La devise japonaise qui inscrit une courbe ascendante depuis le début de l'année et a atteint hier un record de 415 ans. Le dollar ne vaut plus que 85,5 yens. Un record néanmoins pénible pour le pays du soleil levant , qui a toujours souhaité favoriser ses exportations. "Nous suivons la situation de près", ont assuré le ministre des Finances japonais, Yoshihiko Noda, et Ryuzo Miyao, membre du conseil de la BoJ (Banque of Japan). "Il y a de nombreux facteurs derrière la hausse du yen. Beaucoup parleront des inquiétudes sur les perspectives économiques américaines. D'autres mettront l'accent sur le rétrécissement des différentiels de taux d'intérêt. Certains citent le fait que le ministre des Finances japonais a semblé apaiser le risque d'intervention", a expliqué Marc Chandler, de Brown Brothers Harriman. Mardi, de nouvelles statistiques (commandes industrielles, dépenses et revenus des ménages stables dans un contexte d'inflation très modérée) aux Etats-Unis ont redonné des raisons de douter sur la solidité de la reprise américaine . C'est ainsi que le yen joue de plus en plus le rôle de valeur refuge. D'autant plus que la Réserve fédérale américaine statuera la semaine prochaine sur les orientations de sa politique monétaire. Le "problème" est qu'il est difficile de savoir ce qui va être dit lors de la prochaine intervention de Ben Bernanke, le patron de la Fed, notamment sur sa politique obligataire. Or, l'incertitude est la hantise des marchés financiers, et le marché des changes, le premier indicateur d'inquiétudes. Le dollar est alors délaissé. Il faut dire que la banque centrale nippone risque d'être de plus en plus poussée à intervenir sur le marché pour freiner sa devise. Les exportateurs japonais vont sans doute pâtir du repli du dollar vers le seuil de 85 yens. Une poursuite de l'appréciation de la monnaie japonaise fragiliserait un peu plus la reprise de l'économie du pays, et la Banque du Japon ne tarderait pas à se retrouver au pied du mur. Pour des raisons purement diplomatiques, le Japon préférerait ne pas intervenir. La dernière chose que souhaite Tokyo est d'avoir à justifier une manipulation de devise auprès de Washington, alors que les responsables américains s'efforcent encore d'inciter la Chine à laisser le yuan s'apprécier. Il est néanmoins peu probable que le dollar continue de chuter. D'une part, les prévisions pessimistes au sujet de l'économie américaine pourraient bien s'avérer exagérées, et les écarts de rendement entre les emprunts du Trésor américain et ceux du Trésor japonais pourraient prochainement de nouveau jouer en faveur du dollar. D'autre part, la seule menace d'une intervention de la Banque du Japon reste suffisamment puissante pour convaincre nombre d'intervenants de prendre des positions longues sur le dollar. Par conséquent, même si la hausse du yen est importante et que les conséquences politiques en sont douloureuses, il y a des chances que la Banque du Japon conclue qu'il est préférable de garder son calme et d'attendre que la situation s'améliore d'elle-même.