Les bouleversements que connaissent des pays arabes depuis le début de l'année sont de nature à modifier le paysage et les perspectives des marchés énergétiques mondiaux, estime le directeur de la revue Pétrole et Gaz arabes (PGA), parue vendredi. Les incidences des soulèvements populaires dans la région, conjuguées au désastre nucléaire de Fukushima suite au séisme qui a frappé le Japon, donneraient un "coup d'accélérateur" aux énergies renouvelables et inciteraient plus à trouver de nouveaux partenariats producteurs-consommateurs, selon l'éditorialiste de PGA. D'ores et déjà, la révolte dans des pays arabes et le désastre de Fukushima se sont traduits par une forte augmentation des prix, avec un Brent qui a bondit à 115 dollars le baril, et ont ravivé les inquiétudes quant à la sécurité des approvisionnements énergétiques mondiaux. Selon PGA, la part du nucléaire dans le mix énergétique mondial a été remise en cause par le désastre nucléaire japonais. Cette part représente à présent 5,8% de la consommation globale et il était estimé qu'elle passerait à 7,6% en 2035. "Il n'est pas étonnant qu'après (ce) désastre, des appels soient lancés un peu partout dans le monde pour accélérer le développement des énergies propres et renouvelables", prévient PGA, selon qui un tel changement de cap signifierait un transfert "massif" des investissements vers le pétrole et le gaz non conventionnels et vers les énergies renouvelables. Selon des estimations établies en 2010 par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les besoins mondiaux en énergies renouvelables étaient supposés bénéficier d'une progression rapide, à 7,9% par an, pour passer de 0,72% en 2008 à 4,2% en 2035 du mix global. Les dernières "convulsions politiques" dans des pays arabes sont, par ailleurs, de nature à influer sur l'investissement dans le secteur de l'énergie. Selon PGA, avant ces soulèvements, les investissements étaient estimés à 430 milliards de dollars sur la période 2011-2015, dont 330 milliards pour le pétrole et le gaz naturel, 95 milliards pour l'électricité. "Il semble à présent qu'une partie de ces investissements sera reportée ou annulée. Ceci veut dire un développement plus lent que prévu de la production et des exportations et un nouveau facteur de tension sur les prix mondiaux", analyse la revue éditée à Paris. Les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord couvrent près du tiers de la production et pas moins de la moitié des exportations pétrolières mondiales, ce à quoi s'ajoute plus d'un cinquième des exportations mondiales de gaz naturel. Parmi ces pays, la Libye, en proie d'abord à un soulèvement populaire puis l'objet depuis le 11 mars de frappes aériennes de forces occidentales coalisées, conformément à une résolution (1973) onusienne. La production pétrolière dans ce pays connaît une baisse drastique, passant de 1,6 million de barils par jour à quelques 300 000 b/j, suite aux troubles que traverse le pays depuis un mois, poussant les acheteurs à se tourner vers d'autres sources d'approvisionnement. Il faut noter qu'au niveau des marchés, les prix du pétrole se stabilisaient après l'ouverture à New York, après avoir atteint un niveau inédit depuis septembre 2008, toujours dopés par les troubles en Libye et dans le reste du monde arabe. Vers 13H15 GMT (15h15 HEC), sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de "light sweet crude" pour livraison en mai s'échangeait à 106,62 dollars, en baisse de 10 cents par rapport à la veille. Il est monté dans les échanges électroniques précédant la séance à la criée jusqu'à 107,84 dollars, son cours le plus élevé depuis le 26 septembre 2008, avant de revenir à l'équilibre. "Le pétrole continue d'être dopé par la faiblesse du dollar et les inquiétudes grandissantes concernant non seulement la Libye mais aussi Bahreïn, le Koweït, la Syrie et le Yémen", a énuméré Phil Flynn, de PFG Best. "Dans le contexte de ce qu'on appelle le printemps arabe, le marché se demande d'où viendra la prochaine perte d'offre de pétrole", a-t-il poursuivi. "Les cours poursuivent leur progression", a commenté Tom Bentz, de BNP Paribas. "Les chiffres de l'emploi aux Etats-Unis sont aussi haussiers, et même si le marché n'a pas beaucoup réagi, il y a peu de chance que cela interrompe la hausse des prix".