La Commission européenne a défendu hier à Strasbourg son projet de contrôle a priori des budgets des Etats de la zone euro, une mesure qui ne vise, selon elle, qu'à garantir le respect des règles communes. Cette proposition a suscité des réactions mitigées parmi les gouvernements de l'Euroland, et des parlementaires nationaux ont estimé que l'exécutif européen violerait ainsi la souveraineté des Etats membres en précédant la représentation nationale. "Il ne s'agit pas de violer la souveraineté des parlements ni de violer la démocratie. Il s'agit que les Etats membres respectent les règles qu'ils ont approuvées", a plaidé le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaire, Olli Rehn, devant le Parlement européen. "Ca ne veut pas dire qu'on va examiner les budgets ligne par ligne", a-t-il ajouté. "Les décisions nationales ont un impact qui se fait sentir au-delà des frontières nationales. C'est pourquoi il faut une coordination européenne avant la mise en œvre de ces décisions nationales", a encore expliqué le commissaire finlandais. Dans un débat qui était consacré aux conséquences de la crise économique et financières, les principaux groupes politiques ont défendu après lui la nécessité d'un contrôle renforcé des politiques budgétaires. Leurs dirigeants n'ont cependant pas pris directement position sur la proposition de la Commission. "Les Vingt-Sept doivent se concerter bien en amont sur les orientations budgétaires. Ce qui est vrai des budgets nationaux l'est aussi de la politique sociale et fiscale", a estimé le président du Parti populaire européen (centre-droit), Joseph Daul. Le président du groupe des Socialistes et démocrates, Martin Schulz, a dénoncé de son côté le "patchwork de politiques économiques" auquel se résume, selon lui, la gouvernance de la zone euro. "L'Europe doit être gouvernée par la méthode communautaire et pas par un syndicat d'intérêts nationaux", a ajouté Guy Verhofstadt, président de l'Alliance des libéraux et des démocrates. Les eurosceptiques tirent des leçons différentes de la crise grecque et de ses conséquences en préférant croire encore aux vertus de l'autodiscipline. "Ce dont nous avons besoin, ce n'est pas d'un mécanisme supplémentaire mais de la volonté politique d'appliquer des engagements qui ont été pris mais pas respectés", a affirmé le conservateur britannique Timothy Kirkhope, président du groupe des Conservateurs et des réformistes. Pour sa part, l'Allemagne veut proposer aux pays européens de confier à la Banque centrale européenne (BCE) ou à des instituts indépendants l'examen préalable de leurs budgets nationaux, selon un document de travail cité mercredi par le Handelsblatt. Selon le quotidien économique allemand, la chancelière Angela Merkel et ses ministres de l'Economie et des Finances sont également décidés à suspendre le versement de fonds structurels aux pays qui ne respectent pas leurs objectifs de réduction des déficits, voire à retirer pour "au mois un an" leurs droits de vote en cas d'infraction grave aux règles de l'Union monétaire. De son côté, le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, a évoqué lundi soir à Bruxelles l'idée de faire inscrire dans la constitution des pays de la zone euro un plafond pour les déficits, comme l'a déjà fait l'Allemagne.