N'y a-t-il pas une contradiction flagrante entre les objectifs poursuivis par le démantèlement des barrières tarifaires et le fait que soit soutenu par les pays industriels que les échanges commerciaux favorisent le développement dans le contexte où il est connu que ce démantèlement aggrave les vulnérabilités de l'industrie déjà embryonnaire des pays en développement ? Dans les conditions où se préparent les batailles économiques, aussi bien les vainqueurs que les vaincus sont connus d'avance. Les vainqueurs sont fatalement les exportateurs des pays développés ainsi que les importateurs des pays en développement, des importateurs privés bien entendu, depuis la fin des monopoles exercés par le secteur public, puisque dans toutes les économies libérales cela est du ressort du secteur privé. Quel champ de bataille ? La zone de libre-échange bien entendu. Une concurrence saine alors qu'elle va être menée (elle l'est déjà) comme une guerre économique, une guerre qui n'intègre pas de cessez-le-feu, menée jusqu'à la ruine de l'un des adversaires, une ruine fatalement génératrice d'un chômage de masse. Comment croire que les vainqueurs et les vaincus ne sont pas connus d'avance, alors que les règles du jeu international en matière d'économie de marché ne sont pas faites en collaboration active avec les pays en développement ? Ce sont les forts qui ont décidé de la forme avec laquelle sera engagé le combat et ce sont également les forts qui ont fait le choix des armes. Les pays en développement savent pourtant ce qui les attend, tandis que les pays développés savent très bien à quel risque ils exposent leurs partenaires du Sud. Ce sont bien les pays développés qui imposent le désarmement de leurs futures victimes. Comme dans une guerre qui s'annonce, ils imposent l'abaissement et même la suppression des barrières de défense douanière pour qu'ils ne rencontrent pas de sérieuse résistance. Quel pays en développement ne sait pas qu'il risque d'être amené à fermer ses propres entreprises qu'il a eu du mal à mettre en place ? On dit que l'Afrique a besoin de développement durable pour préserver les intérêts des générations futures. Mais, on joue sur les mots. Il faudrait d'abord que les conditions de développement soient réunies pour qu'on puisse penser à son caractère "durable". Rattraper le retard sur les économies développées ? Il ne faudrait même pas l'envisager comme possible.