Le Plan Bleu recherche les meilleurs critères de l'efficience de l'utilisation de l'eau. Dans un contexte de rareté et de croissance de la demande, il s'agit d'éviter au maximum les conflits d'usage en raisonnant la demande, et en jouant la carte de la réutilisation. Face à l'augmentation de la population au sud de la Méditerranée, et dans un contexte de réchauffement climatique, la gestion de la demande en eau (GDE) constitue " la voie permettant les progrès les plus significatifs des politiques de l'eau en Méditerranée ", expliquait dès 1997 la Commission méditerranéenne de Développement durable. Compte tenu du coût des équipements hydrauliques, c'est en fait probablement la seule solution. La gestion par l'offre a trouvé ses limites, selon les experts qui tirent la sonnette d'alarme. Un ensemble de quatorze études et leur synthèse à finaliser concluent de la même façon au Plan Bleu pour la Méditerranée. Il s'agit pour le Plan Bleu de réfléchir aux meilleurs critères de l'efficience dans l'utilisation de l'eau. Cet organisme, dès 2005, avait identifié un gisement d'économies en chassant simplement les fuites et autres pertes de réseau. Le potentiel d'économies a été estimé à près d'un quart de la demande en eau actuelle, soit 56 milliards de m3 sur une demande totale de 220 milliards de m3 à l'échelle de l'ensemble des pays méditerranéens en 2005.Et il serait de 67 milliards de m3 à échéance 2025, dont l'essentiel au Sud. " Il ne faut pas considérer cela comme une contrainte, mais bien comme une valeur ajoutée additionnelle ", souligne Mohamed Blinda, le chargé de mission du Plan Bleu qui pilote l'ensemble de ces études. En effet, même si l'utilisation de l'eau urbaine est plus importante au Maghreb, et de plus en plus soumise à des tarifs incitant à l'utilisation raisonnable, c'est bel et bien l'agriculture qui capte en moyenne 80% de la demande totale. C'est donc là qu'il faut " réduire au maximum les pertes "affirme Mohamed Blinda, qui relève déjà depuis 2005 des " résultats encourageants. En effet, trois pays du sud méditerranéens au moins ont déjà atteint les objectifs fixés par le Plan Bleu d'augmenter de 25% les économies d'eau. " Un objectif initialement fixé pour 2020. Au Maroc, en particulier, un gros travail a été fourni par l'Administration pour mettre en œuvre des tarifications de l'eau incitant à l'économie. " La demande y a suffisamment baissé par exemple à Rabat et Casablanca pour que l'on renonce à investir dans de nouveaux équipements ", explique Mohamed Blinda. En Algérie où la demande en eau a quadruplé depuis le début des années 1970, l'étude du Plan Bleu parle d'une " limite maximum du potentiel hydraulique qui sera atteinte avant 2050 ". La demande des ménages a fortement augmenté, pendant que celle de l'agriculture baissait. Le conflit d'usage menace dans un pays qui investit dans le secteur de l'eau 2,6% de son PIB, et qui a créé en 2005 un ministère spécifique des Ressources en eau. Dans ce contexte il n'est pas étonnant que le pays mise d'abord sur des efforts de gestion de la demande pour son futur Plan national de l'eau, en phase d'élaboration. L'eau usée doit être de plus en plus considérée comme une ressource. Des projets de réutilisation en agriculture des eaux usées de stations d'épuration sont testés, en particulier sur 912 ha de vergers près de Tlemcen et 89 ha à Boumerdès. Cependant, pour Mohamed Blinda, les efforts ne sont pas encore assez conséquents. Mais," certains pays méditerranéens ont une très bonne occasion de "découpler" la croissance de la demande totale en eau de la croissance de la population et du PIB, à condition qu'elle soit accompagnée d'une "expansion verticale" de l'agriculture, à savoir accroître la productivité en augmentant les rendements pour chaque m3 utilisé et pour chaque hectare cultivé. "