Quinze ans après l'accord de Barcelone, la convergence tant espérée entre pays méditerranéens et Union européenne n'a pas vraiment atteint le rythme attendu et nécessaire. Concernant les échanges de biens, les barrières tarifaires et non tarifaires sont encore bien trop imposantes et un long chemin reste à parcourir pour libéraliser les services, notamment ceux liés à la mobilité des personnes. Peur d'ouvrir ses frontières et de voir son marché national sabré par des produits étrangers moins chers ? Freins politiques ou administratifs ? L'intégration profonde entre l'Europe et les Etats de la Méditerranée tant souhaitée en 1995 reste à mi-chemin. Une des raisons sans doute au fait que la part de l'Europe dans le commerce méditerranéen a régressé ! Les pays du sud de la Méditerranée n'ont pas connu le décollage économique. Système trop complexe, évolution inégale et désintérêt des entreprises européennes ont handicapé la construction du grand marché économique entre les deux rives, estime-t-on. "A l'exception des biens manufacturés, nous constations un ralentissement des échanges avec l'Union européenne, au moment même où la Chine prend de l'importance. Cependant, il ne faut pas être totalement pessimiste car nous sentons tout de même une amorce de montée en gamme des produits fabriqués. Cette amélioration de la qualité des produits doit se poursuivre avec une mise à niveau du système productif, créateur de valeur ajoutée, et un positionnement sur des niches (habillement, électronique, aéronautique…). L'incapacité des jeunes diplômés à trouver un emploi s'explique par l'inadaptation du système productif", constate Nathalie Roux, chercheur au Centre de recherche en développement économique et Finance internationale (DEFI). Contributrice au rapport annuel publié par le Femise "Le partenariat euro-méditerranéen à la croisée des chemin ", l'économiste met en évidence plusieurs explications à l'échec du processus de Barcelone. "La protection des industries locales, s'effectue à travers le maintien des barrières tarifaires et, de manière plus discrète, avec des barrières non tarifaires qui n'ont pas été intégrées au processus de Barcelone", explique Nathalie Roux. Une attitude regrettable selon elle, puisqu'elle permettrait aux pays méditerranéens d'améliorer leurs processus de production et de se positionner sur le plan international avec des produits conformes aux normaux du marché. Les règles d'origine sont également un frein et la signature d'accords bilatéraux pourraient résoudre ce handicap. Pour y parvenir, les pays méditerranéens doivent prendre l'habitude de commercer entre eux. La libéralisation des services est également la pierre d'achoppement, que ce soit dans les secteurs de la finance ou des télécoms. En matière agricole, le frein aux importations en Europe de fruits et légumes cultivées au Maghreb bloque tout mécanisme de convergence. Pour les pays du Maghreb la tendance est que les investissements prennent plutôt le chemin de l'Est : "La Méditerranée est partagée entre un passé mythifié et un présent déprécié", estime, pour sa part, un expert de la région. Pour lui, la réussite du processus euromed ne porte que sur des aspects macroéconomiques. En effet, argument-il, "si le principe même du partenariat devait aboutir à une convergence, à la prospérité partagée, cette convergence ne s'est en fait concrétisée que sur le plan macroéconomique". Une chose est sûre, l'Europe va devoir accepter de faire sauter des verrous et laisser entrer l'orange maltaise, les dattes, les tomates cultivées dans les pays méditerranéens, estime-t-elle.