Le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, a appelé, avant-hier, l'Europe à respecter "l'identité nationale" de son pays et le principe d'égalité entre Etats de l'UE, après que l'Allemagne a proposé de placer complètement Athènes sous tutelle budgétaire. "Quiconque pose à un peuple un dilemme entre l'aide financière et la dignité nationale ignore des enseignements historiques fondamentaux", a affirmé le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, peu avant son départ pour Bruxelles où il a participé au sommet européen, hier. "Nos partenaires savent que l'unification européenne est fondée sur l'égalité institutionnelle des Etats-membres et le respect de l'identité nationale", a-t-il ajouté, cité par un communiqué. Pas d'argent en plus sans mise en œuvre des réformes Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a laissé entendre, avant-hier, dans un entretien au Wall Street Journal que la Grèce ne recevrait plus d'argent de la zone euro si elle ne mettait pas en œuvre les réformes annoncées, agitant le spectre du défaut de paiement. La Grèce doit décider, a-t-il affirmé, à la question de savoir si la zone euro accorderait ou non un deuxième plan d'aides depuis 2010, attendu à plus de 130 milliards de dollars. L'Europe est prête à soutenir la Grèce avec un nouveau plan d'aides, a souligné le ministre allemand, mais si elle ne met pas en œuvre les décisions nécessaires et se contente d'effets d'annonce... aucun montant d'aides ne peut résoudre le problème, a-t-il fait valoir. Peut-être que nous et nos partenaires devons étudier des façons d'aider la Grèce dans cette tâche difficile d'une manière plus étroite, a-t-il ajouté, faisant allusion à sa proposition de placer la Grèce sous tutelle budgétaire en échange de nouvelles aides. L'Allemagne monte ainsi le ton alors qu'Athènes a rejeté cette proposition par l'intermédiaire de son ministre des Finances, Evangélos Vénizélos. Après plus de deux semaines de négociations intermittentes et orageuses à Athènes, le gouvernement grec semble sur le point d'avoir trouvé un accord avec ses créanciers privés en vue de l'effacement de 100 milliards d'euros de dette. L'effort des banques doit permettre de faire tomber la dette du pays à un niveau jugé soutenable bien qu'encore très élevé de 120% du PIB d'ici 2020, au lieu de 160% actuellement. Sans bouclage de ce plan, la Grèce est sous la menace d'un défaut de paiement dès le 20 mars, lorsque le remboursement de 14,5 milliards d'euros de vieilles obligations arrivera à échéance. Mais pour assurer sa survie, et lever les pressions qui pèsent sur la zone euro, Athènes négocie parallèlement avec ses créanciers institutionnels, Union européenne (UE), Banque centrale européenne (BCE) et Fonds monétaire international (FMI), en vue du déblocage d'un deuxième plan de soutien, décidé fin octobre. Pas de concession sur la souveraineté Dans une allusion transparente à l'Allemagne, M. Vénizélos s'est affirmé convaincu que "les dirigeants des pays européens, en particulier de ceux qui ont une responsabilité accrue en Europe de par leur taille, savent comment traiter les questions entre partenaires". Athènes avait déjà rejeté la veille toute concession sur sa souveraineté, après la révélation de la proposition de l'Allemagne, soutenue par d'autres pays, de donner à l'UE un pouvoir décisionnel sur la gestion budgétaire grecque. La proposition allemande, demande que la Grèce soit placée totalement sous la tutelle d'un "commissaire budgétaire" européen à l'avenir et en fait une condition pour qu'Athènes puisse recevoir le deuxième programme de prêts européens de 130 milliards d'euros qui lui a été promis. Faute de ces prêts, Athènes risque un défaut de paiement autour du 20 mars, date d'une échéance importante de remboursement de prêts. "La Grèce va devoir améliorer de manière significative son respect des engagements envers ses créanciers", en matière de réduction du déficit public, de réformes et de privatisations, dit le document, "sinon la zone euro ne sera pas en mesure d'approuver les garanties" pour le deuxième programme de prêts. Nommer un commissaire au budget Pour remplir cette condition préalable, le pays "doit accepter un transfert de souveraineté budgétaire au niveau européen pendant une certaine période", indique la proposition. Concrètement un "commissaire au budget" serait nommé par les ministres des Finances de la zone euro "avec pour tâche d'assurer un contrôle budgétaire" du gouvernement grec, avec droit de veto sur les décisions qui ne respecteraient pas les engagements pris à l'égard des créanciers. La Grèce devrait aussi s'engager dans son budget à "utiliser les revenus de l'Etat d'abord et avant tout pour le service de la dette", c'est-à-dire le remboursement des intérêts des emprunts contractés. Cet abandon de souveraineté devrait enfin, selon le document, être inscrit "pleinement" dans la législation nationale grecque, "de préférence via un amendement à la constitution". En réponse, le ministre grec des Finances a protesté de la sincérité des engagements grecs à mettre en œuvre le plan de redressement dicté au pays par l'UE et le FMI en contrepartie de son sauvetage financier. La Grèce est déjà de facto placée sous tutelle partielle de ses créanciers publics qui ont négocié avec elle plusieurs programmes d'économies budgétaires et de réformes et évaluent leur respect à intervalle régulier, avant tout nouveau déboursement de prêts. Mais la proposition allemande marquerait une montée en puissance sans précédent du dispositif en place. Pour sa part, la Commission européenne a dit vouloir "renforcer" la surveillance des finances publiques grecques et accroître ses "capacités" en la matière à Athènes, tout en insistant pour que l'Etat grec reste souverain.