Après un spectacle époustouflant à la Kheima de Nedjma lors du Ramadhan dernier, et un autre en début d'année au Centre culturel algérien de Paris, (CCA), le révolté Amazigh Kateb, donne rendez-vous à ses fans, dès le 15 septembre prochain au Théâtre de verdure d'Alger, une scène qu'il connaît assez peu. Organisé par l'établissement Arts et Culture de la wilaya d'Alger, ce concert signe la permanence d'un artiste caustique dans l'arène algérienne. Après son succulent, "Marché noir ", un opus qu'il paraphait en 2009 lorsqu'il décidait son divorce avec son groupe originel, Gnaoua diffusion, Amazigh Kateb qui a depuis entamé une brillante carrière, adaptait il y a peu, un texte du poète révolutionnaire Mahmoud Derwich, le très réputé, "A ma mère". Ce produit devait d'ailleurs le conduire en Syrie pour une tournée moyenne orientale, mais les événements sécuritaires ont dû contrarier ses projets. Longues et fortes ovations pour le fils de son père, (Amazigh kateb) qui, là où il passe, fait un malheur, à travers un répertoire cru qui fustige tous les pouvoirs fallacieux et injustes. Pour le faire, il puise dans ses rythmes bariolés d'humanisme, son répertoire téméraire et impitoyable avec ceux qui sont responsables des malheurs des autres. Il a chanté, "Mossiba", "Koma", "Douga Douga" "Dima n'touma", "Bonjour", "Africain", et bien d'autres encore, qui mettent à chaque fois le public dans une formidable adhésion tant il est vrai que ce que raconte Amazigh n'est pas faux. Son arme était le guembri séculaire, son discours un rythme hérité du gnawi des esclaves africains, du rap révolté, du réggae transcendantal…et tout ça, pour dire qu'il s'inscrit de par ce qu'il fait dans un monde humain qui refuse les exils et les frontières. Parolier, musicien, interprète, Amazigh Kateb dit ce qu'il pense sans faire la moindre allégeance, tout comme le fut son père, au diktat des pouvoirs et des conforts. Libre comme un poète maudit, il fustige les injustices, traque la haine là où elle se trouve. Toujours du côté des plus faibles, le cœur à gauche, Amazigh Kateb pense que "si les femmes n'existent pas socialement, si on ne leur reconnaît pas un rôle dans la société, on ne peut rêver de révolution ou de changement". "Elles sont une charnière sociale, et la culture de par son rôle d'absorption des émotions, des sensations, a la capacité de rassembler et de favoriser cette mixité indispensable à la survie de toute société en mutation", a dit le fils de son père. Pour lui le message de l'artiste est "plus écouté que les discours politiques par le seul fait qu'il ne soit pas électoraliste". "Un artiste ne demandera pas à son public de voter pour lui, ne lui fera pas de promesse. Par contre, il prend position et appelle à une mobilisation autour d'une cause, toujours humanitaire, jamais lucrative", soutenait-il."Il est la résonance de son époque, s'il parle un langage hermétique, il risque de s'éloigner de son rôle consistant à briser le silence sur une réalité que certains préfèrent taire", ajoute Amazigh Kateb. Récemment, il avouait qu'il ne pouvait pas, en sa qualité d'artiste, "cautionner le silence et contribuer à alimenter les tabous" alors que sa mission culturelle est forcément de "piquer, de déranger, de déstabiliser et de donner à réfléchir sur un avenir commun". D'où l'intérêt dit-il, d'élargir l'espace vital de la culture, "puisqu'elle a la capacité de contribuer à cimenter la société, autour de valeurs nobles, orientées sur l'intérêt général et les priorités du peuple". Sur le rôle de la chanson engagée, cet artiste qui n'appartient pas seulement à sa terre natale l'Algérie, mais à l'Universalité, a confié que pour avoir seulement chanté la Palestine, il s'est fait "casser les jambes par les sionistes en France, attaqué de toute part et traité d'antisémite", affirmant être "antisioniste et compte le rester jusqu'à la fin de mes jours". Interrogé sur ses rêves, il affirme qu'ils "ne sont pas démesurés et qu'ils plaident tous pour l'être l'Humain, qu'il considère comme " la valeur la plus sûre dans un monde de guerre et d'ingérence calculée". Amazigh, troubadour Le sulfureux ex-leader du groupe "Gnawa Diffusion", après sa séparation d'avec la formation la plus glamour de la planète sud, Amazigh a passé une année à traîner la savate un peu partout, histoire de changer d'air (de musique), de faire des rencontres, batifoler entre l'Afrique, l'Europe et l'Amérique latine pour en récolter le pollen de ses chansons. C'était en 2009 qu'il revenait avec, " Bush méte" (Bush est mort), une chanson célébrant la fin d'un prédateur et la naissance, pour ainsi dire, d'un nouvel Amazigh. Mais la "mort" de Bush n'était qu'un prologue à un nouvel album solo qui sortait le 17 octobre de la même année. Depuis 2010, Amazigh Kateb travaille sur un nouveau chantier dont la sortie est prévue pour janvier 2012. Fonceur, surnommé "Ras el-Kebch" - tête de bélier - par ses amis, ce musicien né en 1972, porte l'Algérie à "dos d'âme " et s'affirmera comme le "Che Guetara", guitare en franc arabe algérien. "Je poursuis le combat de mon père. Lui, c'était la littérature, moi, " le rock'" n' roll. Et j'élèverai mes enfants dans cette même révolte ", a-t-il dit. Pour Amazigh Kateb, Marché noir est "une insomnie en forme de manifeste : un manifeste pour l'amour, la révolution, le rire, la danse, la sueur et la résistance. Il correspond à un besoin de faire le bilan humain et artistique de vingt ans d'exil et de deuil, de route et de scène, de solitude et de collectif", avec des compagnons de voyage qui s'appellent Mohamed Abdennour (mandole, banjo et guitare), Amar Chaoui (percussion), Mehdi Ziuouech (synthé), DJ Boulaone (scratch) et Samuel Flament alias Kweezy Doctor.