Plusieurs milliers de salariés des secteurs publics et privés de différentes régions du Portugal ont manifesté, samedi à Lisbonne, contre les mesures d'austérité dans un contexte de crise politique, après l'annonce d'un nouveau plan de rigueur du gouvernement. "Salaire gelés, avenir condamné", "Le pays ne s'en sort pas avec des politiques de droite", "A chaque jour qui passe, le gouvernement ne sème que malheur", scandaient les manifestants qui se sont rassemblés dans le centre de Lisbonne à l'appel de la CGTP, la principale confédération des travailleurs portugais, proche du Parti communiste. "Précarité ce n'est pas l'avenir" et "Basta! Les travailleurs en ont marre de payer la crise", pouvait-on lire sur des autocollants arborés par certains manifestants, tandis que d'autres brandissaient des pancartes colorées proclamant: "Nous luttons parce que nous avons raison !" ou encore "non à la précarité". La CGTP n'a pas communiqué d'estimation sur le nombre de participants se contentant de souligner qu'il y avait "des milliers et des milliers de personnes". Quant à la police, refusant d'arbitrer entre les syndicats et le gouvernement lors de mouvements sociaux, elle ne communique aucun chiffre. "On a le sentiment que ces politiques sont toujours contre les mêmes. Nous voulons simplement plus de justice sociale", dit Cristina Azevedo, une jeune mère de famille qui défilait dans le cortège. "Baisse des salaires, baisse du pouvoir d'achat, gel des carrières ... les raisons d'être inquiets ne manquent pas", fait valoir de son côté Miguel Monteiro, un fonctionnaire du nord du Portugal. Outre les travailleurs, de nombreux retraités ont également participé au défilé. "Je suis ici pour soutenir cette génération aux abois", lance Idalina Raposo, une retraité du sud du pays, empoignant une statuette de la vierge d'un côté et une bougie de l'autre, afin, dit-elle, de prier pour que "ce gouvernement s'en aille". Cette manifestation, la deuxième en une semaine, témoigne de la grogne sociale grandissante face aux mesures de rigueur qui se multiplient. Samedi dernier déjà, des dizaines de milliers de personnes, mobilisés via Facebook, avaient protesté dans une dizaine de villes contre la précarité. Outre le programme de rigueur déjà en vigueur, cumulant hausses d'impôts et baisse des salaires de la fonction publique, le gouvernement a annoncé la semaine dernière un renforcement des mesures d'austérité pour garantir la réduction de ses déficits, comprenant notamment une taxation des retraites, une baisse des dépenses de santé et de certaines prestations sociales. e chef de l'opposition de centre-droit au Portugal, Pedro Passos Coelho, a affirmé samedi que le pays avait "besoin d'une aide extérieure", en dépit des dénégations répétées du gouvernement socialiste, dans un entretien publié samedi dans la presse. "Nous avons besoin d'une aide extérieure. Le Premier ministre ne veut pas le reconnaître mais le pays entier l'a déjà compris", a déclaré M. Passos Coelho au quotidien populaire Correio da Manha. "Le gouvernement a voulu créer une situation illusoire où le Portugal n'avait pas besoin d'aide, que tout allait bien et que les objectifs seraient atteints. La réalité n'est pas celle-là et moi je ne change pas la réalité", a-t-il ajouté. "L'idée que le Premier ministre a tenté de faire passer, qu'avec ce paquet de mesures nous pourrions bénéficier de l'aide extérieure de l'Union européenne mais non du FMI, est un mensonge, car le soutien de l'Union européenne présuppose un soutien du Fonds monétaire", a renchéri M. Passos Coelho. Le Portugal se retrouve actuellement dans une impasse politique, le principal parti d'opposition (PSD, centre droit) refusant d'entériner un nouveau paquet de mesures d'austérité présenté par le gouvernement à ses partenaires européens afin de "garantir" le respect de ses engagements budgétaires. Jusqu'à présent, le gouvernement socialiste, minoritaire au parlement, avait pu compter sur l'abstention du PSD pour faire adopter ses précédentes mesures d'austérité. Le chef du gouvernement José Socrates a menacé de démissionner en cas de "rejet explicite" de ce programme, dont une version plus détaillée doit être présentée et discutée au parlement avant le Conseil européen qui s'ouvre jeudi prochain à Bruxelles. R.I.