Quand nous critiquons l'action économique du gouvernement, et il faut bien sûr critiquer, la question se pose de savoir quels seraient les repères doctrinaux qui baliseraient ces critiques. Par rapport à quel système économique faudrait-il formuler ses critiques, ou ses évaluations. Comment faire fonctionner une politique économique libérale dans un pays pas tout à fait prêt à entrer dans un environnement international à forte concurrence et préserver nos chances de disposer d'une industrie nationale dans un contexte où le processus de privatisation ne va pas emprunter une voie à grande vitesse ? Autant de questions qui mériteraient bien des réponses de la part de ceux qui aspirent à accéder au pouvoir pour appliquer leur programme économique. Comment la faire fonctionner quand notre économie se trouve encore sur la passerelle qui rejoint les deux rives, celle de l'économie dirigée de laquelle nous nous éloignons laborieusement et celle de l'économie de marché qui est encore difficile à atteindre dans le court terme. Les réformes économiques globales et l'adaptation des mentalités participent à cette transition. Sommes nous dans une situation où le nombre d'emplois à durée indéterminée est inférieur à celui à durée déterminée, d'où la précarité qui menace une grande partie des populations ? Les syndicats existants parlent de pouvoir d'achat lié aux salaires tandis que l'organisation syndicale liée aux partis du pouvoir parle plutôt du pouvoir d'achat à approcher globalement, ce qui est normal, car les prix en sont une composante. De toute façon, les émeutes autour de revendications socioéconomiques et non pas du tout politiques, sont à prendre au sérieux car elles ne concernent pas certainement le pouvoir d'achat que procurent les emplois. Dans la situation actuelle où on parle de plus en plus de la nécessité de mettre le pays à l'abri d'une explosion politico-social et dont certains disent que celle-ci pourrait s'élargir et s'approfondir, à l'exemple du cas Tunisien, des actions pouvant redonner l'espoir sont une urgence. Les syndicats prennent la défense des travailleurs et tout le monde oublie qu'une part importante des manifestants est constituée par des chômeurs. Pourquoi ne devrait-il pas arriver que des manifestations amènent les autorités et parmi elles, les plus hautes, à recevoir les plaignants, à les écouter et à engager un dialogue, ou plutôt des négociations, autour de propositions à étudier en vue de trouver des solutions concertées sur une nouvelle politique de création d'emplois ? Il est quand même paradoxal que les partis politiques ne développent pas de discours sur le chômage, sur l'emploi alors que ce sont pratiquement les personnalités, réputées non-partisanes et qui avaient exercé des misions de pouvoir qui en parlent le plus. Acceptable pour les partis de l'alliance qui peuvent affirmer que ce que fait le gouvernement représente leur stratégie en la matière. Les partis de l'opposition n'en parlent même pas, sauf pour dire que la politique mise en œuvre ne réussira pas. Cependant, ils disent tous que la priorité est celle de la mise en œuvre d'une politique très active d'aide au petites et moyennes entreprises. La catégorie des populations qui n'accèdent pas à un emploi plus particulièrement stable et qui pourraient sortir d'une certaine façon de la précarité n'est pas intégrée dans les négociations, ou plutôt dans les rencontres tripartites.