L'un des rendez-vous lyrique qui ont réellement pignon sur rue, le festival international de la musique diwane a débuté jeudi dernier au bois des arcades de Riad El Feth avec bien entendu énormément de percussion. Cette manifestation qui en est à sa troisième édition et qui s'étalera jusqu'au 20 juillet prochain prévoit un tas de spectacles en plein air pour un public pas seulement jeune mais carrément éclectique. Plusieurs groupes prendront part à ce rendez-vous notamment les trois lauréats du récent festival national diwane de Béchar qui s'est déroulé en mai dernier et qui a rendu un vibrant hommage au défunt Athmane Bali, que d'autres formations qui se déplaceront du Mali, du Burkina Faso, d'Inde et du Sénégal, selon le directeur artistique de cette manifestation, Rachid Briki. "Des groupes algériens ont été invités afin qu'ils puissent côtoyer des artistes professionnels à l'occasion de cette manifestation", selon toujours Briki qui souligne que cette troisième édition ambitionne de " combiner authenticité, créativité et jeunesse dans un mélange d'instruments traditionnels, modernes et originaux". En parallèle aux concerts, ce festival prévoit des master-class, des conférences-débats des expositions photos et des projections de film se rapportant à la musique diwane. Il y aura donc quatre conférences- débats et cinq projections qui auront lieu cette fois-ci dans les espaces fermés de Frantz Fanon et d'Ibn Zeidoun à Riad El feth. Nouveauté : cette fois-ci l'entrée est payante. Le billet coûte 200DA. "Un prix symbolique afin de permettre à un plus large public de goûter au charme de cette musique", a fait remarquer le directeur artistique de ce Festival. Dénommé à ses début, festival Gnaoui, il a pris cette année la dénomination de diwane. Pour Briki le concept de diwane " possède une large signification. Tout en englobant le genre gnawi dans son acceptation, diwane veut dire aussi texte, poésie, recueil ". L'expression diwane est passée d'ailleurs dans la civilisation occidentale. Le diwane, un art d'aimer Il faut savoir que le soufisme a eu tardivement son corollaire, la musique élaborée par des confréries du monde oriental et maghrébin, sous une forme que l'on appelle généralement, diwane. Ces ensembles musicaux par excellence traditionnels, explosent en ce moment. Au Maroc, en Tunisie, et surtout dans notre Sud, des groupes se forment autour de ce style musical traditionnel qui provoque " l'ivresse " et favorise la communion, l'unification, "l'extinction " du pratiquant en la divinité. Et les confréries, ces institutions particulières au soufisme, utilisent la musique, le chant et la danse comme pratiques religieuses à part entière. C'est une pratique religieuse! C'est ainsi que durant les spectacles de ces formations, l'on évoque soit Dieu, (El Ilah), le prophète Mohamed (QSSL), (Si Rassoul Allah) et les saints comme Sidi Abdelkader El Djilali, dans une ambiance parfumée de musc et inondée de djaoui, comme pour chasser les démons et les mauvais esprits. Cette évocation est tellement forte, tellement soutenue et répétée, que les artistes sur scène sont en transe comme s'ils étaient en parfaite communion avec les saints qu'ils louent. Le diwane est, en fait, une musique aux origines gnaoua. Gnaoua est ce parfait mélange tout aussi harmonieux que fraternel entre l'Afrique noire et l'Afrique blanche. Citons l'exemple des diwane qui existent, par exemple, à Biskra, cette ville des palmeraies qui a séduit les Etienne Dinet et les Oscar Wilde. Prenons le diwane de Biskra, connu par son " chef d'orchestre", Kamel Zekri, ou encore le Marzoug de Biskra. Le Marzoug, un style musical qui est resté à 100% local puisqu'utilisant les instruments traditionnels, tels, chekwa (cornemuse), karkabou (crotales), tablas. Il s'appelle, ainsi, en référence à l'une de ces nombreuses branches de la grande confrérie de Sidna Bilal. Sidi Bilal, le nom du premier muezzin noir de l'Islam, nommé par le prophète Mohamed (QSSL). Au Maroc, ces populations venues de l'ancien Soudan occidental, avant d'essaimer dans tout le Maghreb, sont désignées sous le terme " gnawa " mais, dans le Sud algérien, ils sont connus sous la dénomination de " abid ", " bousaâdia " ou "Ouled Baba Merzoug ". Et autour du nom de Marzoug, il y a tout une sémantique, puisque à Biskra comme dans d'autres lieux, on dit que l'adoption d'un tel nom était une façon de se placer sous une bonne augure, "Marzoug " signifiant chanceux. D'autres disent qu'il s'agirait plutôt d'un esprit, ainsi dénommé, parce qu'il procure la fortune à ceux qui se mettent sous sa protection.