La 9e conférenceinternationale de l'ASPO (association des études sur le pic pétrolier), qui s'est tenue la semaine dernière à Bruxelles, en Belgique, et qui a regroupé denombreux experts et spécialistes du secteur énergétique des différentes régions du monde, a été une occasion pour relancer la question du choc pétrolier à moyen terme. De différentes thèses, remarquablement contrastées et contradictoires, ont été soulevées pour présenter, lors de cet événement, les différents scénarios auxquels sera confronté le monde entier à l'horizon 2030, l'échéance à laquelle les ressources énergétiques dans le monde entameront leur déclin, notamment les énergies fossiles, comme le gaz et le pétrole. Ainsi, de Colin Campbell à Jeff Rubin, en passant par Jean Laherrère ou Kjell Aleklett, tous ont fait part de leur analyse sur la question du pic pétrolier lors de ce rendez-vous des experts de Bruxelles, où les débats ont porté beaucoup plus sur l'avenir des énergies fossiles et des alternatives dans le monde. Ainsi, chaque expert a soutenu une thèse en fonction de l'horizon dont il est venu et, de ce fait, l'économiste, l'agronome, le politique, le spécialiste des marchés financiers et boursiers, n'ont pas forcément la même analyse du constat ni la même vision de l'avenir. Cependant, le mélange de toutes ces visions a permis de faire ressortir des éléments marquants et d'esquisser les grandes lignes de cet avenir sans le pétrole. Toutefois, il n'y a pas lieu de perdre de vue le constat évident que le pic du pétrole conventionnel est dépassé depuis 2006, tel que cela a été confirmé par des recherches et expertises accréditées par l'agence internationale de l'énergie (AIE). En conséquence, quelles que soit la croissance de la demande exprimée en pétroles et produits énergétiques, la production n'augmentera plus. La production totale de carburants liquides, incluant les biocarburants et liquides de gaz naturel est encore en faible croissance, à savoir 88 millions de barils par jour (mbj) depuis quelques mois déjà et, à court terme, cette production sera confrontée à des contraintes multiples. Les prévisions sur les capacités d'augmentation de la production donnent un plafond de 6 millions barils/jours uniquement entre 2010 et 2015, dont deux tiers sont issues de l'Opep avec 2,1 millions barils/jour supplémentaires. Ces capacités sont supposées faire face aux 3 Mb/j qu'il faudra compenser chaque année dans les gisements matures en déclin. Les prévisions du marché mondial du pétrole, présentées par Kjell Aleklett, président de l'ASPO, montrent que la courbe de production actuelle se situe entre les scénarios standard et pessimiste. Une intervention de Paul Stevens de Chatham House évoque les différents scénarios concernant l'Arabie saoudite. En effet, si le premier producteur mondial de brut continue à se développer comme il le fait actuellement, sa dépendance à l'énergie devrait le conduire à une réduction massive des exportations, allant même jusqu'à devenir importateur net en 2037. Le pic mondial de gaz devrait être atteint en 2030 et une attention particulière a été portée sur la situation en Europe. En effet, celle-ci dépend à 67% du gaz en provenance de la Russie (40%) et de la Norvège (27%). Or, la Norvège devrait atteindre son pic de production entre 2015 et 2020. La Russie, dont 50% de la production se situe sur des gisements en déclin, devrait atteindre son pic entre 2030 et 2035. Au-delà du problème de production, c'est surtout la distribution du gaz qui posera problème. En effet, le marché asiatique, avec la Chine et le Japon notamment, augmente considérablement ses importations et la Russie elle-même consomme une part de plus en plus importante de sa production. Les volumes disponibles pour l'Europe risquent de diminuer considérablement. Concernant les hydrocarbures non conventionnels, les regards ont été braqués sur le Deep Offshore, se trouvant au-delà des 500 mètres de profondeur en mer. Sur ce plan, le potentiel semble assez restreint et représente environ 5% des ressources pétrolières mondiales. Le développement des capacités de production est extrêmement coûteux avec environ 10 milliards d'euros par champ notamment parce que la plupart des opérations sont effectuées sur place, en pleine mer (production, traitement, stockage et export). Le record de profondeur est de 8 600 mètres sous le niveau de la mer.