Comme ses prédécesseurs depuis le retour à la démocratie, le nouveau chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy a réservé au Maroc, où il s'est rendu, hier, sa première visite officielle à l'étranger depuis sa prise de fonction le 21 décembre. Cette visite d'une journée a pour objectif de "renforcer" la relation de "bon voisinage" et la coopération dans les "questions clefs" entre les deux pays, a expliqué la porte-parole du gouvernement espagnol, Soraya Saenz de Santamaria. Bien que bref, ce déplacement est "politiquement et symboliquement important", a-t-on indiqué de source gouvernementale à Rabat. Car il s'agit également de la première visite officielle d'un dirigeant politique pour le jeune gouvernement marocain mené par l'islamiste Abdelilah Benkirane, chef du parti Justice et développement (PDJ), qui a remporté les législatives du 25 novembre. D'autant que le gouvernement d'Abdelilah Benkirane n'a pas encore été investi par le parlement. Comme ses prédécesseurs, Mariano Rajoy, qui rencontrera également le roi Mohammed VI, a à coeur de développer les relations bilatérales avec ce pays voisin, où l'Espagne est le deuxième investisseur après la France. Les PME espagnoles cherchent à s'y implanter, attirées par une croissance de quelque 5% en 2011 alors que l'Espagne est au bord de la récession. Mariano Rajoy devrait aborder avec ses hôtes le blocage, en décembre, d'un accord controversé de pêche entre l'UE et le Maroc qui a poussé l'Espagne à exiger une compensation pour sa flotte, tandis que Rabat a menacé de revoir ses relations avec l'Europe. Les députés européens ont notamment estimé que l'accord ne prenait pas clairement en compte les intérêts de la population du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole annexée par Rabat en 1975 et sujet hautement sensible depuis. Le Maroc, qui considère qu'il s'agit en fait de son territoire, propose l'autonomie à ses habitants sous sa souveraineté. Le Front Polisario, soutenu par l'Algérie, réclame l'indépendance du Sahara Occidental à travers un référendum d'autodétermination. Le nouveau ministre espagnol de l'Agriculture, Miguel Arias Cañete, a exhorté, mardi dernier, l'Union européenne à "négocier un accord le plus rapidement possible" avec le Maroc pour la reprise de la pêche. L'Espagne, un pays très gros consommateur de poisson, détient cent des 120 licences disponibles dans les eaux marocaines, selon le ministère espagnol de la Pêche qui estime que "64 bateaux et 600 emplois sont directement menacés" par le blocage de l'accord. Rabat, qui dit pouvoir se passer d'un nouvel accord sur la pêche, veut la ratification de l'accord avec l'UE sur les échanges de produits agricoles, ce que freine Madrid qui ne souhaite pas un raz-de-marée sur son marché. Enfin, l'immigration pourrait également être abordée même si les flux migratoires d'africains subsahariens vers les enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta, portes d'entrée dans l'Union européenne, ont beaucoup diminué depuis 2006 avec le renforcement de la surveillance côté marocain. La crise économique qui frappe l'Espagne a également contribué à freiner le courant migratoire.