L'Agence internationale de l'énergie (AIE) anticipe une reprise des investissements dans l'amont pétrolier en 2010. Les investissements du secteur pétrolier et gazier dans l'amont devraient augmenter de 9% à 10% cette année par rapport à l'an dernier, a déclaré, hier, Trevor Morgan, économiste senior de l'AIE. Pour autant, ces investissements devraient demeurer inférieurs d'environ 10% à leur pic de 2008. Le spécialiste ne prévoit pas à ce stade une forte augmentation des capacités nettes durant ces 5 prochaines années. En conséquence, il redoute une accélération des investissements au cours des années à venir pour répondre à une demande qu'il attend croissante. Par ailleurs, la hausse des coûts de financement liée à la crise de la dette souveraine en Europe est une menace pour la reprise des investissements. "Nous ne prévoyons pour l'instant pas beaucoup d'augmentation des capacités nettes au cours des cinq prochaines années", a précisé Trevor Morgan lors d'une conférence. "C'est pourquoi nous craignons que le secteur ait besoin d'investir davantage au cours des années à venir pour répondre à la hausse de la demande sur laquelle nous tablons." Il a chiffré à 90 milliards de dollars (73 milliards d'euros) la diminution des investissements dans l'amont en 2009. Il a expliqué à Reuters que la hausse récente des coûts de financement, conséquence de la crise de la dette en Europe, qui se traduit notamment par une remontée du taux Libor de référence, faisait planer un risque sur les investissements. "C'est un risque (...) et il faudra voir si les coûts de financement restent élevés ou même s'ils montent encore plus haut, ce qui pourrait avoir un impact important sur le montant des investissements sur l'ensemble de l'année", a-t-il dit. Notons que l'AIE a revu à la baisse sa prévision de demande mondiale de pétrole en 2009 et 2010, respectivement de 160.000 et 220.000 barils par jour, selon son rapport mensuel pour mai. Ces nouvelles prévisions interviennent après trois révisions consécutives à la hausse. L'agence, qui représente les intérêts des pays industrialisés, estime que le monde devrait consommer cette année 86,4 millions de barils par jour (mbj), soit 1,9% de plus que l'année précédente (84,8 mbj). En 2009, la demande mondiale avait enregistré une baisse de 1,4% par rapport à 2008. La croissance mondiale meilleure que prévu, selon les derniers chiffres du Fonds monétaire international (FMI), est compensée par un prix du baril attendu autour de 76,5 dollars en 2010, soit 1,20 dollar de plus qu'auparavant. Mais l'AIE explique aussi ses révisions par une correction des chiffres des années précédentes, notamment dans les pays non membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Dans le détail, "la demande de pétrole a été plus forte que prévu dans certaines zones de l'OCDE (Amérique du Nord et Pacifique), mais un peu plus faible dans deux régions hors OCDE (Asie et Moyen-Orient)", selon l'AIE, dont le siège est à Paris. Ces derniers mois, la demande de l'Asie, et notamment de la Chine, avaient amené l'agence à revoir ses prévisions de consommation mondiale à la hausse. La consommation asiatique reste néanmoins la principale composante de la hausse de la demande en 2010 par rapport à 2009. En Europe, la demande a été affectée "par le nuage de cendres du volcan islandais, qui a cloué les avions au sol mi-avril, et par les inquiétudes persistantes pour l'économie du continent, illustrées de façon dramatique par la crise de la dette grecque". Quant à la production, elle est restée inchangée en avril par rapport à mars, à 86,6 mbj. Une faible hausse de la production de brut au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), de 40.000 barils par jour à 29,03 mbj, a compensé une baisse de l'offre des pays hors de cette zone. Enfin, selon l'AIE, le naufrage d'une plateforme pétrolière au large des côtes américaines n'a pas affecté la production régionale, mais cette marée noire pourrait conduire à des mesures de sécurité plus strictes.