L'organisation internationale de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW) a dénoncé hier que la nature systématique des violences dont des actes de torture et des exécutions perpétrées par les forces syriennes contre des civils dans la province de Homs (centre) indique l'existence de crimes contre l'humanité. A la veille d'une réunion de la Ligue arabe au Caire, HRW exhorte l'organisation régionale à suspendre l'adhésion de la Syrie, à demander au Conseil de sécurité de l'ONU d'imposer un embargo sur les armes ainsi que des sanctions visant les responsables de ces atteintes aux droits humains, et de saisir la Cour pénale internationale (CPI) de la situation en Syrie. Selon Human Rights Watch, les forces syriennes ont tué au moins 104 autres personnes à Homs depuis le 2 novembre dernier, date à laquelle Damas a accepté un plan de la Ligue arabe destiné à mettre un terme aux violences et à trouver une solution politique. Aujourd'hui, les ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe doivent se retrouver dans la capitale égyptienne pour une réunion d'urgence visant à débattre du non-respect par la Syrie de ce plan de sortie de crise. Le rapport de 63 pages de Human Rights Watch quant à lui s'appuie sur plus de 110 entretiens menés auprès de victimes et de témoins de la ville de Homs et du gouvernorat du même nom, l'un des foyers de l'opposition au régime du président Bachar el-Assad. Le document met en évidence les violations commises par les forces de sécurité syriennes entre la mi-avril et la fin août, période durant laquelle ces forces ont tué au moins 587 civils, soit le plus grand nombre de victimes pour un seul gouvernorat. Comme dans une grande partie du reste du pays, les forces de sécurité présentes dans le gouvernorat de Homs ont assujetti des milliers de personnes à des arrestations arbitraires, des disparitions forcées et des actes de torture systématique alors qu'elles se trouvaient en détention, dénonce Human Rights Watch. D'après l'organisation, la plupart ont été libérées mais plusieurs centaines sont toujours portées disparues et la torture des détenus est un phénomène endémique. La directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de HRW Sarah Leah Whitson souligne pour sa part, que Homs constitue un microcosme de la brutalité du gouvernement syrien et que la Ligue arabe se doit de faire savoir au président Assad que la violation de leur accord n'est pas sans conséquences, et qu'elle soutient désormais l'action du Conseil de sécurité visant à mettre un terme au carnage. Selon l'HRW, d'anciens détenus ont déclaré que les forces de sécurité s'étaient servies de barres de fer chauffées à blanc pour leur brûler différentes parties du corps, leur avaient infligé des décharges électriques, imposé le maintien de positions douloureuses pendant des heures voire des jours et utilisé des dispositifs improvisés comme des pneus de voiture pour les frapper plus facilement sur les parties sensibles du corps. Celle-ci rapporte par ailleurs que des transfuges armés des forces de sécurité sont intervenus en certaines occasions pour protéger les protestataires après des tirs contre les manifestants. De plus, selon l'organisation, les habitants de certains quartiers de Homs se sont organisés sous la forme de comités de défense locaux, souvent armés, dotés pour la plupart d'armes à feu mais, dans certains cas, de grenades à fragmentation. Il est tout aussi évident que les actes de violence des manifestants ou des transfuges méritent un complément d'enquête. Cependant, ces incidents ne sauraient justifier un recours disproportionné et systématique à une force meurtrière à l'égard des manifestants qui, de toute évidence, a outrepassé toute réaction justifiable à une quelconque menace posée par des foules majoritairement non armées, souligne l'organisation. La diffusion de son rapport intervient alors que la Syrie était confrontée à de nouvelles manifestations antigouvernementales. Dans la journée d'hier, après les prières, est devenu un rendez-vous hebdomadaire pour les opposants à Bachar el-Assad depuis le début à la mi-mars du soulèvement contre le régime. Selon les Nations unies, quelque 3.500 personnes ont été tuées dans la répression brutale du mouvement de contestation. D'après des militants, des membres des forces de sécurité prenaient position sur les toits hier dans le quartier de Barzeh, à Damas. L'opposition affirme que les forces gouvernementales tirent régulièrement sur les manifestants pour les disperser. Et bien que la répression ait conduit à un large isolement international de Damas, Bachar el-Assad semble conserver une forte emprise sur le pouvoir. Le gouvernement a interdit aux journalistes étrangers de couvrir les événements, rendant difficile toute confirmation indépendante. En l'absence de toute possibilité de reportage sur le terrain, des vidéos amateurs mises en ligne sur internet et des déclarations de témoins et d'organisations militantes constituent des sources clefs d'informations. L'armée syrienne a posé de nouvelles mines Tôt, hier matin, six véhicules militaires syriens ont été repérés à partir du village libanais de Majdal, dans la région de Wadi Khaled, frontalière avec la Syrie. Des soldats étaient en train de poser des mines du côté syrien de la frontière, près du village de Wadi al-Wawiyat. La semaine dernière, l'armée syrienne avait posé des mines à l'intérieur du territoire syrien, à la frontière avec les localités (libanaises) de Knaissé et d'El Hnaider. Des responsables libanais, sous le couvert de l'anonymat, ont informé que ces mesures sont prises par les autorités syriennes pour empêcher la contrebande d'armes du Liban. Au cours des derniers mois, près de 5000 Syriens se sont réfugiés au Liban pour fuir les violences dans leur pays, secoué depuis mi-mars par une révolte populaire sans précédent, matée dans le sang par le régime du président Bachar al-Assad. Le régime syrien, qui accuse depuis le début de la révolte des bandes terroristes armées d'être à l'origine des violences, dit combattre la contrebande d'armes en provenance du Liban. Selon les experts, la contrebande d'armes vers la Syrie en provenance des pays voisins et surtout du Liban prospère à mesure que la révolte se prolonge, même si le phénomène semble concerner des trafiquants motivés plus par l'appât du gain que par des considérations politiques.