Les commerçants de l'Algérois ne ratent aucune occasion pour relancer la spéculation de plus belle. Ainsi à l'occasion de l'Aïd les marchands de légumes n'ont pas raté cette occasion pour augmenter les prix, en raison de la forte demande de certains produits. Aux marchés de Bab El Oued, Dely Brahim et Kouba, le kilogramme de navet, ingrédient de base de la "rechta", ce plat algérois prisé durant l'Aïd, varie entre 160 et 240 DA, la courgette oscille entre 160 et 180 DA, la pomme de terre atteint 70 DA, la carotte 100 DA et la laitue 180 DA, sachant que les prix de ces produits durant les derniers jours de ramadhan variaient entre 20 et 80 DA. La baisse de l'offre est essentiellement due à la fermeture de la majorité des marchés de gros et de détail durant les jours de l'Aïd. Loin de la flambée des prix des légumes, les odeurs alléchantes de la viande grillée attirent les passants au niveau des différentes rôtisseries de la capitale qui enregistrent une grande affluence durant l'Aïd. Nadia, femme active, estime que "l'Aïd doit être un jour pour l'échange de visites familiales et de loisirs pour les enfants et non pas un jour où on passe toute la journée devant les fourneaux. Voilà pourquoi je préfère acheter de la viande grillée et faire plaisir à mes enfants". L'autre activité commerciale qui permet aux commerçants de réaliser des profits durant l'Aïd est la vente des différents jouets aux enfants. Ces commerçants squattent les trottoirs pour exposer ballons colorés, poupées, pistolets en plastique et autres jouets qui font le bonheur des enfants, faute de les vendre au niveau de centres commerciaux, fermés en ces jours de l'Aïd. Les photographes quant à eux ne sont pas mieux lotis, car la plupart des Algérois possèdent un appareil photo ou une camera et prennent eux-mêmes leurs photos souvenirs. "Avant, il y avait une longue file de clients devant nos magasins mais avec les prix accessibles des appareils photos et des cameras, les Algériens prennent eux-mêmes leurs photographies à la maison et viennent nous voir pour le tirage", a souligné un photographe à Kouba. Un autre photographe d'un quartier populaire dira qu'il n'a pas pu déjeuner, en raison du nombre important de clients venus se photographier. "C'est une double fête pour moi, car je gagne sept à huit fois plus que les autres jours de l'année", a-t-il ajouté en exposant les ballons déposés à l'occasion pour attirer les enfants. Même si cette activité a régressé par rapport aux années précédentes, il reste toujours des Algérois qui se rendent durant l'Aïd chez le photographe pour prendre des photos souvenirs. Néanmoins l'Aïd est aussi pour certaines professions synonyme d'abnégation au travail. Qu'ils soient médecins, infirmiers, policiers, agents de la Protection civile ou autres, ils sont à leurs postes de travail durant les deux jours de l'Aïd et assurent la permanence, au moment où la plupart sont entourés de leur progéniture et de leurs parents autour d'une table bien garnie de gâteaux. "En venant ici à l'hôpital j'ai laissé mes deux enfants endormis. C'est leur père qui doit s'occuper d'eux", a confié Zohra, médecin à l'hôpital Mustapha Pacha. Regrettant un peu de ne pouvoir admirer ses enfants joliment habillés avant de sortir jouer avec leurs copains, Zohra note qu'en choisissant le domaine de la médecine, elle savait elle serait confrontée à ce genre de situations. "Dieu merci, mon mari est compréhensif", dit-elle. "Mes parents sont allés ce matin au bled pour rendre visite aux grands-parents", indique une jeune infirmière à la maternité de Belfort (El Harrach) qui n'a pas manqué de ramener avec qu'elle une assiette de gâteaux à ses collègues, histoire de leur faire déguster ce qu'elle a préparé. "J'aime mon métier et je ne me vois pas faire autre chose. J'ai toujours travaillé les jours fériés, car je n'aime pas rester oisive. En outre, la vie humaine est très chère et mérite que l'on se sacrifier pour la sauver". Rencontrés à un barrage à Alger, des policiers ont affirmé qu'ils accomplissaient leur devoir d'assurer la sécurité des personnes et des biens même si, bien sûr, leurs familles leur manquaient. "Nous sommes mobilisés pour permettre à la population de circuler et célébrer l'Aïd en toute quiétude", souligne un officier de police, avant de relever, avec une note d'humour, que "le métier de policier n'est pas différent de celui de journaliste". "On ne peut pas tous fermer boutique. Il faut bien que certains d'entre nous travaillent pour satisfaire les besoins des ménages et, surtout, des enfants qui viennent acheter toutes sortes de bonbons et de jouèts", commente un commerçant qui a ouvert son magasin après s'être rendu au cimetière pour se recueillir à la mémoire d'un proche.