Une délégation de parlementaires russes a entamé, avant-hier, une visite en Syrie pour vérifier les faits sur le terrain et tenter de lancer un processus de dialogue entre le régime et l'opposition, après six mois de contestation populaire du président Bachar al-Assad. Entretemps l'opposition tente de s'organiser face au régime qui continue de réprimer la révolte dans le sang, avec la mort de deux civils tués par des tirs des forces de sécurité lors de perquisitions dans le gouvernorat d'Idleb (nord-ouest), selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). La délégation russe va rencontrer le président Assad, un allié de Moscou, ainsi que des opposants au cours de sa visite de quatre jours, ont indiqué les agences syrienne Sana et russe Interfax. Selon Mikhaïl Marguelov, représentant spécial du président russe Dmitri Medvedev, la délégation doit éclaircir les faits, afin de voir sur place ce qui se passe vraiment, alors que le régime Assad ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation et impute les violences à des groupes terroristes. Les médias étrangers ne sont pas autorisés à circuler librement en Syrie. La Russie est opposée à toute ingérence extérieure dans les problèmes de la Syrie et est prête à aider autant qu'elle le peut au dialogue interne qui doit avoir lieu dans une atmosphère pacifique, sans victimes, a dit le vice-président du Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement russe), Ilias Oumakhanov. Aucune précision n'a été donnée sur la date de la rencontre avec le président syrien, ni quelles forces d'opposition la délégation russe comptait rencontrer. Moscou est opposé au départ de M. Assad et bloque au Conseil de sécurité de l'ONU toute résolution, voulue par les Occidentaux, condamnant la répression meurtrière menée par son régime. Mercredi, un haut responsable russe avait affirmé que les organisations terroristes risqueraient de s'imposer en Syrie si le régime du président Assad tombait. M. Medvedev avait pour sa part estimé qu'au sein de l'opposition syrienne il y avait des extrémistes et des terroristes, et jugé que des pressions supplémentaires sur le régime syrien n'étaient pas nécessaires. Au moment où l'opposition syrienne essaye de se structurer mais sans grande cohérence dans l'immédiat, à Paris, des partis d'opposition ont lancé une coalition prônant l'instauration d'un Etat laïc en Syrie afin de contrer, selon eux, l'influence des islamistes qui sont bien organisés. Il s'agit de montrer qu'il n'y a pas que les islamistes, les fanatiques, il y a nous aussi, a déclaré Bassam al-Bitar, un chrétien syrien membre d'Alenfetah, un parti basé à Washington. Chrétiens assyriens ou syriaques, musulmans sunnites kurdes ou arabes, tous laïcs, une quarantaine d'opposants venant de Washington, de Berlin, du Qatar ou de Norvège planchent au sein de la toute nouvelle Coalition des forces laïques et démocratiques syriennes (CFLD). Deux autres instances de l'opposition ont récemment vu le jour en Turquie: le Conseil national créé fin août à Istanbul et qui, selon les laïcs, est majoritairement composé d'islamistes. Il a dévoilé jeudi une partie de la liste de ses 140 membres. Le Conseil national de transition syrien, né fin août à Ankara, est lui dirigé par l'une des personnalités les plus en vue de l'opposition syrienne en exil, Burhan Ghalioun, reçu, avant-hier, au ministère français des Affaires étrangères. M. Ghalioun a demandé à la CFLD de mettre la question de la laïcité dans le contexte de la révolution, une manière de l'appeler à ne pas se tromper d'ennemi et à arriver à une opposition unifiée. Par ailleurs, près de 300 opposants se sont réunis dans la journée près de Damas pour discuter des moyens de trouver des issues à la crise en Syrie. Ils se sont réunis sous la devise non à l'ingérence étrangère, à la violence, au confessionnalisme, ont indiqué des organisateurs. Dans une allocution, l'écrivain et opposant Michel Kilo a appelé à l'unification des rangs de l'opposition et exprimé sa confiance dans la génération des jeunes. En Syrie, les manifestations se poursuivent, les militants ayant affiché leur détermination à poursuivre le mouvement de contestation jusqu'à la chute du président Assad. Lancement à Paris d'une coalition de partis d'opposants laïcs Une coalition de partis d'oppositions syriens laïcs a été officiellement lancée, avant-hier, à Paris par une dizaine de formations musulmanes et chrétiennes, arabes et kurdes, qui ont appelé l'ensemble des minorités en Syrie à soutenir la lutte contre le régime de Bachar al-Assad. Ces formations : assyrienne, syriaque, kurde, sunnite, laïque, ont créé la Coalition des forces laïques et démocratiques syriennes (CFLD), embryon d'une opposition syrienne de l'extérieur, laïque et démocratique, ont-t-ils indiqué. Leurs membres venus des Etats-Unis, d'Europe ou du Proche-Orient, se sont réunis, hier et avant-hier, dans un grand hôtel parisien. La Syrie de demain doit être pluraliste et pas dominée par les islamistes, a lancé la porte-parole de la coalition Randa Kassis, membre du parti Hadatha. Nous devons travailler ensemble à faire tomber ce régime qui a torturé, exilé, tué, a-t-elle martelé. Plus de six mois après le début de la contestation populaire en Syrie violemment réprimée par les forces armées syriennes, l'opposition syrienne n'a toujours pas réussi à s'unifier. Elle est divisée entre opposants de tendance islamiste, souvent proche des Frères musulmans, et opposants laïcs. Des lignes de fracture existent également entre Kurdes et Arabes, ainsi qu'entre chrétiens et musulmans. Laïcs et islamistes n'arrivent pas à se mettre d'accord pour l'instant, c'est un processus lent, mais il y a des éléments des deux côtés qui peuvent réussir à faciliter le dialogue, a estimé Bassam a-Bitar, membre d'Alenfetah, parti basé à Washington. Il s'agit de montrer qu'il n'y a pas que les islamistes, les fanatiques, il y a nous aussi, a-t-il ajouté. La CFLD a aussi appelé les minorités syriennes à s'unir contre le régime alors qu'en Syrie, les minorités chrétienne et kurde notamment hésitent à se joindre au mouvement de contestation par peur des représailles du régime et de l'arrivée d'islamistes au pouvoir. Nous encourageons les minorités religieuses à participer à la révolution syrienne, a déclaré Bassam a-Bitar. C'est le moment d'unifier toutes nos forces, a renchéri Randa Kassis, membre du parti Hadatha. Cette coalition laïque apparaît alors que deux conseils de l'opposition ont vu le jour en Turquie. Le Conseil national de transition syrien, dirigé par Burhan Ghalioun, une des personnalités les plus en vue de l'opposition en exil, est né fin août à Ankara. Ce dernier a appelé, avant-hier, à Paris les opposants à mettre la question de la laïcité dans le contexte de la révolution, manière de les appeler à ne pas se tromper d'ennemi et à dialoguer avec les islamistes pour arriver à une opposition unifiée de nature à renverser le régime du président syrien. Un Conseil national s'est de son côté réuni jeudi à Istanbul où il a dévoilé une partie de la liste de ses 140 membres tout en reconnaissant qu'il ne pouvait pas prétendre représenter à lui seul la révolution. Les partis laïcs estiment que les islamistes sont majoritaires dans cette instances.