Des essaims de criquets pèlerins pourraient infester la partie orientale de l'Ethiopie d'ici la mi-juin, si la vigilance n'est pas maintenue, a prévenu l'Organisation pour la lutte contre le criquet pèlerin en Afrique de l'Est (DLCO-EA). Abdurahman Abdulahi, chargé de recherche pour la DLCO-EA, a affirmé qu'une menace potentielle pesait sur la région éthiopienne de Somalie, dans l'est du pays, qui partage une frontière commune avec la Somalie, rapporte mercredi le réseau IRIN. En avril 2007, cette région a été confrontée à une invasion acridienne, principalement dans les districts de Denbel, Aisha et Afdem, situés dans la zone de Shinile. D'après le dernier Bulletin mensuel sur le criquet pèlerin de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), des opérations menées par voies aérienne et terrestre ont permis de traiter 296 hectares de terre en avril. "Bien que certaines zones aient été traitées, les criquets pèlerins qui ont survécu aux opérations d'épandage en avril commenceront à éclore en mai et à infester la région en juin", a dit M. Abdurahman. Il a précisé que des éclosions avaient déjà été signalées à Harewa, Mito et Hare, toujours dans la même région. Le département Protection des récoltes du ministère éthiopien de l'Agriculture et du Développement rural a envoyé une équipe à Harewa, à 45 kilomètres de Dire Dawa, pour évaluer la situation. "L'équipe d'évaluation a découvert des criquets pèlerins couvrant une surface de 900 hectares à Harewa le 3 mai et a pris des mesures de contrôle", a-t-il expliqué. M. Abdurahman a estimé qu'il n'y avait pas de menace immédiate pour les pâturages et les récoltes, mais il a prévenu que si des mesures n'étaient pas prises immédiatement pour faire face à la menace, la situation serait bien différente lorsque les essaims de criquets agiraient, au moment même où les cultures commencent à pousser. "Nous avons des informations suffisamment tôt pour qu'il soit facile de contrôler l'infestation avec nos deux avions basés à Dire Dawa", a-t-il dit. Depuis l'automne 2003, les criquets pèlerins rencontrent au Sahel et en Afrique du Nord, des conditions idéales pour leur reproduction. Les pays des zones concernées luttent contre cette invasion. En vain. La saison estivale, une fois de plus, aura été favorable à la reproduction des criquets pèlerins. Ils ont ainsi été des milliards à investir - pour la seconde année - le Sahel. Selon les estimations de la FAO (Food and Agriculture Organization of the United Nations), trois à quatre millions d'hectares ont d'ores et déjà été infestés, la Mauritanie étant le pays le plus touché avec près de 1,6 million d'hectares dévastés. Pour les populations, la menace est réelle : une tonne de ces insectes, soit une fraction d'un essaim moyen, consomme en un jour autant de nourriture que 2500 personnes ! Selon les pays, jusqu'à 40% des pâturages et 10% des cultures de légumineuses ont été ravagés. Avec l'arrivée de la saison sèche, les criquets migrent désormais vers le Maghreb. "C'est la pire des situations que l'on ait connue depuis quinze ans", affirme ainsi Annie Monard, acridologue à la FAO, "si les conditions s'y prêtent, les insectes se reproduiront dans des proportions bien plus grandes que l'année dernière". Extrêmement prolifique, l'insecte est en effet capable de multiplier ses effectifs par dix à chaque nouvelle génération ! Quelles sont donc les raisons du fléau. Vivant la plupart du temps en solitaire sur le pourtour des massifs montagneux du Sahara, le criquet pèlerin ne représente habituellement aucune menace pour les cultures ou les pâturages. Au Maghreb, de nombreux essaims suffisamment denses ont pu être traités. Mais, d'autres, trop diffus, ont échappé au traitement, si bien que l'invasion n'a pu être enrayée. Dès le début de la crise, la FAO a tenté de mobiliser les bailleurs de fonds afin de financer la lutte contre l'invasion qu'elle jugeait imminente. En février 2004, elle estimait ainsi les besoins à 9 millions de dollars. Mais ce chiffre s'élevait quelques mois après à 100 millions de dollars. Or, la FAO n'avait reçu que 2 millions de dollars ! Suite à un nouvel appel, le montant reçu au 19 octobre 2004 s'élève désormais à près de 47 millions de dollars, auxquels s'ajoutent 6 millions de dollars sur les fonds propres de la FAO. L'organisme attend encore 17 millions de dollars supplémentaires, promis par les bailleurs de fonds, et négocie encore 4,6 millions de dollars supplémentaires. Deux ans après, la lutte n'a pas encore bouclé son financement.