Du 16 au 25 octobre prochain, le "Maghreb des films" propose " Au nom de la mémoire ", une kyrielle d'activités artistiques qui coïncide avec la date macabre, du 17 octobre1961. Pas moins de sept longs métrages, entre fiction et documentaires; quatre courts métrages ainsi qu'une série de clips, seront projetés aux trois Luxembourg et au Forum les Images à cette date là et le lendemain, même. En plus de ces projections, une série d'hommages seront rendus entre autres à la cinéaste, Selma Baccar, Nacer Khemir, Izza Genini et Moumen Smihi. Le clou de " Maghreb des films" qui boucle à peine cette année, trois ans d'âge, c'est incontestablement la projection du film documentaire "Octobre à Paris", de Jacques Panijel (1962 - 70'). Organisé par l'association Coup de soleil, "Maghreb des films" a vu le jour 17 ans après, " Le Maghreb des livres ", un autre rendez-vous important qui rassemble énormément de créateur méditerranéens, vivant au Maghreb ou, Outre-mer. Le public ira à l'occasion de cette troisième édition, à la rencontrent de pas mal de films qui raconte le tragique, 17 octobre 1961, dont "Ici, on noie les Algériens" de Yasmina Adi (2011- 90'), "Nuit noire, 17 Octobre 1961", de Alain Tasma (2005-108'), "17 Octobre 1961, dissimulation d'un massacre", de Daniel Kupferstein (2001-52') etc…. Les projecteurs de ce rendez- vous se tourneront certainement, sur le sulfureux, "Octobre à Paris" de Jacques Panijel. Longtemps censuré comme le fut "La Bataille d'Alger" de Ponte Corvo, la sortie de ce film fut enfin avalisée pour le 19 octobre prochain, soit exactement un quart de siècle après la tragédie qu'ont vécue les algériens, le 17 octobre 1961. Sorti en 1962, ce film de 70 minutes était visible en 2000 au festival du film maudit. L'œuvre raconte le massacre des Algériens le 17 Octobre 1961 à Paris. Une page sombre de l'histoire qui rappelle que la police de Papon, par une nuit cauchemardesque, jetait plusieurs dizaines de pacifiques algériens qui ont bravé le couvre-feu imposé en France, dans la Seine. A l'occasion du 49ème anniversaire de ces sinistres événements, le Centre culturel algérien de Paris (CCA) que gère l'écrivain algérien Yasmina Khadra projetait d'ailleurs, un déchirant film documentaire intitulé "17 octobre 1961, dissimulation d'un massacre" du réalisateur français Daniel Kupferstein. " Ce fut un véritable festival de mensonges, d'erreurs et d'intoxication dans la presse française au lendemain des massacres du 17 octobre 1961, à Paris ", raconte le journaliste René Dazy qui a vu tellement de sauvagerie se déployer ce jour là, qu'à son retour à la rédaction, il vomit. Ce témoignage accablant est d'ailleurs cité dans ce documentaire d'une poignante vérité. La projection a eu lieu dans le cadre d'une rencontre-débat avec l'écrivain J.L Einaudi, organisée à la veille de la commémoration des massacres perpétrés en cette date par le préfet de police Maurice Papon et sa police auxiliaire contre une manifestation pacifiste d'Algériens. Ce film documentaire de 52 mn, monté sur un récit chronologique, revient sur les traces de ces manifestations, organisées à l'appel de la Fédération de France du FLN, pour protester contre le couvre-feu imposé aux Algériens. Construit sur une avalanche de témoignages hallucinants, de révélations et de vérités longtemps refoulées, le film explique pourquoi ce crime a été occulté, pourquoi cette histoire a été dissimulée, dans quelles conditions et au nom de quelles raisons des responsables d'un Etat dit démocratique, ont-ils caché l'ampleur et la gravité de tels événements? A travers les témoignages d'anciens ministres français, de journalistes et d'historiens, en quête de vérité, ce documentaire se présente comme une contribution, destinée à faire en sorte que les événements tragiques du 17 octobre 1961 retrouvent toute leur place dans la mémoire collective et intègrent ces pages tues de l'histoire. Le journaliste Georges Mattei, celui qui fut à l'origine des travaux de recherches de J.L Einaudi sur les massacres du 17 octobre, apporte de son côté un témoignage lourd de vérité sur cette date. "L'impression que je garde des scènes de violence, c'est que le peuple de Paris s'est transformé en indicateur, en auxiliaire de la police et dénonçait les Algériens qui se cachaient dans des maisons pour échapper à la sauvagerie dont ils faisaient l'objet", dira-t-il, le regard lourd de reproches. "Octobre à Paris", un film longtemps maudit Signé Jacques Panijel, biologiste et chercheur au CNRS, "Octobre à Paris", fut cocrée avec Pierre Vidal-Naquet et le mathématicien Laurent Schwartz du Comité Maurice Audin, signataire en 1960 du Manifeste des 121 artistes et intellectuels français pour le droit à l'insoumission en Algérie. Jacques Panijel est décédé le 12 septembre 2010 à Paris d'une défaillance cardiaque. Il allait avoir 89 ans. Né en 1921, cet ancien résistant d'origine roumaine est l'auteur de La Rage , un roman sur ses années de résistance publié en 1948 aux éditions de Minuit. Egalement auteur de théâtre, il a en outre cosigné avec Jean-Paul Sassy un premier film intitulé La Peau et les os. Réalisé en 1961 avec Gérard Blain, le film a obtenu le prix Jean-Vigo. "Octobre à Paris" est le premier film consacré à la démonstration des Algériens, le 17 octobre 1961, contre le couvre-feu auquel ils étaient soumis. Entrepris clandestinement peu avant la fin de la guerre et mêlant reconstitution des massacres et plans des bidonvilles de Nanterre ou du centre de torture de la rue de la Goutte d'Or, Octobre à Paris retrace la préparation et le déroulement de cette manifestation sauvagement réprimée sous l'autorité d'un préfet nommé Maurice Papon. Longtemps interdit, présenté à Paris en mai 1968 en même temps que La Bataille d'Alger de Gillo Pontecorvo, le film de Jacques Panijel ne recevra son visa d'exploitation qu'en 1973, à l'issue d'une grève de la faim de René Vautier. Mais son réalisateur a longtemps refusé de le montrer tant qu'un préambule en forme de préface ne lui a pas été ajouté, une opération qui nécessitait des subventions restées jusque-là introuvables. Le film sera enfin vu, mais cela ne veut pas dire que la France assume son passé.