Les Européens s'en remettent aux Etats-Unis pour relancer la croissance en panne, tandis que Washington attend, en retour, que la zone euro rétablisse un minimum de confiance sur les marchés: telle semble être la répartition tacite des tâches au sein du G7. Alors que les dernières réunions des grandes puissances avaient fait du désendettement la première priorité, la déclaration finale des ministres des Finances des pays riches du G7, ce week-end à Marseille (sud de la France), a redonné cette place de choix à la croissance. Comme au plus fort de la crise de 2008-2009. Face au "ralentissement de la croissance mondiale", les Etats-Unis, le Japon, l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Italie et le Canada sont "décidés à apporter une réponse internationale forte et coordonnée", que leur déclaration ne le dit pas. Tout juste salue-t-elle le "plan substantiel" de 447 milliards de dollars annoncé par Barack Obama "pour renforcer la croissance et l'emploi" aux Etats-Unis. Et en marge de la réunion, les dirigeants européens ont tous redit qu'ils donnaient, eux, la priorité à l'assainissement des finances publiques et à la poursuite de leurs plans de rigueur. "Les Européens s'en remettent aux Américains en ce qui concerne le soutien à la croissance", estime le directeur du centre de réflexion européen Bruegel, Jean Pisani-Ferry. "En Europe, les pays ne sont pas du tout dans la même logique." Interrogé sur la part que pouvait prendre le Vieux Continent dans la réponse "forte et coordonnée" en faveur de la croissance, un membre d'une délégation européenne a d'ailleurs botté en touche en mentionnant les "sources externes" qui peuvent soutenir l'activité en Europe. Autrement dit, le plan Obama comme principale planche de salut. Alors que les appels se sont multipliés ces derniers jours en faveur d'une action de relance de l'économie, un délégué relève que les Etats-Unis étaient "les plus réceptifs à ce message". "Ils ont une marge de manoeuvre, à condition de présenter d'ici la fin d'année un plan de consolidation budgétaire crédible à moyen terme", explique-t-il. En contrepartie, Washington presse la zone euro de mettre de l'ordre chez elle pour rétablir la confiance sur les marchés financiers après des semaines de dégringolades en série. "C'est très important pour le monde que les Européens fassent ce qu'il faut, qu'ils fassent en sorte que les pressions, les problèmes auxquels ils sont confrontés, ne se répandent pas, ne s'ajoutent pas aux pressions sur l'économie mondiale", a ainsi lancé le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner. Selon un haut responsable américain, les Européens gagneraient aussi en crédibilité s'ils étaient capables de parler d'une seule voix - ce qui n'a pas été souvent le cas depuis le début de la crise. Pour autant, compter sur la relance américaine ne suffira peut-être pas à sortir la faible croissance européenne de l'ornière. "Le plan Obama peut plutôt aider l'Europe", dit Jean Pisani-Ferry. Mais selon Cédric Tille, de l'Institut de hautes études internationales de Genève, "penser que l'Amérique peut seule tirer la croissance européenne, c'est un mauvais calcul". Selon ces deux économistes, les pays de la zone euro qui en ont les moyens et dont les finances publiques sont à peu près solides doivent aussi contribuer à l'effort. "Les Allemands pourraient faire quelque chose", assure Cédric Tille. L'Allemagne "est la seule qui a des marges de manoeuvre, elle pourrait sans mettre à mal sa crédibilité budgétaire ralentir sa marche pour réduire les déficits", renchérit Jean Pisani-Ferry. A Marseille, le ministre allemand des Finances a toutefois clairement opposé une fin de non recevoir.