L'Afrique du Sud a enregistré une croissance de 4,6% au premier trimestre 2010 après une récession de -1,8% en 2009. Pour de nombreux économistes c'est l'organisation du grand événement sportif mondial qui a permis à l'Afrique du Sud de doper son économie, tout comme le ministre des Finances sud-africain, Pravin Gordhan, qui estime que la Coupe du monde de football apportera 0,5 point de croissance à une hausse de PIB qui atteindrait 2,3% en 2010. Mais l'effet positif de la Coupe du monde sur l'activité d'un pays n'est absolument pas avéré. En effet, une étude menée par Bank of America-Merrill Lynch sur la période 1954-2006 montre que les pays organisateurs ont, en moyenne, enregistré pendant l'année de la compétition une croissance économique inférieure à leur rythme habituel. Toutefois, les dirigeants sud africains considèrent que l'Afrique du Sud va déroger à cette règle, surtout en raison de la crise mondiale qui a plongé le pays dans la récession au dernier trimestre 2008, et ce pour la première fois en 17 ans. Après avoir renoué avec une légère croissance (+0,9%) au troisième trimestre 2009, la tendance s'est confirmée en fin d'année dernière (+3,2%) avant d'accélérer encore à +4,6% au premier trimestre 2010. L'industrie (automobile, agroalimentaire) et les mines (or, platine, charbon) ont été les plus gros contributeurs à la croissance, devant le commerce et le tourisme. Les raisons de ce paradoxe sont, d'une part, les prévisions sur le flux des visiteurs étrangers, sera moins important que prévu : 250 000 environ, contre 450 000 initialement attendus. L'impact sera donc assez faible juste de quoi permettre au pays de franchir la barre des 10 millions de touristes en 2010 contre 9,9 en 2009. En cause : d'abord le coût élevé des billets d'avion pour se rendre en Afrique du Sud, mais aussi les appréhensions liées à une forte criminalité et enfin, le système de réservations de chambres imposé par la société spécialisée Match, partenaire de la Fédération internationale de football. D'autre part, l'effet consommation est souvent de court terme. Selon les économistes, il se traduit surtout par une anticipation d'achats qui auraient quand même eu lieu. Or, cet effet de substitution se constate en particulier dans les pays organisateurs les plus pauvres. De plus, il pourrait profiter autant aux produits importés qu'à ceux produits localement. Pour la Banque JP Morgan, qui applique, traditionnellement, à chaque grande compétition de football, l'analyse quantitative qu'elle utilise pour l'évaluation des valeurs de marchés, ce n'est donc pas l'Afrique du Sud qui profitera le plus de sa Coupe du monde, mais l'Angleterre. Car c'est elle qui devrait remporter la compétition, compte tenu d'un tableau favorable, même si le Brésil détient "l'équipe la plus forte" avec l'Espagne. Reste donc à l'Afrique du Sud à se consoler avec une inflation qui continue de décliner à 4,8% en avril contre 5,1% en mars. Elle avait atteint son plus haut niveau depuis six ans, en août 2008 à 13,7%. A moins que l'effet Coupe du monde n'inverse la tendance. Car les prix pourraient repartir à la hausse dans le commerce et les secteurs touristiques à la faveur de la compétition. Ce qui reporte d'autant une nouvelle baisse des taux directeurs, comme en début d'année, pour soutenir la croissance. Les explications du FMI De l'avis du FMI, l'Afrique du Sud a bien survécu à la crise financière grâce à un ensemble de mesures pragmatiques de stabilisation conjoncturelle qui ont permis au pays de résister à sa première récession en 20 ans. "Certes, le taux de croissance est tombé en 2009 en dessous du taux moyen de 4,2 % enregistré sur la période 2000-2008. Mais le pire semble être passé et nous prévoyons une croissance relativement robuste de 2,5 % en 2010", expliquait récemment Dominique Strauss-Kahn au nom du FMI. Mais, sur ce fond positif, le FMI pointe quatre enjeux majeurs pour l'avenir du pays: l'emploi, les inégalités et la politique concurrentielle. Si l'Afrique du Sud est la première économie d'Afrique (près de 40 % du PIB de l'Afrique subsaharienne) et le pays le plus développé du continent, cela tient notamment à la richesse de ses infrastructures et de ses services. En raison des difficultés politiques liées à l'Apartheid et aux sanctions internationales, le pays a longtemps connu une croissance très irrégulière, particulièrement dans les années 1980. Son économie s'est développée principalement autour de l'exploitation de ressources naturelles abondantes (diamants, or, platine, autres métaux, charbon), avec l'émergence d'un puissant secteur de services, notamment financiers, la Bourse de Johannesburg étant la première du continent. En revanche, depuis 1994 et la fin de l'apartheid, le pays a affiché une croissance régulière d'environ 5% en moyenne. La gestion de l'héritage de l'apartheid reste cependant un dossier délicat, avec les problèmes liés aux inégalités sociales et au niveau de qualification de la population. La politique de discrimination positive choisie par le pouvoir, notamment le Broad Based Black Economic Empowerment connaît des difficultés d'application (ascension de cadres noirs, cession de capitaux aux Noirs, rétrocession très limitée des terres qui appartiennent à 80% à des blancs, départ de cadres à l'étranger…). Malgré cet aspect volontariste, la législation sud-africaine est relativement libérale et est considérée par les observateurs comme assez largement favorable aux affaires. Le chômage reste massif (officiellement de 25,2 % en mars 2010). Son aggravation avec la crise économique accroît les attentes de la population en termes de redistribution et de politiques sociales, créant des tensions qui peuvent se révéler dangereuses à terme. Par ailleurs, l'agriculture contribue à 8 % du total des exportations du pays. Elle fait partie des cinq premiers exportateurs mondiaux d'avocats, de pamplemousses, de mandarines, de prunes, de poires et de produits dérivés des autruches. L'agriculture revêt un caractère très dualiste, un petit nombre de fermes commerciales étant gérées surtout par des blancs alors qu'un grand nombre de fermes de subsistance sont exploitées par des Noirs. Et la vraie richesse de l'Afrique du Sud sont les mines d'or sud-africains. Si l'exportation de métaux précieux représente 25,2 % des exportations sud-africaines, il serait faux de penser que l'Afrique du Sud ne vit que de l'exploitation de son sous-sol qui contribue cependant de façon notable à son commerce extérieur (outre l'or et autres métaux précieux, le pays est riche en charbon, 80% du platine mondial.). Deux des plus grandes sociétés minières du monde sont originaires d'Afrique du Sud. BHP Billiton, la plus grosse société minière du monde, est issue de la fusion entre la société sud-africaine Billiton et la société australienne BHP.