Les bureaux de poste sont à sec. Assaillis par une pléthore de pères de familles mis à mal par les dépenses qu'incombe l'approche des fêtes, les guichets, à court de liquidités, n'arrivent plus à répondre à la demande. Mis au banc des accusés par les citoyens en colère, les responsables d'Algérie Poste ont renvoyé la balle à la Banque centrale. Afin de faire face à cette crise, inédite depuis l'indépendance du pays, la Banque d'Algérie a décidé de recourir à la planche à billets et de doubler ses capacités de production en monnaie fiduciaire. Néanmoins, une question se pose : en injectant une masse d'argent liquide dans le circuit monétaire, cela ne risque-t-il pas d'aggraver l'inflation déjà galopante ? Une interrogation que nous avons soumis au regard expert de l'économiste Abdelmadjid Bouzidi. Celui-ci balaye d'un revers de la main cette hypothèse, estimant que si "la Banque d'Algérie a décidé d'accélérer la production de monnaie fiduciaire, cela restera dans le respect des normes de circulation de la masse monétaire". Il estime que "la Banque d'Algérie est une institution financière très monétariste et suit une politique monétaire très rigoureuse", d'autant plus que le marché algérien est, selon lui, "un marché surliquide". M. Bouzidi évoquera, dans ce sens, les surliquidités enregistrées au niveau des banques publiques (celles-ci s'élèvent à plus de 1 100 milliards de dinars, selon le bilan de la Banque d'Algérie, ndlr), ainsi que les liquidités du Fonds de régulation des recettes. L'expert estime, d'ailleurs, que la crise de liquidités qui a marqué récemment le marché monétaire "est surtout liée au retard pris par la Banque d'Algérie dans l'opération de remplacement des billets usagés", entamée il y a quelques mois. Selon notre interlocuteur, "si la Banque d'Algérie augmente aujourd'hui ses capacités de production en monnaie fiduciaire, c'est surtout pour accélérer l'opération de remplacement des vieux billets". Commentant les récentes déclarations du gouverneur de la Banque d'Algérie attribuant la crise des liquidités au poids du secteur informel, Abdelmadjid Bouzidi indique qu'effectivement "une partie de la masse monétaire en circulation n'est pas bancarisée. Or, il n'est pas question pour la Banque d'Algérie de produire de la monnaie fiduciaire pour couvrir les masses qui échappent au circuit bancaire" et d'ajouter que cela "n'est pas orthodoxe". M. Bouzidi a également rejoint l'avis du ministre des Finances, qui a récemment déclaré que l'application prochaine (au mois de mars 2011, ndlr), du décret imposant les moyens de paiement par monnaie scripturale pour toutes les transactions dont le montant dépasse les 500 000 DA, devrait réduire la tension sur le liquide. Il soulève, néanmoins, une question sur la capacité de réaction des banques par rapport à cette perspective, estimant que les moyens de paiement au niveau des banques sont archaïques et pourraient ne pas suivre l'évolution du marché. L'expert considère, d'ailleurs, que "la décision des pouvoirs publics est audacieuse", vu la structure actuelle du marché.