La pêche est dans tous ses états. "Les ressources diminuent. L'année dernière, la chute de production a été brutale, celle-ci était de 50 %", a déclaré, hier, le ministre de la Pêche et des Ressources halieutiques, lors d'une rencontre avec la cinquantaine de marins, mandataires et armateurs de 14 wilayas. Ces professionnels de la mer, organisés en Comité national de dialogue, sont venus manifester leurs inquiétudes et exposer leurs problèmes à la tutelle. La plate-forme de revendications concerne surtout les crédits bancaires et leur remboursement. La menace des banques plane sur la tête de ces patrons côtiers qui demandent un sursis, en plus d'un allégement et de l'espacement des échéances tout en souhaitant "la grâce" de l'Etat à travers l'effacement de leurs dettes. Il s'agit aussi de la question des délimitations des zones interdites, de la gestion des ports de pêches, de la consommation de gasoil qui peut avoisiner les 200 litre par heure pour un bateau de 850 chevaux. Le statut du marin pêcheur ainsi que sa couverture sociale et sa formation sont mis en avant par l'assemblée qui soulève aussi la question relative à l'équipement et au matériel de pêche. M. Khanafou s'est montré attentif, promettant de se pencher sur certaines questions et en référer au gouvernement concernant d'autres. Les mareyeurs posent avec acuité leurs problèmes et soulèvent un pan sur la situation que vit ce secteur primaire susceptible de générer richesse et emplois pour peu qu'une politique de pêche efficiente soit mise en place. M. Khanafou, qui tente de "comprendre" la corporation, dresse un verdict sévère en reconnaissant que "le plan de relance a été conçu et réalisé à la va-vite". Ainsi donc des décisions avaient été prises hâtivement et sans consulter les partenaires. Il révèlera que "la plupart des ports de pêche sont ensablés", estimant à cet effet, qu'"on aurait dû écouter les hommes d'expérience" et promet qu'"à l'avenir il y aura de la concertation avec les professionnels". Bien que la question du statut fut élaguée, tout comme la couverture sociale des pêcheurs qui vivent dans la précarité et l'improbabilité qu'imposent les aléas du métier, les réponses du ministre concernent surtout le chapitre des ressources dont une commission scientifique a été mise sur pied et donnera ses résultats en fin d'année, additivement au bateau scientifique le "Belkacem Grine" qui aura pour mission de sonder les profondeurs de notre littoral et établir un constat sur la situation des stocks halieutiques et de la biomasse ainsi que les raisons de la diminution des ressources. Il annoncera, par la même occasion, la création d'une police de la pêche qui sera effective prochainement. A propos du financement du fonds d'aide à la pêche et à l'aquaculture, M. Khanafou s'interrogera sur la façon et les modalités de son financement. Mais, au-delà de ces problèmes qui minent la vie de la profession mais surtout le devenir du secteur de la pêche, il y a lieu de parler des politiques de pêche menées par les pouvoirs publics et qui se sont avérées au fil de la dernière décennie néfastes pour ce secteur qui coule comme une pierre. L'Algérie qui dispose d'une importante façade maritime s'étalant tout le long des 1200 km de littoral continue à recourir à l'importation de poisson. Selon les statistiques du ministère, notre pays a importé, durant l'année 2008, quelque 18 040,562 de tonnes de poisson pour 21, 71 millions de dollars, contre 18 200,939 tonnes de poissons pour une valeur de 31, 383 millions de dollars en 2009. Durant ces deux années, l'Algérie a consommé pour 53,186 millions de dollars de poisson importé, contre une exportation pour 15, 11 millions de dollars en 2009. La population maritime a été estimée, en 2009, à 66 400 personnes et créant des emplois directs et indirects pour une flottille de 4 532, dont 15 thoniers donnant une production de 130 120 tonnes, dont 3 121,6 tonnes destinées à l'exportation. Il serait peut-être temps de réfléchir à réorganiser la filière en amont et en aval, à l'investissement dans les secteurs connexes, comme la réparation navale et fabrication de matériel de pêche et de pièces de rechange, dont la défunte Ecorep avait la charge, ainsi que la recomposition des réseaux de conservation, de distribution et de la chaîne de conservation et de transformation. L'existence de poissonneries, de pêcheries et de halles à marée contribueront à endiguer une partie conséquente du chômage. Le vœu des pouvoirs publics de sortir de la dépendance pétrolière par la relance des investissements productifs risque de sombrer et avec lui les orientations politiques du gouvernement.