Lors d'une soirée-débat sous le thème "les intellectuels, l'Islam et la question des langues", organisée dimanche à Alger par le quotidien "Algérie News", le sociologue Ali El Kenz a relevé que les sociétés musulmanes connaissent un "carambolage" de repères et de "conflits" entre les allégeances, ce qui est dû à un "choc" à l'intérieur même du monde musulman. "Les conflits entre les allégeances ont créé un trouble et un désordre au sein des sociétés musulmanes d'une manière globale. Ces conflits sont dus à un choc qui existe non pas entre les civilisations, mais à l'intérieur même de la civilisation musulmane", a-t-il précisé. Dans ce sens,le sociologue s'interroge, "pourquoi un individu croit-il plus à une règle religieuse qu'à une règle juridique ? Pourquoi croit-on plus à une fetwa qu'à une règle ou une loi bien déterminée ?" . Face à ces questions, Ali El Kenz a attribué ce genre de comportements à un "conflit" entre le savoir et le religieux, ou entre le mythe et la raison, causé principalement par "un filet de traditions contradictoires" dans lequel les musulmans se sont pris. Aussi, pour l'intervenant, les communautés musulmanes ont changé de statut social et de posture, notamment avec l'apparition des nouvelles technologies de l'information et de la communication, car, a-t-il expliqué, "les musulmans ne se voyaient pas auparavant à travers le monde mais, plutôt, ils s'imaginaient". Il a ajouté, dans le même sillage, que "la présence musulmane est en train de gagner en visibilité dans le monde occidental (Europe et en Amériques " suite aux naissances des musulmans, issus de l'immigration, ce qui fait que les musulmans "sont à la recherche de nouvelles traditions dans la religion, des traditions différentes à celles léguées par les aïeuls", explique le sociologue. A cet égard , M. El Kenz a suggéré l'instauration d'un système séculier dans les pays musulmans, et non un système laïc, car, a-t-il souligné "le mot laïcité est un mot surchargé à connotation française, l'un des plus grands pays colonisateurs, et il est plein de confusions, donc il faut le rejeter". Il a cité, dans ce sens, le "Traité décisif" d'Averroès qu'il a présenté comme "le fondement institutionnel et politique de l'Etat séculier, qui assure la pratique religieuse et promeut l'activité politique et scientifique", précisant que "l'Europe doit beaucoup au monde musulman en terme de savoir et de philosophie". Concernant le dialogue des civilisations et des religions, le sociologue a déploré "un manque de lieux de discussions civiles" entre les gens de toutes les catégories, qui contribueraient, a-t-il dit, "à la création de ce tissu qui va rendre possible ce parallélisme entre les croyances et amener leur coexistence".