Instrument réservé exclusivement aux femmes dans ce désert mystérieux où évoluent, depuis des lustres, les populations touarègues, l'Imzad est, avant tout, un symbole, un instrument de pouvoir et de puissance contre les silences. Cet instrument qui est, à l'heure actuelle, maîtrisé par une poignée de femmes, existe depuis la nuit des temps. Alors que la femme tient l'instrument, l'homme, quant à lui, chante sur les airs de l'imzad. Instrument unique sur une scène organisée et réglée tel du papier à musique, il serait blasphématoire d'intégrer un autre son qui se mêlera à celui de l'Imzad hormis la voix rauque de l'homme. Les hommes du désert racontent, alors, leurs passions, leur vie et leurs souffrances sous des airs monocordes. Modes de transmission et pédagogie; le rôle de l'imzad dans le monde d'aujourd'hui en tant que référent identitaire chez les femmes et outil de lutte contre la pauvreté. L'Imzad se compose, selon la définition du pére de Foucault "essentiellement d'une calebasse demi-sphérique appelée "ateklas" ou "elkas" qu'on munit d'un manche de bois "tabourit" bâton (manche du violon), sur lequel on tend une peau "élem" et à laquelle on ajuste une corde "aziou" faite de crins de cheval ; un chevalet, formé de deux petits bâtons croisés et liés ensemble, "tiziouin" (petites tiges = chevalet du violon), maintient la corde au-dessus de la peau du violon ; deux ouïes, dont chacune est appelée "tit" œil (ouïe du violon), sont pratiquées dans la peau, l'une à droite, l'autre à gauche du chevalet ; quelques rares imzad n'ont qu'une ouïe, placée soit à droite ou à gauche du chevalet; quelquefois les deux ouïes ou l'ouïe unique sont non pas à la hauteur du chevalet mais entre le chevalet et le manche ; dans ce cas, lorsqu'il n'y a qu'une ouïe, elle est habituellement sous la corde.L'imzad n'a pas de cheville". On joue l'Imzad assis, l'instrument sur le genou, la main gauche tenant le manche et pressant la corde,la main droite tenant l'archet. L'archet taganhé est une baguette recourbée en forme de demi-cercle entre les extrémités de laquelle est tendue une corde aziou faite en crins de cheval. La fabrication d'un Imzad nécessite environ 6 à 7 jours. Les matières utilisées pour la fabrication de l'instrument sont d'origine végétale, animale et minérale. La peau de gazelle était privilégiée jadis, actuellement on utilise plutôt celle des caprins. La calebasse : c'est une plante grimpante de la famille des cucurbitacées, dont le fruit creux (calebasse ou gourde) est cueilli vert. Vidé et séché, il sert de récipient, de bouteille ou de boîte ainsi que pour l'imzad. Le bois : le bois de figuier est apprécié pour la fabrication de l'instrument, à défaut on utilise le bois de laurier-rose ou d'acacia. Les couleurs utilisées se présentent sou forme de poudre que l'on dissout dans de l'eau chaude pour donner son éclat à la teinte par la suite. Les couleurs jaune et verte sont importées du Niger, l'ocre est extrait de carrières de Tamanrasset, et le noir est obtenu à partir de la macération de morceaux métalliques (fer, clous…) dans la première rincée du thé vert lors de sa préparation rituelle. La femme joue à l'Imzad. En plus de la voix de l'homme, l'Imzad peut être accompagné de battements de mains, exceptionnellement d'un duo. Il a une grande relation avec les pratiques guerrières de jadis. Il accompagne les femmes au cours de leurs transhumances… Le son de l'imzad, au pays des Touareg, enveloppe le corps et l'esprit dans une sorte d'espace infini. Ce son venu des fonds des âges, nous transporte au-delà du réel. Sauver l'Imzad Il semblerait qu'il ne reste plus que 6 vieilles femmes qui savaient encore fabriquer et jouer de l'imzad. Avec leur disparition, c'est toute une identité culturelle qui disparaît. Et pourtant, grâce à cette culture millénaire, la femme targuie jouit de privilèges auxquels la femme moderne n'accède que depuis peu. L'association, " sauvons l'Imzad " s'attelle depuis longtemps à sensibiliser des parties concernées afin de faire connaître au niveau local et national cet art ancestral, faisant prendre conscience aux populations locales de la nécessité de se mobiliser pour préserver ce patrimoine. Une opération de recensement des artistes joueuses d'imzad et poètes a été lancée dans toute la wilaya de Tamanrasset. C'est ainsi que 10 formateurs et formatrices ont été retenus pour la création d'une école d'imzad à Tamanrasset. Prés de 200 jeunes filles se sont inscrites à Tamanrasset. Une première promotion " Promotion Dassine " de 40 élèves a démarré le 2 Janvier 2004 au sein de l'Institut de la formation professionnelle. Il est, par ailleurs, prévu de construire Dar EL Imzad un centre de rencontre et de rayonnement culturel pour les artistes du monde. Modes de transmission et pédagogie.