L'intervention directe française en Mauritanie prise unilatéralement par le président Nicolas Sarkozy, sans le préalable d'une consultation avec les pays de la région, est en totale contradiction avec les décisions prises au mois de mars dernier par les sept ministres des Affaires étrangères de la région réunis à Alger. Ces derniers avaient réitéré leur "ferme condamnation du terrorisme" et leur détermination à éradiquer ce phénomène pour redonner à la région sahélo-saharienne sa vocation d'échanges, de paix, de stabilité et de coopération féconde. Avec l'intervention de l'armée française en territoire mauritanien, cette approche se trouve de facto déséquilibrée par une décision unilatérale, repoussant, ainsi, toute action intégrée, coordonnée et solidaire pour mener à bien la lutte contre le terrorisme. Dans la décision française, s'il y a le prétexte de libérer un otage, il faut relever cette ignorance en vue de renforcer la coopération bilatérale et régionale structurée, exclusive et de bonne foi pour combattre ce phénomène international. Entre la France et les pays sahélo-sahariens, on peut affirmer qu'il y a désormais des divergences, parfois des contradictions dans l'appréciation de cette lutte contre le terrorisme. Il est inutile de se demander pourquoi Paris s'est refusé à toute concertation avec les pays de la région, préférant se rapprocher des autorités mauritaniennes dans le plus grand secret. De là, il est à penser qu'on cherche un leadership français dans la région au détriment de la souveraineté de chaque Etat afin d'affiner plus l'ingérence étrangère sous prétexte de combattre le terrorisme. Ou, a défaut d'affaiblir considérablement tous les pays de la région. Les prochains jours ne devraient pas tarder à révéler que les objectifs de la France sont largement en contradiction avec la stratégie des pays africains à mener selon leur propre manière cette lutte contre le terrorisme. Des divergences tactiques ? Des nuances ? Des désaccords sur la coopération internationale dans ce domaine vont apparaître. Et c'est à partir, de l'envoi par Nicolas Sarkozy de son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, en mission au Mali, au Niger en en Mauritanie, qu'il est à attendre les vrais intentions de cet événement, qui fait déjà de la France un pays prêt à une ingérence totale dans la région. Dans cet esprit, l'Algérie ne cesse de rappeler la nécessité de l'organisation d'une conférence internationale sur le phénomène du terrorisme sous l'égide de l'ONU, qui traitera de l'ensemble des aspects qui lui sont liés, ses causes et ses véritables motivations et surtout afin de parvenir à une "convention" qui donne une définition précise et concertée sur le terrorisme et éviter de s'immiscer dans les affaires intérieures des pays et d'exercer des pressions sur eux, la préservation de l'indépendance et de la souveraineté qui sont un droit prévu dans tous les documents internationaux des Nations unies. A ce propos, Alger a abrité au mois d'avril dernier, deux rencontres cruciales. La première a regroupé les premiers responsables de la lutte contre le terrorisme et la seconde, les chefs d'état-major des armées des sept pays concernés, toutes deux inscrites dans un cadre d'évaluation de la menace terroriste, au niveau régional, l'élaboration d'une feuille de route quant à l'échange de renseignements, et la nécessité de la tenue à Bamako dans les meilleurs délais du sommet des sept chefs d'Etat sur la paix, la sécurité et le développement dans la région. Aussi, il est opportun pour les pays du Sahel de regrouper leurs forces avec beaucoup de détermination pour lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière. Une volonté assez bien réaffirmée par le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, lors de son allocution au récent sommet du G8 et à travers laquelle il a longuement développé le dossier sahélo-saharien, et la décision des pays du Sahel proposant des solutions sécuritaires individuelles. Dans le même volet, le chef de l'Etat a réitéré la position de l'Algérie, portant sur la criminalisation du paiement des rançons aux groupes terroristes et ce, en présence même du président français, Nicols Sarkozy, dont le gouvernement n'a pas respecté la résolution onusienne à ce sujet. "Les pays de la région sahélo-saharienne sont déterminés pour lutter contre le terrorisme et la criminalisation transfrontalière d'une manière efficace, coordonnée et solidaire ", avait annoncé le président de la République, faisant allusion à certains pays occidentaux qui s'immiscent dans les affaires de la région.