenterait chaque année "cinq milliards d'euros supplémentaires d'exportations de l'UE vers le Mercosur et du Mercosur vers l'UE", a souligné M. Zapatero, dont le pays assure la présidence tournante de l'Union européenne. Avec la reprise des négociations, "il s'agit d'affirmer que face à toute velléité de protectionnisme, la meilleure réponse à la crise économique est l'ouverture commerciale", a ajouté M. Zapatero. "Les plus grands bénéficiaires d'un éventuel accord seraient les pays du Mercosur", a-t-il souligné, citant des projections selon lesquelles le Paraguay enregistrerait une hausse du Produit intérieur brut (PIB) de 10%, l'Uruguay de 2,1%, le Brésil de 1,5%, l'Argentine de 0,5% et l'UE de 0,1%, pendant une période non précisée. Interrogé au sujet des réticences de certains partenaires, il s'est dit "sûr qu'une grande majorité de pays européens étaient en faveur de la reprise des négociations". Dix Etats européens emmenés par la France ont exprimé lundi à Bruxelles leur inquiétude quant aux risques que ferait peser sur leur agriculture un accord commercial entre l'UE et le Mercosur. La France a réuni autour d'elle neuf Etats pour soutenir un texte jugeant "inacceptable" d'envisager de nouvelles concessions agricoles après celles offertes par la Commission européenne en 2008 dans le cadre des pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce du cycle de Doha, qui constituent déjà "une limite ultime" pour les agriculteurs européens. L'Autriche, la Roumanie, mais aussi Chypre, la Finlande, la Grèce, la Hongrie et le Luxembourg sont aussi sur la ligne française. D'autres pays, comme la Belgique, la Lituanie, l'Italie, le Portugal, la Slovaquie et la Slovénie, ont également exprimé leur inquiétude, selon un diplomate européen. Le président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso, a souligné à Madrid qu'un accord entre les deux régions "permettrait de créer une des plus importantes zones de commerce dans le monde, avec 700 millions de personnes". "Mais soyons clairs, nous ne faisons qu'entamer une négociation" et "nous devons être conscients qu'elle nécessitera des efforts importants de part et d'autre", a-t-il souligné, évoquant notamment la revendication européenne d'une libération du secteur des services des pays du Mercosur. "Les préoccupations de certains secteurs spécifiques devront être prises en compte et des mesures d'accompagnement pourront être nécessaires", a-t-il ajouté à propos des craintes des agriculteurs européens. La Commission européenne avait décidé le 4 mai de relancer les négociations avec le Mercosur, pour lesquelles elle est mandatée depuis 1999.