Les records atteints par les prix des produits alimentaires sur les marchés mondiaux accentuent la pression sur les agences de l'ONU qui apportent une aide alimentaire à près de 100 millions de personnes dans le monde. Selon la directrice du Programme alimentaire mondial (PAM), Josette Sheeran, "la flambée des prix alimentaires est une réalité pour le monde entier, mais elle n'a pas le même impact sur les populations les plus pauvres et les plus vulnérables''. Et d'ajouter que pour les ménages qui sont déjà dans la subsistance, cette situation se traduit par une hausse de la malnutrition, une diminution des revenus à consacrer à la scolarisation ou la santé et un risque d'instabilité avec des "émeutes de la faim" dans les pays les plus touchées. Si les prix restent à leur niveau actuel ou s'ils continuent d'augmenter pendant l'année à venir à cause de conditions météorologiques défavorables, d'inondations, de sécheresses ou d'incendies, le PAM sera confronté à un grave déficit budgétaire imposant certaines décisions identiques à celles prises en 2008 lors de la crise alimentaire mondiale: réduction des rations individuelles, réduction du nombre de bénéficiaires de l'aide alimentaire internationale, recherche urgente de nouvelles ressources. "Nous sommes en alerte rouge et en train d'évaluer nos besoins et de revoir nos plans, tout en nous tenant prêts", a poursuivi la chef du PAM, avant d'expliquer que l'agence onusienne planchait sur un plan d'action permettant des achats tôt et rapides de denrées alimentaires et la constitution de réserves. En 2010, le PAM a réussi à acheter des denrées quand leurs prix étaient relativement bas, limitant ainsi l'impact de l'envolée des prix sur son budget. L'agence indique toutefois que chaque augmentation de 10% des prix des aliments contenus dans son panier de référence, représente un surcoût de 200 millions de dollars par an. Le plan d'action en cinq points établi par le PAM pour aider les pays confrontés à la hausse des prix et assurer un approvisionnement stable aux populations les plus vulnérables prévoit de renforcer encore les achats de denrées alimentaires en avance et de développer des réserves régionales permettant au PAM de disposer de stocks accessibles rapidement en cas de crise. Le PAM demande aussi le renforcement des engagements pris lors du Sommet de Rome sur la sécurité alimentaire de 2009, prévoyant notamment l'exonération des taxes et autres restrictions existantes quand il s'agit d'aide humanitaire. Il propose aussi la création d'un mécanisme multilatéral destiné à améliorer l'analyse et l'anticipation des fluctuations des prix des denrées alimentaires, ainsi que la transparence des marchés mondiaux des denrées alimentaires. Selon le PAM, ce qui n'est pas une crise alimentaire dans certaines parties du monde industrialisé pourrait être dévastateur pour 80% de la population mondiale qui vit sans filet de sécurité alimentaire et est particulièrement sensible aux variations de prix et sans moyens de résister à des prix très volatiles déterminés sur les marchés. Les analyses établies par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), l'Unicef et la Banque mondiale montrent une nouvelle hausse des prix des denrées alimentaires depuis la mi-2010, a affirmé le Coordonnateur de l'Equipe spéciale. " Le monde doit être prêt à répondre à l'impact des hausses de prix et aux chocs de l'offre sur la vie, l'alimentation et les moyens de subsistance des pauvres. Le système des Nations unies, dans son ensemble, travaille à comprendre la hausse actuelle des prix qui a déjà provoqué des difficultés, et à y répondre ", a déclaré David Nabarro, le Coordonnateur de l'Equipe spéciale de haut niveau du Secrétaire général sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire. Et d'ajouter que " nous sommes mieux préparés qu'il y a trois ans, mais la situation est plus complexe. " Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), la faim et l'insécurité alimentaire constituent déjà une crise chronique qui touche 925 millions de mal-nourris à travers le monde, dont un tiers en Afrique. De même, les prix des denrées alimentaires, à l'exception du riz, ont retrouvé leur taux record de 2008. Dans sa déclaration, l'Equipe spéciale précise que le système des Nations unies est désormais mieux à même d'" analyser ce qui arrive, d'anticiper les tendances futures et, le plus important, de coordonner les réponses de manière à protéger les moyens de subsistance des foyers, à développer des marchés alimentaires locaux et à stimuler un redressement rapide, y compris par un accroissement de la production des petits exploitants ". Le 28 avril 2008, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a mis en place une Equipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire en vue de " promouvoir une réponse unifiée au défi mondial posé par l'insécurité alimentaire, notamment en créant un plan d'action avec des priorités et en coordonnant sa mise en œuvre ". Cette Equipe, qu'il préside, est composée des responsables des institutions spécialisées, des fonds et des programmes des Nations unies, des institutions de Bretton Woods et des parties concernées du secrétariat de l'ONU. Le directeur de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAP), M. Jacques Diouf, en est le vice-président. Selon les derniers indices de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), les prix alimentaires atteignaient en moyenne 231 points en janvier, en hausse de 3,4% par rapport à décembre et le niveau le plus haut jamais atteint depuis sa création en 1990. Une autre mesure, l'indice des prix alimentaires de la Banque mondiale, a lui augmenté de 15% entre octobre et janvier et se trouve désormais à 3 points seulement du pic de 2008.