La baisse des cours du pétrole commence à peser sur le secteur pétrolier. L'effet pervers des sous-investissements dans l'amont et l'aval pétrolier risque de s'aggraver durant les prochains mois. Pis encore, la crise actuelle ayant engendré une chute de la demande à tous les niveaux poussent les compagnies pétrolières non seulement à geler leurs investissements mais à réduire leurs activités notamment dans le raffinage. C'est ainsi que les raffineurs européens confrontés à un effondrement des marges, tombées à 10 euros la tonne au mois de juillet contre 65 euros en septembre 2008, sont en train de réduire sensiblement l'activité de leurs installations. Début août, Total a ainsi arrêté l'une des unités de base de sa raffinerie normande en France, sans préciser de date de redémarrage. Le suisse Petroplus va également faire tourner ses installations d'Anvers à la moitié de leurs capacités au troisième trimestre. Selon Reuters, les raffineries européennes devraient en moyenne fonctionner à 80 % de leurs capacités en août, contre 85 % au printemps. Aussi, et selon le cabinet américain Purvin & Gertz, une capacité de production d'au moins un million de barils par jour doit être supprimée dans le bassin Atlantique, soit l'équivalent de 6 à 7 raffineries européennes de taille moyenne. Tout aussi pessimiste, Standard & Poor's (S&P) estime que les surcapacités actuelles vont être exacerbées par la mise en service de nouvelles installations dans le monde en 2009, notamment en Inde, avec le démarrage d'une énorme raffinerie d'une capacité de 680.000 barils par jour. " La demande de produits pétroliers va repartir l'an prochain, mais ce redémarrage sera très lent dans les économies industrialisées. Cette période de faibles marges va se prolonger jusqu'à ce qu'une restructuration des capacités de raffinage soit menée ", affirme Alfred Luaces, consultant chez Purvin & Gertz. Au total, la demande mondiale de produits pétroliers devrait baisser de 0,6 million de barils par jour cette année selon l'Agence internationale de l'énergie, tandis que les capacités de raffinage de la planète augmenteront d'au moins 1,5 million de barils par jour. Selon S&P, la situation de crise pourrait donc durer jusqu'en 2013. " A partir de 2014, l'avènement de nouvelles raffineries au Moyen-Orient devra aussi être pris en compte ", ajoute l'agence de notation. Dotée d'une capacité de 400.000 barils par jour, la raffinerie de Total et Aramco construite en Arabie Saoudite devrait, par exemple, être pleinement opérationnelle au deuxième semestre 2013. ConocoPhillips et Aramco prévoient, quant à eux, la mise en service du site saoudien de Yanbu à la fin de 2014. Néamoins, cela pourrait représenter une menace à moyen terme. Pour rappel, l'économiste en chef de l'AIE, Fatih Birol a estimé récemment que le sous-investissement chronique dans leurs infrastructures pétrolières "compromettra tout espoir de reprise après la crise économique actuelle".