Face à la crise politique au Portugal, aux incertitudes sur l'état de santé des banques irlandaises et à ses propres difficultés à finaliser les instruments de soutien à l'euro, l'UE s'est donnée, vendredi, jusqu'à fin juin pour éteindre la crise de la monnaie unique. "Les avancées enregistrées lors du sommet européen sont, comme attendu, relativement maigres et apparaissent neutres en terme de valorisation des marchés, avec une certaine déception concernant l'Irlande", expliquent des économistes de Goldman Sachs dans une note publiée vendredi. La perspective d'un plan d'aide au Portugal, où le Premier ministre n'a pas pu faire adopter au Parlement le dernier train de mesures d'économies annoncé le 11 mars et a présenté sa démission quelques heures avant de rejoindre Bruxelles, a largement parasitée le sommet. Comme attendu, malgré la pression de ses pairs, José Socrates n'a pas formulé de demande d'aide et sa démission repousse désormais la perspective d'un appel à l'aide à dans deux mois au moins, le délai minimum requis pour organiser des élections. Vendredi, les responsables portugais ont cherché à rassurer les investisseurs en s'engageant à tenir les objectifs de contrôle budgétaire annoncés début mars, un point sur lequel ont également insisté Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. La décision a été rendue possible par un compromis trouvé pour répondre à une exigence de l'Allemagne ayant émergée ces derniers jours: elle obtient un étalement dans le temps des versements à effectuer pour financer le futur mécanisme de secours financier de l'Union monétaire. "Nous avons adopté un paquet complet de mesures économiques", a déclaré le président de l'Union européenne Herman Van Rompuy, à l'issue de la première journée d'un sommet européen à Bruxelles. Au terme de plusieurs mois de négociations, "les différents éléments du projet se sont assemblés aujourd'hui", a-t-il dit. Le Fonds de soutien temporaire pour aider les pays de la zone euro en difficulté, mis en place l'an dernier, va voir comme prévu sa capacité effective de prêt portée de 250 à 440 milliards d'euros. La question des modalités pour y parvenir, encore sujette à discussion, a toutefois été reportée au mois de juin. Un Fonds pérenne, appelé mécanisme permanent de stabilité, lui succèdera à partir de mi-2013, nécessitant un changement du traité européen. Il sera doté, lui, de 500 milliards d'euros de capacité de prêt. Cette décision était déjà actée. Pour y parvenir, il est prévu que les pays de la zone euro versent à partir de mi-2013 quelque 80 milliards d'euros en injection de capital. La chancelière allemande Angela Merkel a obtenu jeudi soir à Bruxelles un étalement dans le temps de sa contribution nationale de 22 milliards d'euros au total, car l'année 2013 sera pour elle l'année des élections législatives et elle entend soulager ses finances publiques. Il est prévu que les Etats verseront leur écot en cinq tranches égales à partir de 2013. Le reste des ressources du mécanisme sera constitué de garanties et de capital dit éligible. "En moins d'un an, l'Union européenne a réussi a créer un Fonds monétaire européen", souligne un diplomate de haut rang. Autre nouveauté: les Fonds de secours pourront acheter directement de la dette publique d'Etats en difficulté, en échange d'un programme strict d'économies. Les autres volet du dispositif anti-crise sont un renforcement de la discipline budgétaire commune, des tests stricts de résistance des banques (les résultats doivent être prochainement publiés) et un "pacte pour l'euro" promouvant les réformes économiques, la limitation de la dette, la modération salariales ou encore la convergence des politiques fiscales. Ce pacte a été mis sur pied prioritairement pour les pays de l'Union monétaire. L'Allemagne en avait fait une condition pour accepter de continuer à épauler financièrement les Etats en difficulté, y voyant une garantie de politique économique rigoureuse pour l'avenir. Mais il est ouvert aussi aux pays de l'UE non membres de la zone euro. A ce stade, seuls cinq d'entre eux ont accepté l'invitation: Danemark, Roumanie, Lettonie, Bulgarie, Lituanie et Roumanie. De nombreux autres pays d'Europe de l'Est l'ont déclinée car ils sont rebutés par l'objectif de faire converger les politiques fiscales nationales, selon une source diplomatique. L'adoption de cet ensemble de mesures a été toutefois relégué au second plan lors du sommet par la crise politique au Portugal, qui rapproche le pays d'un plan d'aide extérieur financé par l'UE et le Fonds monétaire international.